JO de Paris 2024 : comment la délégation olympique israélienne va-t-elle être protégée ?

Une partie des quelque 90 athlètes représentant l'Etat hébreu a rejoint Paris en début de semaine, sur fond de tensions importantes provoquées par la guerre dans la bande de Gaza.
Article rédigé par Catherine Fournier - Pierre de Cossette
France Télévisions
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Temps de lecture : 9min
Les membres de la délégation israélienne aux Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 avant le départ à l'aéroport Ben-Gourion, près de Tel-Aviv, le 22 juillet 2024. (JORGE NOVOMINSKY / AFP)

C'est l'un des premiers rendez-vous sensibles de la compétition, avant même la cérémonie d'ouverture. Les footballeurs israéliens affrontent le Mali au Parc des Princes, mercredi 24 juillet à 21 heures, pour le début du tournoi olympique. Un match sous haute sécurité, à deux jours du début officiel des JO de Paris 2024, auquel doit notamment assister le président israélien, Isaac Herzog. Les entraînements de l'équipe israélienne, qui se tiennent dans les Yvelines, se déroulent déjà sous surveillance, a appris franceinfo de source policière.

Alors que les tensions importantes provoquées par la guerre entre Israël et le Hamas dans la bande de Gaza n'ont pas manqué de secouer la société française ces derniers mois, le débat autour de la participation de l'Etat hébreu aux JO a été relancé par le député insoumis Thomas Portes. "Non, la délégation israélienne n'est pas la bienvenue à Paris", a-t-il déclaré samedi, lors d'un rassemblement de soutien au peuple palestinien. Une attitude aussitôt qualifiée d'"irresponsable" par le président du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif). "Thomas Portes met (...) une cible dans le dos des athlètes israéliens, déjà les plus menacés des Jeux olympiques", a dénoncé Yonathan Arfi sur X, rappelant qu'aux Jeux de Munich, en 1972, 11 membres de la délégation israélienne ont "été assassinés par des terroristes palestiniens", lors d'une prise d'otages dans le village olympique.

Des unités d'élite mobilisées

Une cérémonie commémorative pour les 52 ans du drame doit d'ailleurs se tenir à l'ambassade d'Israël, à Paris, le 6 août, a appris franceinfo de source diplomatique israélienne. Si le spectre de cet attentat plane depuis un demi-siècle sur la sécurité des sportifs israéliens lors des JO, le contexte sécuritaire est cette fois-ci particulièrement sensible pour la délégation composée de près de 90 athlètes. Depuis l'attaque terroriste menée par le Hamas en Israël le 7 octobre, suivie de la violente réplique de l'Etat hébreu contre le mouvement islamiste dans l'enclave palestinienne, les actes antisémites ont bondi de 300% en France au premier trimestre de l'année.

Dénonçant des "relents d'antisémitisme" dans les propos du député Thomas Portes, Gérald Darmanin a annoncé dimanche qu'il avait été décidé il y a 15 jours que "l'intégralité des équipes" israéliennes – athlètes, staff et arbitres – serait protégée "24h sur 24" par les forces de l'ordre pendant la durée de la compétition. Le ministre de l'Intérieur a précisé lundi que cette protection serait assurée par le GIGN, une unité d'élite de la gendarmerie nationale. Selon nos informations, le Raid, la force d'intervention spécialisée de la police, ainsi que des effectifs de la préfecture de police de Paris, seront également mobilisés pour cette mission.

Les forces de sécurité françaises se partageront la protection des équipes israéliennes en fonction des disciplines, a appris franceinfo de source sécuritaire. Plusieurs athlètes de la délégation, dont une partie s'est envolée de Tel-Aviv lundi pour Paris, sont susceptibles de remporter des médailles, notamment la taekwondoïste Avishag Semberg, médaille de bronze aux JO de Tokyo en 2021, le gymnaste Artem Dolgopyat, médaillé d'or au Japon, et la judoka Inbar Lanir, championne du monde 2023 dans sa catégorie. "Ce n'est un secret pour personne, ces Jeux olympiques sont un peu plus difficiles pour nous tous, mais nous avons pleinement confiance dans l'organisation de la sécurité", a déclaré, citée par l'AFP, la présidente du Comité olympique israélien, Yaël Arad, avant le départ depuis l'aéroport Ben-Gourion.

Des sportifs israéliens suivis à la trace

Selon une source diplomatique israélienne, la délégation loge bien dans le village olympique de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis) comme la majorité des équipes. La protection des athlètes israéliens est co-assurée par des membres des services de sécurité de leur pays, qui ont fait le déplacement. Ces derniers seront notamment présents (et armés) sur le bateau de leur délégation lors de la cérémonie d'ouverture, a appris franceinfo de source policière.

Comme l'a expliqué Miki Zohar, ministre de la Culture et des Sports israélien, dans les colonnes du quotidien britannique The Telegraph, les autorités israéliennes ont doublé le budget d'ordinaire consacré à la sécurité de la délégation olympique. Sans avoir chacun leur propre garde du corps, les athlètes seront suivis à la trace par les services du renseignement israélien, le Shin Bet, ajoute-t-il.

"Nous faisons de notre mieux pour que les athlètes se sentent libres, mais aussi en sécurité et qu'ils n'aient pas peur. Nous ne voulons pas qu'ils remarquent trop les gardes."

Miki Zohar, ministre de la Culture et des Sports israélien

au "Telegraph"

Selon les informations de France Télévisions, chaque sportif israélien sera géolocalisé en temps réel. "Un brief est organisé tous les jours avec les équipes de protection des Israéliens et on se coordonne selon les épreuves, les déplacements, les impératifs, le calendrier", explique à franceinfo une source sécuritaire française. Les forces de l'ordre dorment dans le même bâtiment que la délégation, afin de pouvoir assurer sa protection 24h sur 24. Du côté du GIGN, ce sont les hommes de la Force sécurité protection qui seront à la manœuvre, a appris franceinfo de même source. Formés notamment à la protection des ambassadeurs dans les pays en crise, ils ont déjà sécurisé des équipes sportives, lors de l'Euro 2016 et la Coupe du monde de rugby 2023.

Ne pas oublier la compétition ni le sport

La délégation israélienne n'est bien sûr pas la seule à bénéficier d'une protection rapprochée pendant ces Jeux. Mais elle fait l'objet d'un dispositif à part, plus conséquent. Comme l'a précisé le ministère de l'Intérieur à franceinfo, le nombre de membres des forces de l'ordre engagés pour les Jeux – 35 000 chaque jour – permet "des ajustements" en temps réel, selon l'évolution de la situation, pour certaines autres "délégations sensibles", comme les Etats-Unis, l'Iran ou l'Ukraine.

A l'instar d'Israël, les Américains viennent sur place avec leurs propres services de sécurité, qui travaillent de concert avec les autorités françaises. "Les services de renseignement sont en veille active pour échanger des informations et adapter les dispositifs de sécurité en fonction des circonstances", explique à franceinfo Thierry Clair, secrétaire général du syndicat Unsa police.

"Le but, c'est de permettre aux athlètes de rester concentrés sur le sport tout en assurant leur sécurité."

Une source diplomatique israélienne

à franceinfo

Les athlètes israéliens ont été préparés à une compétition difficile, avec de possibles insultes et huées. "Moi, je n'entends pas ce qui se passe autour. J'écoute mes coachs, ce que j'ai dans ma tête. Le public peut bien crier sur moi, je fais de mon mieux avec tout mon cœur", a confié à France Télévisions Raz Hershko, championne de judo. Avant de décoller pour Paris, sa collègue Inbar Lanir est allée dans le même sens lors d'une conférence de presse, a rapporté l'AFP : "Mon rôle est de communiquer avec les gens par le sport. Je me sens en sécurité et je suis ravie de représenter mon pays." "Les athlètes israéliens sont les bienvenus" et "doivent pouvoir concourir sous leurs couleurs", a de son côté déclaré Emmanuel Macron, mardi, sur France 2 et franceinfo.

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