Cet article date de plus de quatre ans.

Retour de la haute couture, automne-hiver 2020-21, sous une forme virtuelle : les couturiers joueront-ils le jeu ?

Après l'annonce d'une Fashion Week masculine virtuelle du 9 au 13 juillet, c'est au tour de la haute couture d'adopter la mĂŞme formule du 6 au 8 juillet. Les couturiers seront-ils au rendez-vous ?  

Article rédigé par Corinne Jeammet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
Givenchy haute couture printemps-été 2020, le 21 janvier 2020 à Paris (ANNE-CHRISTINE POUJOULAT / AFP)

La haute couture sera présentée à Paris dans une édition en ligne sous forme de films du 6 au 8 juillet, juste avant la Fashion Week masculine, également virtuelle, a annoncé fin mai la Fédération de la haute couture et de la mode. "Chaque maison inscrite au calendrier officiel sera présente sous forme d'un film créatif et libre", a précisé la Fédération en soulignant que le principe du calendrier officiel sera maintenu. D'autres contenus figureront dans un volet éditorialisé de cette plateforme. 

"Au fil des années, la haute couture a perdu toute sa magie, tout a été montré" 

Lors de ce rendez-vous parisien, devenu de plus en plus international, 34 maisons avaient présenté en janvier leur collection haute couture printemps-été 2020. Combien parmi les 16 membres labellisés, les 7 griffes étrangères et  les 18 membres invités seront-ils à jouer le jeu du défilé virtuel ? La question a toute son importance quand on sait que ces semaines de la mode, qui voient habituellement affluer des milliers de personnes du monde entier, jouent un rôle important pour l'économie parisienne. La Fédération de la mode estime à 1,2 milliard d'euros les revenus générés chaque année dans ce cadre.

Le constat que fait le couturier Maurizio Galante est fort. Lors d'une interview accordée à Franceinfo culture, le 1er juin, il affirme : "au fil des années, la haute couture a perdu toute sa magie, tout a été montré - ses ingrédients ainsi que ses secrets - pensant que cela servirait à éduquer le client et à faire comprendre aux gens la valeur d'une robe et surtout à en vendre davantage. Mais tout cela n'a servi qu'à la banaliser et la dévitaliser. Internet a contribué à dévoiler ses derniers secrets : tout y est visible, tout y est accessible, instantanément".

Une certitude : la mode, dont une des fonctions est de sublimer la beauté et de communiquer des émotions, va devoir apprendre à se servir d'Internet : "il faut recommencer, raconter des histoires, de la poésie comme le ferait un bon film d’auteur. Après tout, la haute couture, c’est de la poésie vivante" ajoute Maurizio Galante qui présentera sa collection en juillet "comme une histoire que l'on raconte, comme un chuchotement à une oreille curieuse et attentive. Images, musique et gestes feront partie de ma présentation, de mon univers, celui de ma maison". 

Comment valoriser le savoir-faire ?

Domaine d'excellence, la haute couture française - organisée autour de maisons pour certaines anciennes - est destinée à une élite fortunée, et demeure le fruit du travail des créateurs mais aussi de leurs précieux collaborateurs (brodeurs, plumassiers, plisseurs...) qui ont su transmettre des savoir-faire séculaires tout en innovant.

Avec cette nouvelle formule, une grande question : comment ces trésors - qui constituent notre patrimoine et sont habituellement présentés lors de shows spectaculaires ou intimistes - seront-ils palpables sur Internet ? Faut-il montrer l'envers du décor ? "Je ne souhaite pas montrer les savoir-faire au travail, car ils faire font partie de l'âme et c’est l'un des secrets de la haute couture" explique le couturier Maurizio Galante pour qui "une nouvelle création est avant tout une idée où j'imagine le comportement d'une robe, qui accompagnerait le caractère et les gestes de la personne qui la porterait. La technique est l'un des éléments pour obtenir les résultats que je recherche". 

Et d'ajouter : "Dans la cuisine quand un plat manque de saveur, des épices y sont ajoutées, non pour un palais de qualité mais pour un palais simple car la réussite d'un plat est à juger dans son résultat final et non dans les ingrédients. Ainsi, quand une collection est bonne, un couturier n'a pas besoin de montrer la magie des coulisses, il doit garder jalousement ses secrets".


Chitose Abe pour revisiter Gaultier ou Balenciaga confirmeront-ils leur participation ?

Les annonces faites en janvier dernier seront-elles d'actualité en juillet ? Les couturiers restent pour l'instant très silencieux, aucune communication non plus du côté de la Fédération de la haute couture et de la mode. 

Lors de la précédente semaine de la haute couture, Jean Paul Gaultier avait annoncé qu'il invitait désormais chaque saison un designer pour réinterpréter les codes de sa maison et donner sa vision du savoir-faire haute couture. Chitose Abe de la maison de prêt-à-porter Sacai avait été la première créatrice nommée à la direction artistique de sa prochaine collection haute couture automne-hiver 2020-21. Relèvera-t-elle ce challenge en juillet ?

Par ailleurs, Balenciaga avait annoncé vouloir renouer avec le monde de la haute couture avec une première collection dès juillet. Demna Gvasalia, son directeur artistique géorgien, déclarant dans Le Figaro le 20 janvier : "Nous venons de là, et nous y revenons après plus de cinquante ans". "J'y pensais depuis mon arrivée en 2015 chez Balenciaga". 

Après la haute couture, la Fashion Week masculine 

Cette saison de la haute couture, qui n'a lieu qu'à Paris contrairement aux semaines du prêt-à-porter dans les quatre coins du monde, sera suivie de la Fashion Week dédiée à la mode masculine, du 9 au 13 juillet. Ces évènements qui seront diffusés sur des plateformes dédiées remplacent la semaine du prêt-à-porter (programmée initialement du 23 au 28 juin) et celle de la haute couture (du 5 au 9 juillet) qui avaient été annulées en raison de la pandémie du coronavirus.

Commentaires

Connectez-vous Ă  votre compte franceinfo pour participer Ă  la conversation.