Tour de France 2023 : supersonique sur le contre-la-montre, Jonas Vingegaard crée un écart inattendu qui va forcer Tadej Pogacar à se montrer offensif
"Quoi ? Déjà une minute d’écart ? Vraiment une minute ? Je ne m’attendais vraiment pas à ça." Interrogé sur la ligne d’arrivée à Combloux (Haute-Savoie) par Alberto Contador, le Britannique Tom Pidcock (Ineos-Grenadiers), qui n’avait pas suivi les départs de Tadej Pogacar et Jonas Vingegaard était interloqué en apprenant l’écart déjà créé par le Danois sur le Slovène au troisième point intermédiaire. Une différence qui s’est encore creusée dans les derniers kilomètres, puisque le maillot jaune s’est imposé avec une minute et trente-huit secondes d’avance sur le maillot blanc, lors du contre-la-montre, mardi 18 juillet. Relégué à une minute et quarante-huit secondes au général, Tadej Pogacar va devoir se montrer très offensif et très en jambes durant la troisième semaine s’il veut encore accrocher la première place du classement général à Paris.
"Personne ne s’attendait à un tel écart", résume Marc Madiot, manager de la Groupama-FDJ, qui a suivi la fin de l’étape au milieu des journalistes, sur les télévisions installées à proximité de la ligne d’arrivée, confirmant les impressions recueillies aussi bien auprès du clan de Jonas Vingegaard que de celui de Tadej Pogacar. "Bravo à Jonas Vingegaard, car il a fait quelque chose d’extraordinaire", reconnaît Mauro Gianetti, le manager de l’équipe UAE-Team Emirates. "Avec 1'38'' d’écart, on ne peut rien dire d’autre que de féliciter le vainqueur", concède, bon joueur, Matxin Fernandez, directeur sportif de l’équipe émiratie.
Jonas Vingegaard surpris par ses données de puissance
Et si cet écart était difficilement envisageable au départ de l’étape, la différence entre les deux coureurs s’est rapidement fait sentir. "Dès le début, quand Vingegaard avait quinze secondes d’avance au premier intermédiaire, on a vite compris que ça allait être vraiment difficile", avance Mauro Gianetti. "J’ai juste eu une journée formidable sur le vélo, je l’ai tout de suite senti quand je me suis lancé, explique le Danois. On voulait partir fort et essayer d’en garder un peu sous la pédale avant la montée finale, mais j’envoyais des watts très élevés même quand je devais m’économiser, et je pensais même que mon capteur de puissance ne fonctionnait pas correctement."
Observateur averti, Marc Madiot a rapidement compris que Tadej Pogacar n’était pas vraiment en jambes. "Il n’avait pas un coup de pédale aérien et fluide, pas la vivacité qu’on lui connaît d’habitude. Au contraire, je pense que Vingegaard a réalisé l’un des plus beaux chronos de sa vie, si ce n’est le plus beau", assure le manager de la Groupama-FDJ. "Durant la moitié du contre-la-montre, je ne me sentais pas dans les meilleures dispositions", confirme le Slovène.
Le changement de monture opéré par l’équipe UAE-Team Emirates pour Tadej Pogacar au pied de la côte de Domancy, pour troquer son vélo de chrono contre un vélo de route plus léger, n’y a rien changé. Mauro Gianetti espérait avant le départ que cette stratégie pourrait faire gagner jusqu’à cinq secondes à son leader, mais le mal était déjà fait à trois kilomètres de l’arrivée. "Pour moi c’était une bonne décision, je suis mieux installé sur le vélo de route, ça a peut-être fait une différence de quelques secondes pas plus. Je ne m’attendais pas à un tel écart, et je ne pouvais pas faire plus dans le final", reconnaît le maillot blanc. "Tadej met quand même une minute trente à Wout van Aert, donc ça veut dire qu’il a fait un bon chrono", tempère son manager.
Un Tour de France déjà scellé ?
Avec une minute et quarante-huit secondes de retard désormais au classement général, Tadej Pogacar va être contraint d’attaquer dans les étapes de montagne à venir, et dès mercredi, avec deux cols de première catégorie, un col de deuxième catégorie et un col hors-catégorie à gravir, entre Saint-Gervais Mont-Blanc et Courchevel. "On s’attend à des mouvements de Pogacar dans les prochains jours. Il ne s’arrêtera pas d’essayer tant qu’il ne sera pas dans le bus pour rentrer en Slovénie", sourit Richard Plugge, patron de l’équipe Jumbo-Visma, qui promet également des attaques de sa formation. "Si je m’appelle Vingegaard, je me cale dans la roue et j’attends que ça se passe. Pogacar va forcément essayer de bouger, mais il ne peut pas le faire de trop loin parce qu’à mon sens, la Jumbo est plus forte qu’UAE", analyse Marc Madiot.
"Le Tour n’est pas terminé", martèle-t-on du côté de l’équipe émiratie. "L’ADN de notre équipe, c’est de gagner, donc faire deuxième et troisième, ce n’est pas suffisant pour nous. Certes ça va être compliqué, mais on ne va pas baisser les bras jusqu’à Paris", assure Matxin Fernandez. "On va essayer, mais il faut rester réaliste", modère, moins enthousiaste, Mauro Gianetti.
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