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F1 : Toto Wolff-Christian Horner, l’autre duel du paddock

Si Max Verstappen et Lewis Hamilton se sont écharpés sur l'asphalte tout au long de l'année, leurs patrons Christian Horner et Toto Wolff ont également animé la saison.

Article rédigé par Denis Ménétrier, franceinfo: sport
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 7min
Toto Wolff et Christian Horner deux jours avant le Grand prix du Bahraïn, le 26 mars (FREDERIC LE FLOC H / DPPI MEDIA)

Les meilleurs ennemis du paddock se tendent la main. Vendredi 10 décembre, en conférence de presse, Toto Wolff, patron de l’écurie Mercedes, et Christian Horner, son homologue chez Red Bull, se sont donné une franche poignée de main pour se "souhaiter bonne chance pour ce week-end décisif". Un geste symbolique alors que les deux hommes n’ont cessé de se lancer des piques tout au long d'une saison que leurs poulains respectifs, Lewis Hamilton et Max Verstappen, vont conclure ce dimanche 12 décembre, sur le circuit Yas Marina d’Abu Dhabi.

La cordialité de l'image est trompeuse donc, comme cette photo prise en présence de Jean Todt, président de la FIA (Fédération internationale de l’automobile), après le Grand Prix fou de Djeddah le week-end dernier. "Il n’y a que Jean Todt pour avoir le courage de se mettre entre nous deux", s’était alors amusé Christian Horner. Cette boutade trahit une forme de vérité : le Britannique et son homologue Toto Wolff ne s’apprécient pas et ne le cachent pas depuis le début de la saison.

Horner revanchard

Le combat des chefs, celui qui se joue non pas sur l’asphalte mais dans les paddocks, va donc prendre fin après une escalade qui a duré toute l'année. Jamais on n’avait vu deux team managers prendre autant la lumière sur une saison de Formule 1. "Il y a toujours eu des patrons charismatiques, Frank Williams, Ron Dennis ou Jean Todt. Mais ils n’ont jamais été autant mis en avant comme le sont Wolff et Horner, qui sont plutôt à l’aise face aux caméras, pour ne pas dire qu’ils recherchent la lumière", nous explique depuis Abu Dhabi Julien Fébreau, commentateur de la Formule 1 sur Canal+.

Ces dernières années, avec l'hégémonie de Mercedes dans la discipline, Wolff s’était épargné ces querelles. La retraite prise en 2016 par Nico Rosberg, rival un peu trop sérieux d'Hamilton au sein de l'écurie Mercedes, lui avait même octroyé une certaine forme de tranquillité. Entre Wolff et Horner résidait ainsi une forme d’indifférence : le second luttait pour replacer son écurie aux sommets tandis que le premier ne se préoccupait pas de Red Bull, comme Hamilton ne se souciait pas de Verstappen, tant que le jeune néerlandais n’était pas aussi rapide que le septuple champion du monde. La donne a changé cette saison. Mercedes se retrouve accrochée par Red Bull, qui la joue, à l’image de son pilote phare, toujours à la limite.

Christian Horner et Toto Wolff avant le Grand prix d'Autriche, le 29 juin 2018 (GEORG HOCHMUTH / APA)

Si "Dirty Max" se trouve sur le circuit, "Dirty Christian" lui apporte un soutien indéfectible depuis le paddock. Christian Horner le sait : pour déboulonner un monument, ici Mercedes, sept fois de suite champion du monde des constructeurs et des pilotes, aucun moyen n’est à exclure. Le patron de Red Bull, vainqueur de quatre titres des constructeurs et des pilotes avec Sebastian Vettel (2010, 2011, 2012, 2013), est revanchard. "Horner a récupéré un projet au moment où il était dans la difficulté, avant de le faire grimper. Et quand il parle de Wolff, il décrit un homme qui a récupéré une équipe au top et qui n’a eu à gérer que ça", explique Julien Fébreau.

Mercedes et les vendeurs de canettes

Le boss de Red Bull sent que 2021 est peut-être l'année du renouveau. Avec son écurie et le conseiller sportif Helmut Marko - jamais avare en sorties salées à l’encontre de Mercedes -, Horner s’est employé à fragiliser l’édifice Mercedes. Et la stratégie a fonctionné. L’écurie menée par Wolff a multiplié les erreurs inhabituelles cette saison, qui ont permis à Verstappen et sa RB16B de rester dans la course au titre. Mais Wolff n’est pas né de la dernière pluie.

Le patron de Mercedes a su répliquer en la jouant finement, en dénonçant via Lewis Hamilton, "l’aileron très flexible" de la monoplace des pilotes Red Bull avant le Grand prix d’Espagne en mai. Fin octobre, il dénonçait au Daily Mail les tentatives de déstabilisation de Horner : "On revient à nos racines d’une certaine façon, à l’esprit de Bernie Ecclestone (ancien patron de la Formule 1, ndlr), du temps où la F1 était un soap opera. Et si le spectacle en piste n’était pas suffisamment palpitant, Bernie avait toujours une déclaration choc pour faire parler. Mais je ne me laisserai pas entraîner dans ce petit jeu", tempérait l'Autrichien.

La semaine dernière, à Djeddah, Wolff a pourtant laissé éclater sa colère, excédé par la manœuvre de Verstappen qui avait provoqué l’endommagement de l’aileron d’Hamilton. "Du côté de Wolff, il y a peut-être cette vision de l’esprit qu’ils sont Mercedes, constructeur mondial, et que ça leur ferait mal de se faire battre par des vendeurs de canettes", soutient Julien Fébreau, pour expliquer la tension du côté de l'écurie allemande.

Terminer la saison dans le calme

"Je les connais bien, j’ai beaucoup de sympathie et de respect pour tous les deux. Ce sont deux grands patrons d’équipe. Ce sont des profils différents", expliquait Cyril Abiteboul, ancien directeur de l’écurie Renault, à Franceinfo:sport en début de semaineAvant de poursuivre : "Toto est beaucoup plus latin, Christian est beaucoup plus cinglant avec des colères très, très froides, brutales. C’est beau de voir ces moments-là. C’est une bataille psychologique sur une année, auprès de la FIA ou des médias." Cette saison, Wolff comme Horner auront en effet multiplié les sorties médiatiques et les discussions avec les commissaires de course pour tenter d’avoir un impact sur leurs décisions.

Depuis le Grand Prix très chaud de la semaine dernière, la peur est que le titre se joue justement dans le bureau de Michael Masi, directeur de course de la Formule 1, en compagnie de Horner et Wolff. Et si ces derniers ont pris goût à se retrouver dans la lumière comme jamais cette saison, les deux patrons ont tous les deux affirmé ces derniers jours qu’ils préféreraient éviter ce scénario.

C'est peut-être la seule fois de l'année où les deux hommes sont tombés d'accord. Et la tension n'est pas près de retomber. "Il est impossible d’avoir une relation apaisée parce qu’il y a tellement en jeu. Tout le monde essaie de défendre les intérêts de son équipe. Je pense que nous retrouverons du respect l’un pour l’autre après le championnat, quel qu’en soit le vainqueur", a expliqué Wolff mercredi. Et de conclure : "Peut-être qu’à l’avenir, nous pourrons en rire, mais pas aujourd’hui.

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