Pas d'enfants sur les genoux, visières et déambulation en extérieur... Le père Noël s'adapte au Covid-19
Le père Noël a repris les animations sur les marchés et dans les centres commerciaux durant le mois de décembre. En essayant, tant bien que mal, de respecter au maximum les gestes barrières.
AVERTISSEMENT : Ce contenu proposé par la rédaction de franceinfo peut fortuitement laisser entendre que le père Noël n'existe pas et que la plupart des parents sont des menteurs.
"Oh regarde, c'est le père Noël ! Allez, va lui faire un bisou !" Chacun connaît ce moment où, hauts comme trois pommes, émerveillés par ce vieux monsieur à l'embonpoint respectable et particulièrement généreux la nuit du 24 décembre, les enfants découvrent, stupéfaits, qu'un étonnant don d'ubiquité lui permet d'errer dans un temps quasi simultané au marché de Noël du village et dans la galerie du centre commercial voisin. Le sourire aux lèvres, les parents immortalisent le moment quand leurs bambins, impressionnés mais fiers, ou épouvantés et en pleurs, prennent place sur les genoux de l'illustre vieil homme.
Mais voilà, depuis la pandémie de Covid-19, interdiction de faire un câlin au père Noël, ni de l'embrasser. Gestes barrières et distanciation sont devenus la norme, comme dans cette grande salle des mariages de la mairie du 7e arrondissement de Paris. Barbe blanche, bonnet, gants blancs, le père Noël est là, en chair et en os. Et il en impose ! Le voilà prêt à accueillir les enfants, leur offrir un petit cadeau et une photo souvenir. Mais il ne porte pas de masque. "C'est pour qu'on voit son visage et pour qu'on l'entende bien", remarque Lola, 8 ans.
Ni accolades ni effusions
Les fenêtres sont grand ouvertes. Pas d'accolades, ni effusions, juste un rapide passage pour la photo souvenir. "J'aurais pu aussi me mettre derrière un masque, reconnaît le père Noël, et à ce moment là, on arrive moins bien à créer l'esprit de Noël. Donc, ce que j'ai voulu, c'est qu'effectivement la majorité de mes rencontres se fassent à l'extérieur. Là, c'est une exception."
"Quand on est en intérieur, on s'arrange pour qu'il y ait pas trop de monde à la fois, que l'ensemble de ceux qui viennent respectent les gestes barrières, qu'ils soient masqués. À partir de là, tout se passe bien."
le père Noëlà franceinfo
Derrière ses petites lunettes rouges en demi-lune et son regard malicieux, il sourit. "Je suis vacciné", assure-t-il en se tenant le ventre, les mains recouvertes de longs gants blancs, qu'il désinfecte régulièrement à l'aide d'un spray après avoir touché les enfants qu'il tient par l'épaule. "Je reste sept ou huit heures d'affilée sans interruption, explique le père Noël, il est évident que je ne vais pas me passer du gel sanitaire régulièrement parce que j'ai beau être robuste, je ne suis pas sûr que la peau résiste à ce genre de choses. Le compromis que j'ai trouvé, c'est aussi mettre des affiches et de recadrer les adultes qui ne respectent pas les règles."
La petite Lola sourit à pleines dents aux côtés de sa petite soeur, très impressionnée par le monsieur vêtu de rouge. Leur maman Maya s'agenouille à leurs côtés pour la photo. "On fait attention, on se lave les mains, mais bon, c'est la même magie que d'habitude", confie-t-elle, sans une once d'inquiétude. "Je trouve qu'il est quand même très important de maintenir ces moments de retrouvailles autour de l'esprit de Noël", réagit une autre mère.
Pénurie de pères Noël aux Etat-Unis et au Canada
Cette année, une pénurie de figurants a mis en émoi les États-Unis et le Canada. Selon le sondage de Tim Connaghan, 18% des Santas en exercice sur les 8 000 à 10 000 que comptent les États-Unis ont préféré raccrocher le manteau et partir en retraite anticipée. Quand d'autres sont morts. Mitch Allen, le fondateur de Hire Santa, une société basée au Texas qui aide les clients à réserver des pères Noël dans tout le pays, estime que "plus de 335 pères Noël sont morts cette année" à cause du coronavirus et d'autres maladies.
A nationwide Santa shortage could mean he won't be at shopping centers or holiday parties this year. pic.twitter.com/5knXXnCpsx
— USA TODAY (@USATODAY) November 17, 2021
Mais en France, pas d'inquiétude particulière. L'an dernier, beaucoup de comédiens se sont retrouvés au chômage, entre annulation d'événements publics et restrictions sanitaires. Cette année, seuls les arbres de Noël en entreprise ont été annulés. "Toutes sortes de spectacles, parades y compris, on a 70 contrats" pour Noël, explique à franceinfo Serge Jolibois, directeur artistique de Sésame spectacles, organisation de spectacles de rue et soirées à thèmes sur scène. "Beaucoup de municipalités ont maintenu des parades mais en extérieur, ce qui est a priori une des meilleures mesures pour garder tout la distanciation vu que les groupes sont en déambulation. Ça permet d'éviter les attroupements."
Et les photos souvenirs avec l'illustre personnage sont possibles, mais dans le respect des gestes barrières. Interdiction aussi de monter sur les genoux. Serge Jolibois et sa compagnie ont trouvé la solution. "On a des trônes qui sont un peu plus larges que le fauteuil habituel du père Noël, ça nous permet d'avoir l'enfant qui est assis à côté et pas sur les genoux du père Noël, précise le directeur artistique. L'idée étant de garder une distance."
"Quand il y a beaucoup de monde, le père Noël met une visière. Mais c'est vrai qu'on évite le masque. En tout cas, on n'a pas encore trouvé de masque adapté à la tenue du père Noël."
Serge Jolibois, directeur artistique de Sésame spectaclesà franceinfo
Le père Noël se trouve alors à 50, voire à 60 centimètres des enfants, eux-mêmes masqués. Ces précautions ne suffisent pas toujours : à Meynes dans le Gard, le père Noël a été testé positif au coronavirus après avoir passé un week-end au contact des enfants du village. Pour autant, Serge Jolibois assure que ses pères Noël saisonniers ne sont pas angoissés. "Ils sont tous vaccinés. Pourtant, dans les pères Noël, il y en a qui ont plus de 65 ans et qui n'ont pas besoin de déguisements, dit-il dans un rire. Mais ils ne sont pas plus anxieux que ça. En tout cas, je n'ai pas de retour comme quoi les gens ont peur."
Santa Claus à l'heure de la visioconférence
L'alternative est aussi devenue virtuelle. Dans les années 1990, il existait le téléphone du Père Noël. Qui ne se souvient pas de cette publicité ? "C'est moi, le père Noël, tous les enfants peuvent me téléphoner, écoutez bien mon numéro !", disait le vieil homme à la télévision.
Vingt ans plus tard, c'est en visio qu'on peut contacter le père Noël. "C'est un peu, d'un côté, l'évolution du téléphone du père Noël qu'on connaissait avant, le 36 65 65 65, qui n'était finalement qu'un répondeur, explique Alexandre Azra, le fondateur de VisioPèreNoël.com. Et puis la rencontre avec le père Noël, à l'arbre de Noël de l'entreprise, ou alors dans le centre commercial."
La plateforme permet ainsi à l'enfant, à l'aide d'un adulte, de discuter avec le père Noël depuis son chalet. Soit cinq à dix minutes de visio en tête-à-tête avec le Saint-Nicolas, avec l'enregistrement vidéo en souvenir. "C'est mieux qu'une photo comme ça, on a vraiment le visage de l'enfant qui est vraiment surpris, quand il voit le père Noël qui lui parle de lui et qui lui explique qu'il connaît déjà tout un tas de choses sur lui."
"Ça apporte vraiment de la magie par rapport à un message enregistré ou un rapide passage sur les genoux au centre commercial, c'est vraiment un petit spectacle, une vraie conversation préparée en amont avec l'enfant."
Alexandre Azra, le fondateur de Visio Père Noëlà franceinfo
Depuis son lancement l'an dernier, l'entreprise a plus de 5 000 visios à son compteur. Aujourd'hui, elle est même sollicitée par les entreprises qui annulent leur arbre de Noël à la dernière minute à cause des nouvelles restrictions gouvernementales. En échange, elles offrent un bon cadeau pour une visio avec le père Noël pour les enfants des salariés.
Alexandre Azra travaille avec dix pères Noël qui complètent leur salaire grâce à cette innovation. "Ce sont tous des indépendants qui sont habituellement sculpteurs de ballons, comédiens, acteurs au théâtre ou animateurs pour enfants le reste de l'année, raconte Alexandre. Ils ont tous un statut indépendant et ils travaillent de chez eux avec leur matériel. Je leur renvoie une partie du matériel qui pourrait leur manquer et ils font ça de chez eux comme ça les arrange."
"Il n'y a pas besoin de faire de la route ni d'attendre un mercredi ou un samedi pour avoir des animations."
Alexandre Azra, le fondateur de Visio Père Noëlà franceinfo
Pour ces pères Noël saisonniers, la magie est là. "En visio, ils ont vraiment l'impression de parler depuis son chalet, sourit Alexandre Azra. Et puis, ils font des tours de magie grâce au fond vert."
L'un des dix pères Noël en exercice – et le plus jeune – s'appelle Alex. Cet étudiant de 21 ans prend son rôle très à cœur depuis trois ans. "C'est vrai que c'est rare de trouver un père Noël aussi jeune, reconnaît-il. La magie des animations fait qu'il y a le maquillage, le costume, la barbe. En général, les enfants n'y voient que du feu." Alex a découvert la plateforme lors du premier confinement, et a pu continuer à travailler. "Il y a plein de choses qu'on ne peut pas faire en réel, qu'on peut faire avec des visio comme des tours de magie, avoir des informations sur les enfants... Et puis, il ne porte pas de masque, justifie-t-il. Parce que quand on voit le père Noël, c'est déjà impressionnant pour un enfant, alors s'il y a le masque en plus, des fois, ça peut être un peu perturbant pour eux."
Le jeune père Noël a tout de même repris les animations sur les marchés. "Forcément, il y a toujours une petite crainte, on va être vraiment au contact des gens, confesse-t-il. Mais l'animation, et puis le plaisir de faire vivre la magie en général, passe au-dessus de ça."
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.