Cet article date de plus de trois ans.

Rachat de Newcastle : Amanda Staveley, l'influente femme d'affaires qui chuchote à l'oreille des investisseurs du Golfe

La femme d’affaires a joué les intermédiaires et piloté ces derniers mois le rachat de Newcastle en profitant de ses contacts dans le Golfe.

Article rédigé par franceinfo: sport, Denis Ménétrier
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Amanda Staveley, la négociatrice derrière la reprise de Newcastle (ici en avril 2008 lors d'un match Liverpool-Chelsea).  (PAUL ELLIS / AFP)

Après Manchester City, devenu en moins de dix ans l'un des clubs les plus puissants du Royaume-Uni, Newcastle pourrait devenir à son tour la nouvelle place forte du football anglais. Les Magpies, jusque-là détenus par le milliardaire et directeur général de Sports Direct Mike Ashley, ont officiellement été rachetés par le Public Investment Fund (PIF) jeudi 7 octobre.

Cette acquisition par un pays du Moyen-Orient d'un club de Premier League n'est pas sans rappeler celle des Citizens à l'été 2008 par un fonds d'investissement basé à Abu Dhabi. Derrière les rachats de ces deux clubs, une seule et même femme : Amanda Staveley, la "fixeuse". Une femme d'affaires britannique qui joue les intermédiaires entre les clubs de Premier League et les riches investisseurs qui proviennent du Golfe.

La différence entre le rachat de Manchester City en 2008 et celui de Newcastle en 2021 ? Staveley est parvenue à s'impliquer au point de désormais détenir 10% des parts de Newcastle, elle qui souhaitait depuis longtemps être partie prenante d'un club de football britannique.

À Dubaï pour le business

Il y a douze ans, la fondatrice de PCP Capital Partners se faisait donc remarquer en participant activement au rachat de Manchester City. Avant cela, Amanda Staveley avait déjà connu une éphémère célébrité en partageant la vie du prince Andrew, le fils cadet de la reine.

Mais c'est bien en aidant Khaldoon Al Mubarak à acquérir les Citizens à l'été 2008 que la femme d'affaires se fait un nom. En s'installant à Dubaï au milieu des années 2000 pour son business, Amanda Staveley rencontre de nombreux investisseurs, enclins à placer leur argent à l'étranger. Dans cet émirat qui est l'une des places fortes du business dans le Golfe, la Britannique y rencontre des Iraniens, des Saoudiens, des Émiratis ou encore des Qataris.

Peu importent les divisions entre les différents pays de la région, Amanda Staveley discute avec tous les potentiels investisseurs intéressés par des placements à l'étranger, en particulier du côté du Royaume-Uni. Et c'est avec des Qataris qu'elle réalise un deuxième gros coup en même temps que le rachat de Manchester City à l'été 2008.

Cette année-là, la banque britannique Barclays est frappée de plein fouet par la récession économique mondiale et cherche des investisseurs pour éviter d'être remise à flot par le gouvernement britannique. La propriétaire de PCP Capital Partners intervient et convainc le fonds d'investissement qatari, le Qatar Investment Authority (QIA) - qui rachètera le PSG quelques années plus tard en passant par sa filiale QSI -, d'injecter plus de 3 milliards de livres (3,8 milliards d'euros à l'époque) dans Barclays.

Barclays et Staveley, meilleurs ennemis

Depuis ses deux coups d'éclat de 2008, Amanda Staveley continue de discuter avec les riches investisseurs du Golfe qui placent leur argent dans différents domaines, tout en touchant d'importantes commissions, à l'image des 30 millions de livres (38 millions d'euros) pour le sauvetage de la banque Barclays. C'est d'ailleurs cette commission, que Staveley juge trop basse par rapport à ce qu'ont pu toucher d'autres intermédiaires, qui a poussé la Britannique à attaquer en justice la banque britannique et à lui réclamer plus d'un milliard d'euros de dommages et intérêts. Une affaire toujours en cours.

Ces dernières années, c'est donc entre cette affaire judiciaire, des opérations avec des investisseurs venus du Golfe et la volonté de racheter un club de Premier League qu'Amanda Staveley partageait sa vie, elle qui souhaitait que le Royaume-Uni reste dans l'Union européenne. Diagnostiquée en 2013 positive à la maladie dégénérative de Huntington (qui touche le système nerveux), la femme d'affaires britannique répétait à l'envi qu'elle ne souhaitait pas perdre de temps et il se disait en coulisses que ses efforts pour investir dans un club de football se faisaient plus concrets.

Pas loin de racheter les Magpies en 2018

En 2017, Staveley aurait ainsi participé, avec plusieurs groupes d'investisseurs, à une offre de plus d'un milliard d'euros pour racheter Liverpool, déclinée par les dirigeants des Reds. Début 2018, la femme d'affaires tentait d'acquérir, seule, le club de Newcastle. Mais à l'issue de longues négociations, le propriétaire Mike Ashley, s'était positionné clairement : "Les tentatives pour atteindre un accord avec Amanda Staveley et PCP se sont révélées être éreintantes, frustrantes et une perte de temps".

Pas rancunière, Staveley a récemment expliqué qu'il n'y avait "aucun problème avec Mike Ashley. De l'eau a coulé sous les ponts". Surtout, la femme d'affaires a fait marcher son flair et réalisé ce qu'elle fait de mieux pour se repositionner sur le dossier Newcastle, comme l'expliquait en 2014 Guy Hands, un ancien collègue de Staveley : "Elle fait ce que la plupart des banquiers d'affaires ne sont pas capables de faire : elle écoute." Attentive, Amanda Staveley a su percevoir les volontés des Saoudiens et du nouveau dirigeant Mohammed Ben Salmane d'investir dans le sport et dans un club à l'étranger, dans le cadre du projet de diversification de l'économie du royaume, Vision 2030.

Une place réservée au sein du conseil d'administration

Grâce aux fonds presque sans fin du PIF et à une participation de PCP Capital Partners, Amanda Staveley réalise aujourd'hui l'un de ses objectifs : s'impliquer dans un club de football de Premier League. À Newcastle, donc, où lui est réservée une place au sein du conseil d'administration. En février 2019, lors d'un sommet à Abu Dhabi, elle s'exprimait ainsi : "Nous avons toujours pensé que le moment d'être audacieux et de faire des investissements, c'est quand le marché est volatile." La crise liée à l'épidémie de Covid-19 a peut-être accéléré le rachat de Newcastle par le PIF et servi les intérêts de la femme d'affaires.

Le rachat de Newcastle est un investissement de long-terme et nous visons des trophées majeurs"

Amanda Staveley

AFP

Après de nombreuses questions soulevées par cette acquisition par une puissance étrangère, les Magpies passent bien pavillon saoudien, avec une participation de PCP Capital Partners. Newcastle devrait donc se transformer progressivement en place forte du football européen et investir de manière conséquente sur le marché des transferts lors des prochaines saisons. Et de son côté, Amanda Staveley confirme, une fois de plus, qu'elle est bien l'une des femmes les plus influentes de la planète football.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.