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Biathlon : déclic mental, travail ciblé sur le tir, recherche de régularité... Comment Julia Simon s'est imposée comme la patronne du circuit

Après six premières saisons en Coupe du monde marquées par l'irrégularité, la Française a explosé en 2022-2023 jusqu'à rafler le gros globe de cristal, samedi à Oslo en prenant la 5e place du sprint.
Article rédigé par franceinfo: sport, Julien Faure
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 5 min
Julia Simon lors de mass start d'Oberhof en Allemagne, le 19 février 2023. (TOBIAS SCHWARZ / AFP)

Dix-huit ans après Sandrine Bailly, une biathlète française a enfin remporté le classement général de la Coupe du monde. Julia Simon a décroché son premier gros globe de cristal, un peu plus d’un mois après avoir été sacrée championne du monde pour la première fois, samedi 18 mars, lors du sprint d'Oslo-Holmenkollen, qu'elle a terminé à la cinquième place. La Française de 26 ans originaire des Saisies récolte les fruits d'un travail de deux années, après un début de carrière en dents de scie. Le temps de changer son tir et de se construire un statut de championne.

D'énormes progrès au tir couché

A l'origine, Julia Simon n'est pas une adepte du tir. Jusqu'en 2021, elle n’avait jamais dépassé les 80% de réussite lors d'une saison complète. La saison passée, ce chiffre avait atteint 81,5% et, cette année, il a grimpé à 88,6%. Une amélioration qui s’explique par des progrès majeurs au tir couché. Lorsqu’elle s’allonge face aux cibles, la biathlète affiche un taux de réussite de 92,4%. "Son tir couché est beaucoup plus stable qu'il avait pu l'être par le passé", note Cyril Burdet, le responsable de l'équipe de France féminine, soulignant le travail spécifique réalisé avec le coach dédié au tir, Jean-Paul Giachino, "ces deux dernières années".

"Aujourd’hui, elle a une telle sérénité que lorsqu'elle arrive sur les premiers tirs, elle est quasiment en permanence aux avant-postes à la mi-course pour jouer devant dès le début. Cela a un impact énorme au niveau de la dynamique et sur son mental dans la course"

Cyril Burdet, le manager de l'équipe de France féminine

à Franceinfo: sport

Son tir debout n’en fait toujours pas l'une des têtes d’affiche dans l’exercice, mais le staff des Bleues ne s'en inquiète pas, son coach Cyril Burdet en tête. "Elle a un tir debout très engagé. Elle compense parfois une ou deux erreurs par des cadences de tir très élevées, qui mettent beaucoup de pression sur ses adversaires, notamment sur les tirs de confrontation directe. C’est une carte qu'elle joue régulièrement”.

Dernière Française avant elle à avoir remporté le classement général de la Coupe du monde, Sandrine Bailly espère qu'elle ne cherchera pas à gommer ce qui la rend unique : "Par expérience, à trop vouloir améliorer ses points faibles, on en oublie ses points forts. (...) Pour Julia, c’est exactement ça et c’est là où elle a été balèze. Elle a réussi à travailler ce tir sur le couché en y mettant de la technique, mais je trouve qu’au tir debout, elle a laissé faire son tir instinctif".

La récompense après la recherche de consistance

Julia Simon n’a pas toujours été un modèle de régularité. Avant la saison dernière, jamais elle n’avait intégré le Top 5 de deux courses consécutives. Une anomalie effacée par trois podiums consécutifs entre décembre 2021 et janvier 2022. A la fin de la saison passée, la Française a intégré le Top 10 du général de trois des quatre spécialités pour la première fois. Aujourd'hui, elle figure dans le Top 4 de chacune d’entre elles, terminant 70% de ses courses dans le Top 5.

Une progression qui valide un objectif du début d’année, comme le confie Cyril Burdet : "On a mis en place une stratégie de préparation avec une répartition des volumes un peu différente de ce qu'elle avait l'habitude de faire. Ça semble porter ses fruits cette année". Julia Simon n'avait d’ailleurs pas caché ses grandes ambitions au moment de prendre les commandes du général : "Je me sens vraiment d’avoir les armes pour garder cette régularité et jouer un classement régulier, et même le Top 5 du général".

“Ca faisait complètement partie de son projet. C’est ce qu’elle voulait pour cette saison, gagner en régularité, sur tous les formats et du coup elle le concrétise.”

Cyril Burdet, responsable de l’équipe de France féminine

à Franceinfo: sport

Sandrine Bailly confirme que si Simon a passé un cap, c’est parce qu’elle met un point d’honneur à bien figurer en course, peu importe la spécialité : "Elle n’est plus la fille qu’on sait forte en confrontation directe. Pour moi, maintenant, Julia est forte sur toutes les pistes et sur tous les formats".  Symbole de cette régularité, elle a enchaîné neuf podiums en 10 courses cet hiver de Kontiolahti à Ruhpolding. Une séquence au cours de laquelle elle a arboré pour la première fois le dossard de leader de la Coupe du monde.

Une stabilité psychologique

Pour en arriver là, Julia Simon a aussi pu s’appuyer sur un mental à toute épreuve. Un aspect souligné par Sandrine Bailly: "Parfois, on gagne un globe dans la difficulté, dans ces petites courses où on est un peu moins bien physiquement, un peu entamé, où on peut facilement passer au travers et finir au-delà de la 30e place. Elle, finalement, a réussi à rester toujours bien placée et à toujours marquer des gros points". Des propos qui corroborent ceux de Julia Simon après le sprint d’Hochfilzen : "C’était l’objectif de l’hiver, d’être présente à l’avant et pouvoir rivaliser avec les meilleures même quand je ne suis pas très bien. Il faut aussi savoir ne pas s’écouter et se faire mal, et aujourd’hui c’est ce que j’ai fait".

“De temps en temps, elle va moins bien en ski. C’est plus difficile, mais elle va s’appuyer sur une grande force mentale qui fait qu’elle ne lâche rien.”

Sandrine Bailly, ex-biathlète vainqueur de la Coupe du monde

à Franceinfo: sport

Arrivé dans le groupe France cette année, Cyril Burdet est impressionné par sa force mentale. "Je pense que c’est quelqu’un qui a toujours eu confiance en elle (...). Aujourd’hui, elle donne vraiment cette sensation que rien ne peut lui arriver". Julia Simon a désormais l’occasion de s’imposer durablement comme l’une des patronnes du circuit, ce que Sandrine Bailly l'imagine bien accomplir : "Je pense qu’elle est prête à surfer sur cette belle vague et ça ne va pas s’arrêter de suite".

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