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Il y a 20 ans, Roger Federer remportait son premier tournoi ATP : "Un tel enchaînement de titres était inconcevable" selon Julien Boutter

Le 4 février 2001, le jeune espoir Roger Federer remportait le premier de ses 103 titres en simple, contre le Français Julien Boutter, à Milan. Vingt ans plus tard, son ancien adversaire se souvient de la finale, entachée d’une erreur d’arbitrage, et durant laquelle le Suisse avait fait parler son talent et son caractère pour s’imposer.
Article rédigé par Hortense Leblanc
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 6min
Le 4 février 2001, Roger Federer (à droite) remportait son premier titre ATP contre Julien Boutter (à gauche). (KARL MATHIS / KEYSTONE)

Quand il entre sur le court pour disputer la finale du tournoi de Milan, le 4 février 2001, Roger Federer n’a que 19 ans, est classé 27e mondial, et reste sur deux échecs en finale, contre Marc Rosset à l’Open 13 de Marseille, et contre Thomas Enqvist à Bâle. Il est cette fois-ci opposé au Français Julien Boutter, de sept ans son aîné, et 67e mondial.

"Je l’avais déjà rencontré dix-huit mois plus tôt, quand il était classé autour de la 130e place mondiale, au tournoi Challenger de Grenoble. Et je l’avais battu (4-6, 6-2, 6-3), donc même si je savais qu’il avait progressé, c’était un style de jeu qui me plaisait, qui me convenait, donc j’avais complètement mes chances", nous raconte Boutter, qui disputait sa première finale.

"Pour lui, c’était un moment qui était bien plus critique que le mien. Il avait déjà perdu deux finales, il était attendu, il jouait un joueur qui était moins bien classé que lui, donc il avait certainement plus de pression que moi", ajoute-t-il.

Une fois les hymnes nationaux des deux finalistes joués, le match débute. Et le Français remarque vite la progression de Federer, sur son attitude, par rapport à leur dernière confrontation : "Quand il était au delà de la 100e place, il était très nerveux sur le terrain, il s’agaçait rapidement. Et c’est vrai qu’au début du match, je le breake assez tôt, et je fais l’erreur de me dire que je le fais douter un petit peu, qu’il va peut-être retomber dans ses travers. Puis je me fais tout de suite débreaker. Il avait déjà franchi un nouveau cap, en se frustrant moins, et en revenant plus vite dans le match".

Le Suisse remporte finalement le premier set, 6-4, et dispose d’une balle de match dans le deuxième set, manquée. Il perd ensuite le tie-break, et concède la manche à Julien Boutter, 6-7.

Une erreur d’arbitrage dans la troisième manche

Alors que débute le troisième set, l’arbitre de la rencontre commet une erreur : "J’avais commencé à servir dans le tie-break, donc normalement, ça aurait été au tour de Federer de servir le premier dans la troisième manche. Mais l’arbitre me demande de commencer. Je n’ai pas perdu à cause de cela, c’était même une chance de servir en premier, mais c’est vrai que, pendant le jeu, j’ai gambergé un peu, je me suis fait breaker, et ensuite j’ai couru après le score", raconte le Français. 6-4, 6-7, 6-4, jeu, set, match, et premier titre pour Roger Federer.

À l’issue de la rencontre, le jeune vainqueur déclare : "Je pense que je progresse, et j’ai atteint le premier objectif de ma carrière. Le prochain est d’entrer dans le top 15 mondial". Un but qu’il atteindra quelques mois plus tard, grâce aux points engrangés après un quart de finale à Roland-Garros.

Gagner autant de titres par la suite ? "C’était inconcevable"

À 19 ans, Roger Federer était déjà un grand espoir du tennis mondial. "Pour les spécialistes, c’était déjà le futur Sampras, de part son jeu, ses qualités d’attaquant, sa fluidité. Et surtout par rapport à Sampras, il faisait beaucoup plus de choses avec son revers, et était multi-surface, capable de déployer son jeu partout", explique Julien Boutter.

Mais même s’il avait perçu le potentiel du Suisse, l’actuel directeur du Moselle Open n’en reste pas moins surpris par la trajectoire prise pas son ancien adversaire : "A l’époque, Sampras était en fin de carrière, et on se demandait si un joueur serait capable de remporter autant de Grands Chelems, de battre ses records. C’était sûr que Federer arriverait dans les dix, dans les cinq meilleurs mondiaux, voire qu’il serait numéro un mondial, mais d’ici à imaginer cette longévité et cet enchaînement de titres, c’était inconcevable".

"Imagine, si j’avais gagné ce match, nos carrières auraient été inversées"

Les deux finalistes de Milan 2001 se sont depuis recroisés, Boutter plaisantant avec Federer : "Imagine, si j’avais gagné ce match, nos carrières auraient été inversées". Mais le Français reste surpris par l’ancien numéro un mondial, qui évoque d’abord sa défaite en Challenger, plutôt que sa victoire en Lombardie : "Il m’a dit que ça l’avait énervé, et il se souvenait du match de façon très précise". Le Suisse a tout de même revisionné son premier sacre :"Il y a deux-trois ans, nous nous sommes croisés à Bercy, avec Ljubicic, son entraîneur. C’était amusant, puisqu’ils m’ont dit que la veille au soir, ils avaient regardé notre finale à Milan", raconte-t-il.

Vingt ans se sont aujourd’hui écoulés depuis ce match, et le nom de Julien Boutter est désormais associé à Federer : "On ne se souvient pas de l’adversaire sur son deuxième titre. Donc c’est un moment qui me lie à lui, parce que j’ai été le premier". À la fin de la rencontre, le Suisse savourait son titre : "Pour la première fois je me rends compte comme il est gratifiant de quitter un tournoi dans la peau du vainqueur". Une sensation depuis renouvelée à 102 reprises en simple, dont 20 fois en tournoi du Grand Chelem.

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