Top 14 : de la fusion en Pro D2 à sa première finale, Bordeaux-Bègles au pied du Brennus, 17 ans après l'union
Combien pèse l'histoire ? Opposée au centenaire Stade toulousain, qui n'a plus perdu une finale depuis 2008 (neuf victoires), la très jeune Union Bordeaux-Bègles (UBB) rêve de renverser l'ogre pour s'offrir un tout premier trophée, vendredi 28 juin (21 heures sur France 2 et france.tv) au stade Vélodrome (Marseille). Si le Stade bordelais (SBUC) comptait sept titres de champion de France (entre 1899 et 1911) et le Club athlétique béglais (CAB) deux (en 1969 et 1991), le club qui est né de leur fusion a dû construire sa propre histoire.
L'UBB peut désormais titulariser une ligne d'arrières composée à 100 % de joueurs côtoyant le XV de France, avec Maxime Lucu, Matthieu Jalibert, Yoram Moefana, Nicolas Depoortere, Louis Bielle-Biarrey, Damian Penaud et Romain Buros. Un luxe qu'elle peut s'offrir après près de deux décennies d'une méthodique ascension, presque sans accroc malgré le scepticisme qu'a longtemps suscité le projet du club.
2006 : l'union de deux clubs rivaux
L'Union Bordeaux-Bègles est l'histoire d'un mariage de raison qui a fondé une famille heureuse. Œuvre des dirigeants politiques des deux villes et des sportifs de part et d'autre, la fusion était une réponse pragmatique à la difficulté de convaincre les partenaires locaux et les investisseurs en l'absence d'hégémonie régionale. En 2006, les deux clubs stagnaient depuis plusieurs saisons entre la Fédérale 1 (troisième division) et la Pro D2 (deuxième division).
"La rivalité est ancestrale mais la réalité économique inéluctable, se remémorait Alphonse Miralles, coordinateur sportif de l'UBB et figure emblématique du Club athlétique béglais, au site actu.fr en 2016, à l'occasion des dix ans de l'Union. Lorsque les bans sont publiés, c’est une 'guéguerre' terrible qui va durer plusieurs semaines. Certains se sont sentis trahis et les deux premières années seront compliquées de ce point de vue..."
2007 : arrivée du président Laurent Marti, garant de l'identité bordelo-béglaise
Illustration de la difficulté à concilier les deux cultures, le club prend le nom alambiqué d'Union Stade bordelais-CA Bordeaux Bègles (USBCABBG) et alterne entre les enceintes de ses deux clubs parents pour les matchs à domicile. Ce n'est qu'à l'arrivée de Laurent Marti au poste de président, un an plus tard, que le club tranche et embrasse son identité plurielle : il adopte son nom actuel et s'installe durablement au Stade André-Moga de Bègles.
Même si elle s'arrange toujours pour contenter les deux camps d'un club encore composite, l'Union est entérinée et les résultats, en progression entre 2007 et 2010, suivent rapidement. "Fonfon" Miralles y voit le début de l'histoire bordelo-béglaise : "En fait, cette 'guéguerre' va durer jusqu’au jour où le grand public va comprendre que cette équipe peut monter dans la hiérarchie, qu’elle a un avenir avec les grands du rugby hexagonal. Le club va en effet très vite changer de dimension avec Laurent Marti et personne ne peut nier l’évidence." Celle d'un club bien structuré, à l'ambition sportive en accord avec ses moyens financiers en croissance constante.
2011 : la montée en Top 14 récompense une philosophie offensive
Pourtant qualifiée de justesse pour les barrages d'accession au Top 14, à la 5e place, l'Union Bordeaux-Bègles s'offre les favoris Grenoble et Albi pour s'inviter pour la première fois dans l'élite du rugby français. Le jeu offensif prôné (24 points inscrits en moyenne par match, 2e du championnat) plaît au public et porte ses fruits.
A l'aube de leur première saison en Top 14, les Bordelo-béglais voient déjà pointer l'opportunité de s'installer parmi les géants du rugby français : "La culture, les racines, la passion, le potentiel, tous les ingrédients sont présents", assurait l'entraîneur de l'époque, Marc Delpoux, aux organisateurs de la Nuit du Rugby 2010-2011, où il était mis à l'honneur avec ses adjoints parmi les "Meilleurs staffs de la saison". "A nous de prouver sur le terrain qu’un grand club à Bordeaux, c’est une évidence", présageait-il.
2015 : installation au Stade Chaban-Delmas
Quand les Girondins de Bordeaux quittent leur enceinte, l'Union Bordeaux-Bègles l'adopte immédiatement, le Stade André-Moga de Bègles étant devenu trop étroit. Le public suit sans tarder, et les Unionistes bénéficient dès la première année de la meilleure affluence d'Europe, qui les porte vers leur première qualification en Champions Cup. Depuis dix années consécutives désormais, l'UBB joue devant le public le plus nombreux du championnat de France.
"Ce public nous porte sportivement depuis des années, mais aussi économiquement, confiait le président Laurent Marti à L'Equipe le 14 juin dernier. Il me donne la motivation de continuer à me battre pour le club. Se rendre au stade, c'est le plaisir de la semaine, la récompense pour tout le monde : les joueurs, le staff, les dirigeants, les supporters, les bénévoles. C'est un moment de partage."
2021 : premières phases finales de Top 14 et défaites contre Toulouse
Pour la première finale de son histoire cette année, l'Union Bordeaux-Bègles retrouve le légendaire Stade toulousain, qui entend s'offrir un troisième doublé Top 14-Coupe d'Europe après son triomphe contre les Irlandais du Leinster le mois dernier. En 2021, les Rouge et Noir avaient justement écarté les Bordelo-béglais sur la route de chacun de leurs sacres, en demi-finales à chaque fois.
Depuis, Christophe Urios a cédé sa place sur le banc unioniste à Yannick Bru, ancien de la maison toulousaine, et l'UBB s'est renforcée. Pas moins de quatre recrues de l'intersaison figuraient parmi les titulaires lors de la demi-finale remportée contre le Stade français (22-20) : Carlü Sadie, Adam Coleman, Tevita Tatafu et le feu follet des Bleus, Damian Penaud. De quoi "marquer l'histoire de l'UBB", objectif affiché par le talonneur Maxime Lamothe, girondin de naissance et enfant du club, en conférence de presse avant la finale.
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