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Paralympiques 2022 : Laurent Vaglica, le visage de la relève du snowboard

Repéré par le programme de détection du Comité paralympique et sportif français en mai 2019, le snowboardeur aixois va disputer ses premiers Jeux à Pékin.

France Télévisions - Rédaction Sport
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Temps de lecture : 5 min
Le snowboardeur français Laurent Vaglica va disputer ses premiers Jeux paralympiques à Pékin. (G. Picout – CPSF)

Ce lundi 21 février, Laurent Vaglica, méticuleux, prépare ses valises en tâchant de ne rien oublier. "C'est bien simple, je prends tout en double : deux pieds, deux emboîtures, deux cuissards, quatre planches, trois paires de fixes... Je bourre dans tous les sens mais je ne veux pas être bloqué."

Il faut dire que la mésaventure de Lillehammer, lors des championnats du monde en janvier dernier, n'est pas si loin. Auteur d'une séance de qualifications exceptionnelle avec à la clé un 5e temps et un billet direct pour les quarts de finale en snowboard cross, le gaillard de 28 ans casse sa prothèse à mi-parcours, et voit s'envoler le dernier carré qui lui tend les bras.

À ce moment-là, les souvenirs de son accident de moto en 2015 - à l'origine de l'amputation de son pied gauche - lui reviennent en mémoire de plein fouet. Dépité, il est toutefois retenu par son coach Yannis Dole pour participer à l'épreuve par équipes le lendemain, avec Maxime Montaggioni. "J'ai dû aller récupérer la prothèse d'un Américain à 22h30 dans un hôtel à 20 kilomètres, avec pas mal de galères pour démonter les vis jusqu'à une heure du matin..." 

Le manque de sommeil ne l'empêche pas de terminer au pied du podium sur la piste norvégienne. Une performance qui lui permet de gagner sa sélection pour les Jeux paralympiques de Pékin, trois ans à peine après ses débuts en tant que sportif handisport de haut niveau.

Une détection salvatrice

Jusqu'en mai 2019, jamais l'Aixois ne s'était imaginé aux portes de l'une des plus belles aventures sportives. Après son accident, il a connu l'enfer des complications médicales à répétition, entre infections osseuses et greffes de peau, en même temps que la fin de son rêve de devenir officier dans l'armée de l'air. Des années de galère qui l'ont affecté physiquement et mentalement, au point de ne plus considérer sa passion pour le sport - en particulier la gymnastique, qu'il a pratiquée de longues années - comme une alternative possible à sa reconstruction.

"J'étais tellement loin que je voulais faire des bêtises. Et je ne les ai pas faites grâce aux gens autour de moi. Je leur dois tout. Je n'avais plus aucune estime de moi à 22 ans et finalement, tout tient à une décision : celle de continuer à se battre et d'entrevoir quelque chose de plus lumineux. Pour moi, mais surtout pour eux, pour ma famille."

Laurent Vaglica

à franceinfo : sport

Son prothésiste prend les devants et l'inscrit, à Toulon, à un programme de détection des talents paralympiques en vue des Jeux de Paris 2024, mis en place par le Comité paralympique et sportif français (CPSF) et baptisé "La Relève". Laurent Vaglica réalise alors les différents tests, avec succès, et voit plusieurs fédérations se rapprocher de lui. Il entre en relation avec Christian Fémy, le patron du para ski et du para snow tricolore, et, en parallèle, s'entraîne avec plusieurs kayakistes français. Avant de devoir faire un choix.

"Mon plan était d'être sur les deux tableaux, avec le kayak en sport d'été et le snowboard l'hiver. Mais au niveau de la gestion des entraînements et des compétitions, c'était impossible. Donc je ne me suis pas trop posé la question car depuis l'accident, mon plus grand regret, c'était de ne plus pouvoir remettre la planche aux pieds. Ce n'était pas le plus facile au niveau de l'adaptation et de l'appareillage, mais je m'en foutais."

Le gamin de Fuveau devenu l'outsider de Pékin

Six mois seulement après sa détection, en novembre 2019, le licencié du Ski Club Marseille Saint-Antoine participe à sa première compétition européenne aux Pays-Bas. Il finit 18e. Les larmes aux yeux en bas de la piste, il apprend peu après qu'il est accepté pour une saison test en tant que partenaire d'entraînement. Avant d'intégrer définitivement l'équipe de France en catégorie "relève" la saison suivante.

Programmé pour les Jeux de Milan et Cortina 2026, Laurent Vaglica gratte donc son billet pour Pékin en janvier dernier. "Un énorme chamboulement", révèle l'intéressé, qui peut partager son projet paralympique avec un autre "rookie" (recrue) snowboardeur, Mathias Menendez, sur le circuit international depuis un an. Que peut-il ramener de la neige du Genting Snow Park ? Depuis Fuveau, la commune des Bouches-du-Rhône où est établi le clan Vaglica, on rêve forcément de médaille. Lui est davantage préoccupé par la santé de son coach, Yannis Dole.

"Si je ramène une breloque, j'ai peur que mon coach me fasse un infarctus ! Je me souviens qu'il y a deux ans et demi, il s'arrachait les cheveux. La première fois que je suis entré dans l'équipe et que je l'ai rencontré, il est venu me voir pour me dire que j'étais bidon. Je n'avais quasiment pris aucun cours de ma vie, je descendais en freestyle donc je n'avais pas la bonne technique. Ce serait un joli pied de nez."

Laurent Vaglica

à franceinfo : sport

Avant de boucler son paquetage, le diplômé en préparation physique n'oublie pas d'avoir une pensée pour ses trois mamies d'élèves, Nicole, Josette et Claudine, qu'il suit depuis quatre ans. "Aujourd'hui elles font 10 tours de terrain en courant, font la même routine abdos que moi... Elles se tirent la bourre, c'est génial de voir ça."

À l'envi, le snowboardeur le répète : tout ce qu'il a enduré, les douleurs des séances, la dureté des entraînements, la difficulté de trouver les bons appareillages (...), il l'a fait pour ceux qui, comme elles, le soutiennent. Mais depuis quelques mois, Laurent fait de nouveau les choses "pour lui". "Je prends du plaisir et reprends du niveau, c'est tout ce que j'aime", confesse-t-il les yeux rivés sur sa planche. Il pourra le montrer sur le cross (qualifications le 6 mars et finales le 7) et le banked slalom (qualifications le 11 mars et finales le 12 mars).

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