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"Jo-Wilfried Tsonga a été un guerrier, un vrai boxeur, comme Yannick finalement", salue Patrice Hagelauer, l'ancien coach de Yannick Noah

Le Français, qui a mis un terme à sa carrière après sa défaite contre Casper Ruud mardi, a le deuxième plus gros palmarès du tennis masculin français derrière Yannick Noah.

Article rédigé par franceinfo: sport - Louis Delvinquière
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
Jo-Wilfried Tsonga rageur lors de l'édition 2015 de Roland-Garros, tournoi au terme duquel il a été éliminé en demi-finales par Stan Wawrinka. (ELLA LING / BACKPAGE IMAGES LTD / AFP)

On ne verra plus son sourire, ses bonds et ses pouces en l'air en lévitation. Ses moments de joie en communion avec un public très souvent acquis à sa cause. Comme un coup de semonce, Jo-Wilfried Tsonga a fait ses adieux après une superbe bataille finalement perdue contre Casper Ruud, mardi 24 mai, sur le court central de Roland-Garros.

Pour témoigner de l'influence de "Jo" sur la petite balle jaune tricolore, Patrice Hagelauer, qui a été entraîneur de Yannick Noah et a été Directeur technique national (DTN) de la Fédération française de tennis (FFT), revient sur les aspects qui font du Manceau un nom à part dans l'histoire du tennis hexagonal.

Jo-Wilfried Tsonga, à l'instar des Yannick Noah, Henri Leconte, est de ceux qui ont marqué leur époque. Au total, "Jo" a glané pas moins de 18 titres chez les professionnels dont deux Masters 1000, à Paris en 2008 et à Toronto en 2014, sans oublier une finale en Grand chelem (Open d'Australie) et en Masters. Il est ainsi devenu le premier Français à atteindre les quarts de finale des quatre Majeurs dans l'ère Open.

"C’est quelqu’un qui s’engage totalement, tout le temps"

"Il a été un guerrier, résume Patrice Hagelauer. Il fallait qu'il le soit de toute façon. C’est quelqu’un qui s’engage totalement, tout le temps, mais vraiment tout le temps. Avec un gros service et un gros coup droit, c’était un vrai boxeur. Comme Yannick (Noah), finalement." Un hommage de la part de l'homme qui a mené Yannick Noah à la conquète de Roland-Garros en 1983, la dernière victoire en Grand chelem d'un Tricolore chez les hommes.

Et c'est toute une génération que Tsonga a marqué. Parler de Tsonga, c'est aussi évoquer les trois autres "Mousquetaires" : "Il a tenu la baraque avec les copains. Ils sont quatre de la même génération avec Gaël Monfils, Richard Gasquet et Gilles Simon. L’émulation s’est créée autour de ce groupe", témoigne Patrice Hagelauer, qui les a vu grandir. L'ancien technicien se souvient notamment des Jeux olympiques de Londres, en 2012.

"J’ai eu la chance d’être à Londres pour la médaille d’argent en double avec Michaël Llodra. Jo-Wilfried montre toujours sa joie quand il gagne. Ce jour-là, il pleurait de joie dans les vestiaires. On a ressenti toutes les émotions qui ressortaient et tout le travail pour en arriver là. Ils étaient heureux pour eux, mais aussi pour le pays."

Patrice Hagelauer, ancien DTN

à franceinfo: sport

"Malheureusement, oui, je m’y attendais, reconnaît-il. Cela fait un petit moment qu’il avait des soucis physiques. Pour un joueur, quel qu’il soit, et qui plus est pour un costaud comme Jo-Wilfried, quand on sent que le corps souffre et que la performance n’est plus trop là, c’est compliqué." 

Avec son mètre quatre-vingt-huit et ses 91 kilos, Tsonga et son jeu puissant ont dû compter avec de nombreuses blessures et ce, depuis le plus jeune âge. "Jo a été embêté par des soucis physiques depuis la catégorie juniors, au dos, aux genoux… et il a dû gérer et revenir à chaque fois. Et quand on est costaud et qu’on a un jeu de puncheur, c’est plus dur." Après plus de trente années de tennis et presque vingt à haut-niveau, le corps a dit stop : "Quand on est dans ces années-là, on récupère difficilement, c’est plus dur d’enchaîner les matchs. Il ne supporte sans doute plus de ne pas pouvoir se bousculer lui-même"; avance Patrice Hagelauer.

"On va regretter des joueurs comme Jo-Wilfried, on était tellement habitués à le voir..."

Patrice Hagelauer, ancien coach de Yannick Noah

à franceinfo: sport

L'ancien entraîneur de l'équipe de France de Coupe Davis (notamment lors du sacre de 1991) confie une frustration en regardant la belle carrière de son ancien protégé : "J’ai un regret : qu’il n’ait pas eu le corps qui suivait suffisamment, comme d’autres sur le circuit. Il a été cinquième mondial avec tous ces problèmes. Il aurait pu avoir une plus grosse carrière encore."

Sur le chemin de la transmission depuis 2018

Depuis 2018, Jo-Wilfried Tsonga a lancé son académie de tennis, la "All In Tennis Academy" aux côtés de Thierry Ascione, son entraîneur depuis 2012. "C’est très important d’avoir des anciens joueurs qui transmettent pour donner leur expérience, souligne Hagelauer en connaissance de cause. Si des joueurs comme Jo-Wilfried transmettent leur état d’esprit : ça vaut tout l’or du monde. Il peut donner aux autres de manière positive."

Le modèle fonctionne, et le plus criant, ces dernières années, se trouve en Espagne, avec notament Carlos Moya qui s'occupe de Rafael Nadal. Mais pas seulement. "Tous les anciens ont leur académie et s'occupent des meilleurs joueurs. Si on prend le jeune Carlos Alcaraz, il est entraîné par Juan Carlos Ferrero", précise Hagelauer qui voit désormais Jo-Wilfried Tsonga avoir ce rôle. "C’est quelqu’un de sympa, de généreux : Jo à la classe !" 

A bientôt 37 ans, Jo-Wilfried Tsonga s'est placé sur le chemin de la transmission, avec des valeurs comme notamment cette "reconnaissance éternelle envers ses entraîneurs" qu'apprécie Patrice Hagelauer. Pour faire naître la relève du tennis français.

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