Coupe du monde 2018 : pubs misogynes, blagues douteuses, agressions sexuelles... Carton rouge pour le sexisme !
Le Mondial russe compte (déjà) son lot de dérapages.
La Coupe du monde 2018 a commencé depuis une semaine et de nombreux comportements déplacés voire franchement scabreux ont déjà fait scandale tant du côté des supporters que des publicitaires. Même une députée russe et la Fédération argentine de football y sont allés de leurs conseils sexistes. Franceinfo s'est penché sur les principaux dérapages machistes en marge de la compétition.
Des clichés à la pelle dans les pubs
"Rien à foot ! Ce soir, c'est soirée filles." Les filles n'aiment pas le football. C'est en tout cas le cliché véhiculé par la marque de vêtements Bizzbee avec sa ligne de tee-shirts créée pour le Mondial et repérée par le site Terrafemina. Le compte Twitter @PépiteSexiste a épinglé cette campagne qui réitère un stéréotype bien connu sur le rapport, prétendument conflictuel, des femmes avec le sport.
#QuizDuJour : saurez-vous trouver les stéréotypes qui se cachent dans cette collection #CoupeDuMonde, @bizzbee vous jouez aussi ?#Bizzbeeandme @FootdElles pic.twitter.com/2yZfMQSJ2l
— Pépite Sexiste (@PepiteSexiste) 6 juin 2018
En Russie, Burger King s'est de son côté distinguée via son compte Twitter. La chaîne de fast-foods s'engageait en effet à offrir son célèbre Whopper à vie aux femmes russes qui tomberaient enceintes de joueurs participant à la Coupe du monde. Face au déluge de critiques, Burger King a rapidement supprimé son message et présenté ses excuses.
Mais le spot publicitaire qui remporte la palme du sexisme est sans doute celui de la marque de lingerie mexicaine Vicky Form, qui propose aux femmes une culotte vibrante pour mieux apprécier le Mondial. Baptisée "Siente el Juego" ("Ressens le jeu"), cette culotte, "encore à l'état de prototype", d'après le magazine Elle, est sensée permettre aux couples de surmonter leur "crise" pendant la compétition. Comment ? En envoyant des vibrations en temps réel, grâce à un robot qui interprète les actions des joueurs.
Sans surprise, les commentaires outrés s'accumulent sous la vidéo : "Quelle horreur de faire la promotion de quelque chose de si sexiste, offensant et pathétique !" Sur le site de la marque, on apprend que l'on peut se procurer le sous-vêtement pour 40 euros même s'il est toutefois encore impossible de l'acheter.
L'applaudissement mal placé de Patrice Evra
Bad buzz. Patrice Evra a été vivement critiqué sur les réseaux sociaux après avoir applaudi Eniola Aluko, footballeuse internationale anglaise, sur le plateau de la chaîne anglaise ITV, où il officie en tant que consultant. "Très bon", a lancé l'ancien capitaine de l'équipe de France, affichant ostensiblement sa surprise, après l'intervention documentée et pertinente de la joueuse à propos du jeu de l'équipe du Costa Rica.
I brittiska ITV verkar Patrice Evra väldigt överraskad av det faktum att Eni Aluko kommer med en fotbollsanalys. pic.twitter.com/YCxwXz5zhL
— Richard Henriksson (@FotbollsArena) 17 juin 2018
Cette attitude, jugée misogyne par plusieurs internautes britanniques, lui a valu quelques vives réactions. "Patrice Evra se montre surpris et 'applaudit' l'analyse d'Eniola Aluko... Horrible, sexiste", réagit l'un d'eux.
Patrice Evra showing surprise and actually *clapping* Eni Aluko's analysis... awful, patronising
— Omar Chaudhuri (@OmarChaudhuri) 17 juin 2018
"Patrice Evra avec son sexisme en toute décontraction dans le studio d'ITV. Choqué qu'une femme en sache tellement sur le football", commente un autre.
Patrice Evra with the casual sexism in the #itvworldcup studio today. Shocked that a woman knows so much about football #ILoveThisGame #unclepat
— Ryan (@TheRealRYAN1987) 17 juin 2018
La blague graveleuse des supporters brésiliens
C'est une vidéo qui met très mal à l'aise. La scène est filmée à Moscou, en marge de la Coupe du monde. On y voit des supporters de la Seleçao encourager une jeune femme russe à répéter des propos dégradants. Entourée d'une dizaine de fans aux couleurs de l'équipe brésilienne, ils crient à tue-tête "boceta rosa !", ce qui veut dire "chatte rose" en portugais. Des mots que la jeune femme répète sans comprendre, pensant scander un chant de supporters.
Au Brésil, la vidéo de mauvais goût a été vivement condamnée par de nombreuses personnalités féminines. "Ce n'est pas drôle, c'est du machisme, de la misogynie et c'est honteux, totalement honteux", s'est insurgée sur Instagram la mannequin Fernanda Lima, qui a assuré la présentation du tirage au sort du Mondial 2014. "Quelle honte", a renchéri l'actrice de télénovelas Bruna Marquezine, petite amie de Neymar. Face à cette déferlante de critique, le ministère des Affaires étrangères brésilien a réagi et expliqué à l'AFP avoir pourtant publié un "guide consulaire" comportant des recommandations pour éviter tout débordement.
Les conseils douteux de la fédération argentine
"Les femmes russes aiment que les hommes prennent les devants." Voilà le type de conseils présents dans un manuel édité par l'Association argentine de football (AFA), rapporte le quotidien argentin Clarín, cité dans un article de Courrier International.
Mardi 15 mai, lors d'un "cours préparatoire" à la Coupe du monde de football, les participants ont reçu un manuel truffé de propos sexistes. "Les femmes russes, comme toutes les femmes du monde, accordent beaucoup d'attention au fait que tu sois propre, que tu sentes bon et que tu sois bien habillé", était-il indiqué. Des conseils sur deux pages, à destination des dirigeants, des footballeurs et des techniciens qui participent à la Coupe du monde en Russie.
Posté sur les réseaux sociaux par les journalistes argentins, le manuel a vite fait réagir. Un internaute commente ainsi : "Très moderne le manuel de l'AFA sur la Coupe du monde", quand un autre poste : "À l'AFA, ils vous apprennent à vous taper une fille russe".
En la @afa te estarían enseñando a levantarte una chica rusa. (Via @juanmatucci) pic.twitter.com/G4nOdCxt9w
— Roberto Martínez (@robertopuntocom) 15 mai 2018
Mais le co-auteur du guide et professeur de russe, Eduardo Pennisi, est resté sur ses positions : "Les femmes russes sont très spéciales, tout est bien expliqué dans ce guide", a-t-il osé, précisant à Clarin qu'il avait trouvé ces conseils sur internet et qu'il les avait jugés "intéressants".
Les consignes racistes d'une députée russe
"Quand c'est la même race, ça va." Interrogée sur une radio, jeudi 14 juin, Tamara Pletnova, députée communiste de 70 ans, a vivement encouragé ses compatriotes à ne pas avoir de relations sexuelles avec les étrangers de passage pour la Coupe du monde. La patronne de la commission des affaires familiales à la Douma, le Parlement russe, a tenté de justifier : "Quand c'est la même race, ça va, mais quand on mélange les races, on produit des enfants qui souffrent beaucoup dans notre pays et depuis très longtemps. Il vaut mieux que les Russes aient des enfants russes."
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Des propos qui ont provoqué une vague d'indignation sur les réseaux sociaux russes. Le porte-parole du Kremlin est intervenu pour commenter l'affaire expliquant : "Les femmes russes sont les meilleures du monde, elles font ce qu'elles veulent", a-t-il tranché.
Des journalistes agressée en directpar des supporters
C'est une scène qui a malheureusement des airs de déjà-vu. Jeudi 14 juin, alors que la journaliste colombienne Julieth Gonzalez Teheran est en duplex pour la chaîne allemande Deutsch Welle, un supporter l'embrasse et en profite pour lui toucher la poitrine. Un geste immédiatement condamnée par la chaîne : "Ce n'est pas un baiser, c'est une attaque non consentie", a-t-elle dénoncé.
La journaliste, qui a tenté de rester impassible, a elle aussi partagé la vidéo sur son compte Instagram. "Nous ne méritons pas ce traitement. Nous sommes toutes aussi professionnelles et méritantes que vous", a-t-elle notamment précisé. Son message a été vu plus de 33 000 fois. De quoi faire réfléchir les supporters irrespectueux ? Malheureusement, non. Lundi 25 juin, alors que Kethevane Gorjestani, une journaliste franco-américaine de France 24, est en duplex à Saint-Pétersbourg (Russie), pour commenter la première place du groupe A occupée par l'Urugay, un homme avec des lunettes de soleil et vêtu d'un maillot de supporter arrive derrière elle. Il met la main sur une de ses épaules et parle en même temps qu'elle. Il s'en va deux secondes, puis revient derrière elle. Cette fois il envoie un baiser, embrasse son tee-shirt puis la journaliste, dans le cou.
"Dansez et célébrez votre équipe, mais ne m'embrassez pas, ne me pelotez pas et laissez-moi faire mon travail", a réagi Kethevane Gorjestani en publiant, mercredi, la séquence sur son compte Twitter.
Monday in St Peterburg. Sadly this (and worse) happens to us female sports reporters regularly, especially when covering football. By all means sing, dance and celebrate your team but don’t kiss me, don’t grope me and let me do my job #letherwork #deixaelatrabalhar pic.twitter.com/FDFbsXRMk5
— Kethevane Gorjestani (@ketgorjestani) 27 juin 2018
"Malheureusement ceci (et même pire) arrive à nous, journalistes sportives, régulièrement, surtout quand on couvre le football", ajoute-t-elle dans son tweet.
Une scène qui n'est pas une première : en avril, la journaliste Marina Lorenzo, en duplex pour le match entre le Barça et le FC Séville, avait dû recadrer des supporters particulièrement envahissants.
Faut pas la chercher @MarinaLorenzo_, vale ? #Jplus1 pic.twitter.com/6IowK4B5rB
— J+1 (@jplusun) 22 avril 2018
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