Cet article date de plus d'un an.

Mondiaux de biathlon 2023 : pourquoi l'équipe de France féminine est-elle si forte cette saison ?

Depuis le début de la saison en Coupe du monde, les biathlètes françaises ont pris l'habitude de monter sur les podiums. Les championnats du monde, qui débutent mercredi, pourraient leur permettre d'asseoir encore un plus leur domination.
Article rédigé par Apolline Merle, franceinfo: sport
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 9min
L'équipe de France de biathlon, composée de Julia Simon, Lou Jeanmonnot, Chloé Chevalier et Anaïs Chevalier-Bouchet, a remporté le relais féminin, à Antholz-Anterselva (Italie), le 22 janvier 2023. (VINCENZO PINTO / AFP)

Pas un week-end sans podium. Voilà à quoi se sont habituées les biathlètes françaises cette année. Sur 20 courses, les Tricolores sont montées à 14 reprises sur la boîte, dont trois fois en compagnie de l'une de leurs compatriotes. Et sur ces 14 podiums, les Françaises ont pris la première place à six reprises : deux fois en poursuite et une fois en mass start pour Julia Simon, deux fois en relais féminin et une fois un relais mixte.

Le classement de la Coupe du monde est dominé par une Française, Julia Simon, avec 76 points d'avance sur sa dauphine et rivale suédoise, Elvira Oeberg. Un bilan plus que positif donc pour entamer les championnats du monde, qui débutent mercredi 8 février jusqu'au dimanche 19, à Oberhof (Allemagne). Groupe soudé, maturité bonifiée et changement de staff, franceinfo: sport revient sur les raisons d'une année sans fausses notes pour les Bleues.

Parce que le groupe a atteint une maturité

La saison 2022-2023 est celle de l'accomplissement pour les biathlètes les plus expérimentées du groupe, comme Anaïs Chevalier-Bouchet (29 ans), Chloé Chevalier (27 ans) ou Julia Simon (26 ans). "Les filles d'expérience comme Julia sont arrivées à maturité. Et derrière, il y a une émulation avec des jeunes athlètes, comme Lou Jeanmonnot ou Sophie Chauveau, qui sont arrivées sans retenue, avec de l'envie, et qui ont su tirer le bénéfice de cette préparation aux côtés des filles expérimentées. Aujourd'hui, elles arrivent elles aussi à une certaine maturité et expérience pour jouer devant", confirme Vincent Vittoz, entraîneur de l'équipe de France de biathlon.

Julia Simon a même franchi un cap supplémentaire en s'octroyant le dossard jaune de leader dès le début de saison, pour ne plus le lâcher. "J'ai la sensation de travailler avec une athlète qui tire le profit de toute cette expérience accumulée ces dernières années, analyse Cyril Burdet, responsable et entraîneur physique de l’équipe de France féminine de biathlon. Elle a beaucoup travaillé sur la régularité, qui était l'un de ses objectifs de travail." "Julia a vraiment passé un gros cap, enrichit l'ancienne biathlète et consultante L'Equipe, Marie Dorin. Elle avait déjà fait des podiums et gagné mais pas de manière régulière. Cette saison, elle porte le maillot jaune, elle assume totalement sa posture de leader et je dirai même qu'elle s'épanouit et se nourrit de cela."

A ses côtés, Anaïs Chevalier-Bouchet a déjà réalisé cinq podiums cette saison. Chloé Chevalier a elle savouré son premier podium en individuel en carrière le 19 janvier, en terminant deuxième du sprint d'Antholz-Anterselva (Italie). Lou Jeanmonnot, pour sa première saison en Coupe du monde, a elle déjà réalisé un podium en individuel et faisait partie des deux relais victorieux cette année. 

Parce que les victoires ont créé une émulation collective

Le dossard jaune porté par Julia Simon est un moteur pour elle et toute l'équipe. "En tant que spectateur, poursuit Marie Dorin, on a l'impression que ses performances ont récrée un groupe d'âmes, une grande dynamique chez les Françaises, avec beaucoup d'émulation positive, de fierté d'appartenir à ce groupe." Un constat partagé par Vincent Vittoz. "Quand on sait qu'on s'entraîne aux côtés de la numéro 1 mondiale ou d'une médaillée olympique, c'est forcément la bonne référence et un excellent guide. C'est un atout pour un collectif", appuie-t-il.

Pourtant, pour les biathlètes elles-mêmes, Julia Simon n'est pas le seul moteur du groupe. "On se tire toutes les unes et les autres vers le haut", témoigne Lou Jeanmonnot. Même son de cloche de la part de la principale intéressée. "Je ne me vois pas comme cela, confie la leader de la Coupe du monde. Ce dossard jaune tire tout le monde, donne du crédit à l'équipe, et nous conforte dans ce qu'on a mis en place, mais il montre aussi que toutes les autres filles peuvent y prétendre."

Parce qu'il y a une concurrence positive

Cette émulation positive permet ainsi aux biathlètes françaises de se défier en interne. Un challenge au sein du groupe qui reste toujours bienveillant, mais particulièrement efficace. "Cela fait très longtemps que l'on n'a pas eu une équipe aussi dense, avec des jeunes qui se sont mises au niveau rapidement, ce qui n'était peut-être pas le cas avant. C'est vrai que je ne m'attendais pas à ce que les sélections soient aussi disputées pour les relais", reconnaît Anaïs Chevalier-Bouchet. "Les places sont chères, confirme Cyril Burdet. Cela crée une émulation très positive car tout le monde veut en être, et cela passe par constamment hausser son niveau. Les filles ont compris qu'aider leurs coéquipières et adversaires à être meilleures, c'est aussi se tirer vers le haut et se donner les moyens de progresser."

"Aucune ne veut être la 5e, hors du relais. Cela donne une bonne dynamique, avec des objectifs très élevés pour toutes."

Julia Simon, biathlète, leader de la coupe du monde

à franceinfo: sport

Cette émulation est aussi bénéfique pour Julia Simon, dont les espoirs tricolores ne reposent pas uniquement sur elle. "Elle a des coéquipières qui tiennent vraiment la route en terminant régulièrement top 10 ou aux fleurs (les six premiers) et qui sont capables de faire aussi des podiums quand elle n'en fait pas. Quand on est leader, cela soulage de savoir qu'on est pas la seule à porter l'équipe", ajoute Marie Dorin. 

Parce que l'arrivée de Cyril Burdet a apporté cette force du collectif

Les bons résultats chez les biathlètes françaises trouvent aussi leur origine dans le staff, légèrement renouvelé cette saison. Ancien coach du groupe sprint masculin de ski de fond, Cyril Burdet a remplacé en avril dernier Frédéric Jean en tant que responsable et entraîneur physique du groupe Coupe du monde féminin de l’équipe de France de biathlon. "Cyril a été un gros plus dans leur préparation car elles ont toutes beaucoup progressé sur leur niveau physique, notamment sur leur puissance à ski", note Marie Dorin.

Une nouvelle approche qui a notamment été bénéfique à Lou Jeamonnot. "J'étais suivie depuis six ans par le même entraîneur, et je pense que j'étais arrivée au bout de ce qu'il pouvait m'apporter. Ce changement m'a donné un coup de fraîcheur, un nouvel œil sur ma technique, et je pense avoir plus évolué cette année que les années précédentes", confirme la native de Pontarlier (Doubs).

Mais surtout, le vrai plus de Cyril Burdet a été sa capacité à unir un collectif. "On a toujours entendu dire qu'il cherchait à souder un groupe, à faire en sorte que les gens se rassemblent, pas forcément de manière amicale mais autour d'objectifs communs, remarque Marie Dorin. Et je trouvais justement que c'est ce qui manquait ces dernières années chez les dames, qu'il n'y avait aucun liant dans cette équipe." Au sein du groupe, son apport est salué par toutes. 

"L'arrivée de Cyril a apporté quelque chose qui manquait peut-être au groupe. Il a réussi à créer une émulation."

Anaïs Chevalier-Bouchet, biathlète française

à franceinfo: sport

"Avec Cyril, on est resté sur la même base, avec de petits ajustements. Mais ce qui a pas mal évolué, c'est qu'il a individualisé les entraînements et la manière de nous parler. Il s'est s'adapté à chacune d'entre nous, à nos points forts et faibles, et nous a apporté de la sérénité et un travail de confiance", confie Julia Simon. 

Une interprétation jugée exacte par l'intéressé lui-même ? "Difficile de se juger là-dessus", glisse-t-il. "L'aspect collectif est très important pour moi. Je suis convaincu que dans un sport individuel comme le biathlon ou le ski de fond, la force du collectif permet à chaque individu de s'exprimer un cran au-dessus. C'est un peu ce qu'il se passe actuellement. Il n'y a aucune fille qui peut s'endormir sur ses lauriers ou rester dans sa zone de confort. Car, à chaque course, tout est remis en question."

Dans la suite logique du circuit de la Coupe du monde, les Bleues auront à cœur de conserver cette même dynamique lors des Mondiaux, et pourquoi pas marquer l'histoire. Jamais l'équipe de France féminine n'a remporté le titre mondial en relais. Avec deux victoires sur quatre relais en Coupe du monde cette saison, les Françaises ont prouvé que cet objectif était dans leurs cordes. Elles n'ont plus qu'à le concrétiser en Allemagne. 

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.