"Je suis encore un peu sur le petit nuage de cette arrivée de fou" : Francis Joyon, après sa victoire sur la route du Rhum
Francis Joyon a remporté pour la première fois la prestigieuse Route du Rhum lundi. Le skipper s'exprime sur franceinfo après sa victoire dans les derniers kilomètres de la course.
Une course de 6 500 km, sept jours et sept nuits et un final de folie lundi 12 novembre sur la Route du Rhum. C'est le skipper Francis Joyon qui s'est imposé à 62 ans, pour sa septième participation de la prestigieuse course. Il a doublé François Gabart sept minutes avant la ligne d'arrivée. Francis Joyon est revenu sur sa victoire à l'arrachée.
franceinfo : Dans quel état êtes-vous, quelques heures seulement après votre arrivée?
Francis Joyon : Je suis encore un petit peu sur le petit nuage de cette arrivée de fou. Ca a été un moment complètement incroyable. Tout a été incroyable pendant cette course. Depuis le début où on a eu une série de mauvais temps avec des vagues où le bateau bondissait furieusement, où on était à la limite du chavirage, à la limite de l'avarie. Après ça a été les jours de régate en me rapprochant petit à petit de François Gabart qui menait super bien son bateau et qui avait des petits soucis techniques. Et puis, cette arrivée de folie, le tour de la Guadeloupe, ça a été vraiment trop intense. Jusqu'à la dernière seconde c'était pas gagné puisque tout s'est joué dans le dernier virement de bord, juste avant la ligne d'arrivée. Dans la nuit avec les centaines de bateaux spectateurs, on ne voyait même pas où était la ligne, et il y avait des obstacles, il y avait des bancs de sable. Et donc jusqu'à la dernière seconde j'étais pas sûr.
Votre bateau est moins moderne que ceux de vos principaux concurrents, du haut de vos 62 ans vous ne partiez pas favori, c'est la victoire de l'expérience ?
C'est peut-être justement le fait que ce bateau soit un monument historique. Il faut savoir que les bateaux de course n'ont pas normalement une durée de vie très longue. Là, il a gagné quand même sa troisième Route du Rhum, avec trois skippers différents. J'étais donc obligé d'être à la hauteur du bateau. Il y avait une grosse pression de ce côté-là. On m'a dit que j'étais sur le bateau qui gagne, qu'il fallait donc que je gagne. Je dirais qu'à 62 ans on a peut-être un petit peu moins de force dans les bras de temps en temps, et puis un petit peu plus de neurones à d'autres. Pour être plus modeste, on a fait plus de bêtises que les autres et donc on n'est pas censé refaire les bêtises qu'on a déjà faites. Et ça c'est ce qu'on appelle l'expérience en fait. En nautisme, ça apporte beaucoup.
François Gabart vous a chaudement félicité après l'arrivée, on imagine pourtant sa déception. Cette sportivité, c'est toujours comme ça dans le monde de la voile ?
Je pense que François a un esprit sportif formidable. Parce qu'il a mené cette course de bout en bout. C'est moi qui m'apprêtais à le féliciter chaudement parce que je pensais arriver plutôt second. Je m'apprêtais à lui dire gentiment que grâce à moi, il a eu une course un petit peu animée et donc je trouve qu'il fait preuve d'une grande sportivité. C'est tout à fait à son image, j'ai beaucoup d'admiration pour lui.
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