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Tournoi des six nations : "Gagner un Grand Chelem demeure exceptionnel", saluent les anciennes gloires du XV de France

Samedi, les joueurs de Fabien Galthié ont remporté le dixième Grand Chelem de l’histoire du XV de France.   

Article rédigé par Justine Saint-Sevin, franceinfo: sport
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
Le capitaine des Bleus, Antoine Dupont, célèbre avec le trophée du Tournoi des six nations, le 19 mars 2022. (FRANCK FIFE / AFP)

Entre souvenirs, fierté et promesses. Samedi soir, en dominant l'Angleterre (25-13) lors de l'ultime journée du Tournoi des six nations, samedi 19 mars, les Bleus de Fabien Galthié ont décroché le titre dans un stade de France incandescent. Invaincus, ils se sont surtout emparés d'un Grand Chelem que les Tricolores attendaient depuis 2010, plongeant le monde de l'ovalie française dans un délicieux mélange d'enthousiasme et de soulagement. Des sentiments partagés par les supporters comme par les anciennes gloires françaises qui avaient réussi cet exploit auparavant. Trois d'entre elles, Erik Bonneval, Olivier Magne, Xavier Garbajosa, ainsi que Raphaël Ibanez (actuel manager général des Bleus) sont revenues pour franceinfo: sport sur cet exploit et ce qu'il représente pour un joueur.  

Les larmes de joie d'Antoine Dupont et sa longue étreinte avec ses compères de club, Cyril Baille, puis Julien Marchand ou encore l'émotion contenue d'un Cameron Woki, presque hagard, cherchant difficilement ses mots pour décrire au mieux l'exploit, sont autant de scènes qui permettaient, déjà samedi soir, de mesurer en partie la grandeur du moment. "C'est quelque chose d'à part", confirme Erik Bonneval, trois-quarts centre et meilleur marqueur du Grand Chelem de 1987, remporté aux côtés de Pierre Berbizier et Philippe Sella. "Il reste gravé à vie. C'est un grand moment de joie, de fierté, un peu comme un titre en club, appuie Xavier Garbajosa, trois-quarts polyvalent du XV de France et vainqueur du Grand Chelem 2002. Autant en club, on passe beaucoup de temps ensemble, autant en équipe nationale, avoir la chance de remporter un titre majeur ça reste rare et des souvenirs impérissables."   

"C'est l'aboutissement de quelque chose. Au-delà de gagner un Tournoi sans aucune défaite, il y a une forme de pression, de performance, qui est importante et qu'il faut savoir gérer. Gagner un Tournoi ça arrive, un Grand Chelem ça reste exceptionnel."

Xavier Garbajosa, trois quart polyvalent des Bleus (1998-2003)

à franceinfo : sport

Au cas où vous en doutiez encore, un Grand Chelem n'est pas anecdotique, loin de là. Avec la Coupe du monde, il fait partie des deux titres majeurs dont rêvent les joueurs européens et ce depuis des décennies. "Pour notre génération (1987), c'était seulement le quatrième Grand Chelem français, quelque chose d'encore assez rare. Gagner un Tournoi, ça n'avait pas vraiment de valeur, je crois qu'on l'avait gagné en 86, on n'en faisait pas tout un truc. Le challenge, c'était de battre tout le monde. Ça, c'était historique", avance Erik Bonneval. "L'objectif, c'était le Grand Chelem, plus tard dans les années 2000, les nations ont basculé sur le gain du Tournoi", abonde Olivier Magne, troisième ligne aile qui a vécu quatre Grand Chelem (1997,1998, 2002, 2004). Un changement d'approche dû "à l'augmentation du niveau global des équipes" pour Xavier Garbajosa et Olivier Magne.

"Faire le Grand Chelem, c'est une étape cruciale dans le parcours d'un joueur, ce sont des moments qui marquent à vie et renforcent profondément les liens. L'exemple le plus révélateur, c'est qu'avec les vainqueurs du Grand Chelem 2002, ça remonte à 20 ans, on s'est réuni la veille de ce France-Angleterre pour se retrouver."

Raphaël Ibanez, manager général des Bleus et joueur (1996-2007)  

à franceinfo : sport

Si au fil des ans, l'exploit est devenu plus rare et d'autant plus précieux, une chose n'a pas changé : un Grand Chelem est un marqueur important dans la construction d'une équipe. "Ce sont des moments rares qui restent avec vous dans le futur et resserrent les liens dans le présent", confirme Olivier Magne. "En 87, on venait de battre les Blacks, la Coupe du monde arrivait, il y avait un mélange de jeunes et d'anciens, c'était le début d'une génération. Derrière, on fait finale de Coupe du monde. Il y a un petit parallèle avec cette équipe", poursuit Erik Bonneval. "Quand on gagne, on renforce les liens. C'est l'aboutissement d'un fonctionnement parfait dans un groupe d'un point de vue humain : partage, sacrifice, solidarité. Et on le voit sur le terrain. Jusqu'alors, cette équipe n'était pas titrée, mais elle nous enthousiasme, elle nous fait écarquiller les yeux, on reprend du plaisir à la suivre. Valider ces impressions par un titre, c'était capital", ajoute Xavier Garbajosa.  

"Réussir à tordre tout le monde, c'est très compliqué, mais ça te donne une confiance énorme pour aborder les matchs à l'avenir. Et ça joue moralement sur tes adversaires. Il faut que tout soit aligné. Là il y a le jeu, les coachs, le bon fonctionnement entre les clubs et la fédération. Après ce n'est pas une fin en soi, ce n'est que le début."

Erik Bonneval, trois quart des Bleus (1984-1988)

à franceinfo : sport

Pour le rugby français, anciennes gloires comme supporters, ce Grand Chelem revêt une saveur bien particulière. La cuvée 2022 est d'autant plus importante qu'elle met fin à une disette longue de douze ans sans titre. Les Bleus d'Antoine Dupont ont surtout renoué avec leur public qui attendait la moindre étincelle pour s'enflammer. C'est d'ailleurs cette communion incroyable que retient Xavier Garbajosa, présent au stade de France samedi soir. "Un plaisir immense de voir tous ces supporters en ébullition, contents, fiers, émus. Ça fait longtemps qu'on n'a pas vu une équipe de France performante. Depuis une dizaine d'années, on se cherche un petit peu. Elle est intéressante, elle progresse et elle est portée par des jeunes avec des valeurs qui les rendent profondément attachants."   

Devant une telle réussite, difficile de ne pas se laisser prendre à rêver. Le Mondial 2023, en France, est dans toutes les têtes. "Ils m'ont donné la banane comme à beaucoup. J'en connais certains qui ont joué avec mes fils, notamment les Toulousains, je suis d'autant plus heureux pour eux. Ils ont beaucoup donné aux entraînements, sur le terrain depuis des années. Surtout, ils étaient attendus et ils ont répondu présents. Il y aura un autre Tournoi, puis la Coupe du monde. On a juste envie de voir la suite", conclut Erik Bonneval.

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