JO 2022 : "Stratosphérique" pour les uns, "hallucinant" pour les autres... Quentin Fillon Maillet, le "mort de faim" devenu légende à Pékin
Grâce à sa victoire sur la poursuite, dimanche, le Jurassien a remporté sa quatrième médaille. Il est le premier Français à réaliser cette performance sur une seule édition des JO d'hiver. De quoi bluffer Martin Fourcade et tout le clan tricolore.
Henri Oreiller, Jean-Claude Killy, Martin Fourcade et Anaïs Bescond doivent s'incliner. En remportant la poursuite à Zhangjiakou, dimanche 13 février, Quentin Fillon Maillet s'est élevé au-dessus des autres en devenant le Français le plus médaillé sur une seule édition des Jeux olympiques d'hiver grâce à ses quatre médailles.
"T'es le fucking boss", a asséné le jeune Eric Perrot (20 ans) à son coéquipier lorsque ce dernier a franchi la ligne d'arrivée en vainqueur, devant une vingtaine de Français réunis pour l'histoire. "Ça va bien au-delà de tous mes rêves, c'est juste incroyable, glissait Quentin Fillon Maillet en conférence de presse après la course. J'avais envie de marquer l'histoire du biathlon, c'est ce qui m'anime et m'a animé jusqu'à présent."
Depuis le début de la quinzaine olympique, le Jurassien marche sur l'eau avec quatre médailles et surtout deux titres olympiques (individuel et poursuite). "En 2014, j'étais libéré parce que j'avais atteint mon objectif, mais Quentin est beaucoup plus serein et cool. Il est dans une innocence, une simplicité de l'instant", explique Martin Fourcade, qui avait récolté trois médailles à Sotchi, renouvelant cette performance quatre ans plus tard. A Zhangjiakou, le Franc-Comtois est comme chez lui, répondant aux prédictions de la légende norvégienne Ole Einar Bjoerndalen (13 médailles olympiques) qui, avant le début des épreuves, avait vu en lui le futur "roi de ces Jeux".
"Il ne lâchera rien, même s'il faut ramper"
Le premier sacre olympique de sa carrière, acquis mardi sur l'individuel, aurait pu lui faire subir un contrecoup, notamment lié à la décompression et à la fatigue accumulée par les nombreuses sollicitations. Ce serait mal connaître le personnage. "Il ne relâche jamais. Il arrive à garder cet état de forme et il ne lâchera rien jusqu'à la fin des Jeux, même s'il faut ramper", rigolait Stéphane Bouthiaux, le directeur des équipes de France, après sa médaille d'argent sur le sprint, samedi.
La neige, tombée toute la journée dimanche, avait rendu la piste encore plus lente, plus exigeante donc. Les écarts se creusent plus facilement et "les meilleurs sont encore meilleurs", comme l'expliquait, samedi, l'entraîneur des Bleus Vincent Vittoz. Avec le 10e temps de ski, "QFM" n'a certes pas été transcendant sur la neige. Mais il a su dompter mieux que personne le pas de tir dans des conditions dantesques. Alors que le vent était clément durant la poursuite féminine, il s'est soudainement levé, avec des rafales très fortes et irrégulières de la gauche vers la droite.
"Comment tu fais pour tirer à 20/20 dans ces conditions ?", lui a spontanément demandé le remplaçant Antonin Guigonnat, quelques secondes seulement après qu'il a passé la ligne d'arrivée. Avec l'Italien Lukas Hofer (4e), il est le seul à avoir réussi le 100% derrière la carabine. "Stratosphérique", selon Fabien Claude (16e), "hallucinant", pour Simon Desthieux (7e).
Alors, certes, la chance peut parfois s'inviter. "Johannes Boe n'en a vraiment pas eu sur son premier tir debout", rejoue Martin Fourcade. Arrivé en tête, le Norvégien a laissé deux balles en route à cause d'une grosse rafale de vent emportant la neige dans son sillage, souci dont Fillon Maillet a été épargné. Mais sa confiance en lui a beaucoup compté pour qu'il ne manque aucune cible, même lorsqu'il a perdu du temps sur le deuxième tir alors que son chargeur ne se retirait pas correctement. Une sérénité qui illustre le très grand biathlète qu'il est devenu.
"Quentin n'était pas forcément le meilleur"
Pourtant, le petit gars de Saint-Laurent-en-Grandvaux, dans le Jura, n'était pas spécialement le plus talentueux à ses débuts en Coupe du monde, pendant la saison 2013-2014. "Je ne l'ai jamais vu arriver à ce niveau, admet Martin Fourcade. Si on m'avait demandé s'il était capable de faire ça, j'aurais dit non." "Quentin n'était pas forcément le meilleur en juniors, ce n'était pas celui qui dominait tout", complète son coéquipier et camarade de chambrée au village olympique Simon Desthieux.
En revanche, Martin Fourcade avait rapidement "décelé ses qualités mentales de combativité et de teigneux". Au point de se voir surnomer "le morbac" au sein de l'équipe de France, comprendre "le mort de faim". Il décroche dès la saison suivante, 2014-2015, son premier podium individuel (une deuxième place) sur la mass start de Ruhpolding (Allemagne) avec (déjà) un 20/20 au tir.
Depuis toujours, Quentin Fillon Maillet "s'investit à 200% dans son sport", affirme Emilien Jacquelin. Méticuleux, presque à l'excès, sur chaque détail pouvant lui permettre d'atteindre ses objectifs. "Je ne crois pas au destin, c'est moi qui fais les choses, qui suis acteur, rectifie-t-il. C'est tellement d'investissement que c'est une vraie belle récompense."
Sa tête et son corps sont tournés en permanence vers le biathlon. Un exemple ? Lorsqu'il reçoit un SMS, c'est un bruit de balle touchant la cible qui fait office de sonnerie. Ce n'est pas assez ? Il conçoit lui-même sa carabine, récolte des feuilles de statistiques à l'entraînement ou profite de ses jours de repos pour faire du kayak. "On le chambre beaucoup avec ça", s'amuse Antonin Guigonnat. Mais tous ses coéquipiers saluent, ou plutôt admirent, l'éthique de travail de leur leader, âgé de 29 ans.
"C'est un exemple de travail, il bosse tout le temps. Il veut tellement toujours en faire plus que parfois on râle l'été."
Fabien Claude, coéquipier de Quentin Fillon Mailletà Franceinfo: sport
Les efforts ont fini par payer ces dernières années et encore plus cette saison, avec cinq victoires en Coupe du monde sur les 11 en carrière qu'il comptait avant le début des Jeux. "Il a appris des deux dernières saisons, confirme son entraîneur Vincent Vittoz. Son point faible était d'en faire trop, de trop en vouloir." La retraite de Martin Fourcade en 2020 et la méforme durant la saison de Johannes Boe lui ont permis de passer un cap. "J'avais jamais décelé ce profil dominateur, reprend Fourcade. Il l'a beaucoup réclamé pendant quatre ans, mais j'ai souvent trouvé qu'il mettait la parole avant les actes. Aujourd'hui, il met les actes avant la parole."
Deux occasions supplémentaires de rapporter des médailles
Déjà entré dans l'histoire, il pourrait poursuivre sa quête sur le relais hommes, mardi, et la mass start vendredi. Plusieurs records sont dans sa ligne de mire. Il co-détient actuellement le record de médailles sur une édition (quatre) pour un biathlète avec Ole Einar Bjoerndalen et Marte Olsbu Roeiseland. Il pourrait aussi rejoindre les Tricolores les plus titrés sur une édition des Jeux (été et hiver confondus), Roger Ducret (1924, escrime) et Julien Brulé (1920, tir à l'arc), détenteurs de cinq médailles. Ou encore rejoindre les six athlètes à avoir glané cinq médailles sur une édition des Jeux olympiques d'hiver toutes disciplines confondues.
"Je ne vais pas m'arrêter tant que ça marche, avoue-t-il avec une simplicité débordante. J'ai envie de continuer à écrire mon histoire et celle du biathlon français." Préparez déjà les qualificatifs pour décrire "QFM" en cas de nouvelle médaille.
À regarder
-
"C'est un honneur incroyable..." On a rencontré Maxence, pro du parkour et l'un des personnages mystères de la cérémonie d'ouverture de Paris 2024
-
La cantatrice Axelle Saint-Cirel entonne la Marseillaise pour clore la parade des athlètes
-
Les joueurs de l'équipe de rugby à 7 dansent leur choré au pied de l'Arc de Triomphe
-
Teddy Riner est ovationné par la foule lors de la Parade des Champions
-
La "Parade des champions" est officiellement lancée depuis les Champs-Élysées
-
Paris 2024 : revivez les 4 cérémonies en 4 minutes
-
Qui est GЯEG qui a performé à la cérémonie de clôture des Jeux paralympiques ?
-
Paris 2024 : Revivez les plus beaux moments de la cérémonie de clôture des Jeux paralympiques
-
Jean-Michel Jarre enflamme le Stade de France
-
Jeux paralympiques : les exploits et des sourires en or pour les athlètes français
-
Il est temps de dire au revoir à la flamme
-
Huit danseurs de breaking valides et handicapés font le show
-
Les porte-drapeaux français pour la cérémonie de clôture des Jeux paralympiques
-
"La Marseillaise" interprétée par le trompettiste André Feydy
-
Santa ouvre la cérémonie de clôture des Jeux paralympiques
-
Paris 2024 : historique, l'équipe de France de cécifoot championne paralympique
-
Prothèses, fauteuils roulants : comment s'équipent les athlètes pendant les Jeux paralympiques ?
-
Ces Jeunes archers du Nord découvrent le para tir à l'arc et ses champions
-
Paris 2024 : "Durant ces Jeux, on a montré que l'on pouvait faire rimer les notions de handicap et de performance..." Le bilan tout sourire de Marie-Amélie Le Fur, patronne du comité paralympique
-
Paris 2024 : il réconforte les athlètes, sensibilise les officiels au handicap... Marc ne fait pas que conduire en tant que chauffeur volontaire sur les Jeux
-
À 23 ans, il va mixer pour la cérémonie de clôture des Jeux paralympiques !
-
La para-escalade fera son entrée aux Jeux de 2028 : une innovation française permet aux personnes en fauteuil de grimper comme tout le monde
-
Paris 2024 : Aurélie Aubert, chouchou du public et nouvelle star du sport para
-
Qui est Frédéric Villeroux, légende du cécifoot ?
-
Immersion avec des collégiens invités aux Jeux paralympiques
-
Paris 2024 : l'équipe de France de cécifoot est en finale paralympique
-
Paris 2024 : nouveau doublé français en para cyclisme
-
Qui est Axel Bourlon, champion de para haltérophilie ?
-
Paris 2024 : qui est Gabriel Dos Santos Araujo, star de la para natation ?
-
Paris 2024 : des tablettes et des casques VR pour les personnes malvoyantes
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.