Top 14 : les transferts dans le rugby sont "à des années-lumière du football"
Avant la reprise du Top 14, l’économiste du sport, Christophe Lepetit, insiste sur les contrastes économiques entre le monde de l'ovalie et le football. Un transfert record dans le rugby, "c'est 200 fois moins que celui de Neymar", a-t-il souligné.
Alors que des transferts atteignent des records dans le football, l’économiste du sport Christophe Lepetit, responsable des études économiques au Centre de droit et d’économie du sport de Limoges, rappelle, samedi 26 août, en marge de la reprise du Top 14, que le rugby est encore très loin de ces montants. Malgré une augmentation récente des prix des joueurs, une transaction record dans le rugby est "200 fois" moins élevée que celui de Neymar et le salaire moyen d’un joueur de rugby est de "30 000 euros" inférieur à celui d’un footballeur de Ligue 1, souligne-t-il.
franceinfo : Est-ce qu’il existe des transferts dans le rugby ?
Christophe Lepetit : Les transferts payants entre clubs de rugby restent encore une exception. Ceux qui se réalisent aujourd’hui dans le rugby français ou international se font le plus souvent sans indemnité de transfert. Quand ils sont payants, on est à des années-lumière du football. Un transfert record dans le rugby se situe entre 500 000 et 1 000 000 d’euros, c’est 200 fois moins que celui de Neymar au PSG.
Quel est le salaire moyen pour un joueur de rugby en France ?
Dans le Top 14, le salaire moyen est aux alentours de 16 000 euros brut par mois. On est très loin là aussi de ce qui s’observe en Ligue 1 puisqu’on est à 46 000 euros brut en moyenne, donc à peu près 30 000 euros de différence entre un footballeur et un rugbyman. Les clubs du Top 14 recrutent de plus en plus de stars venues de l’hémisphère sud comme le Néo-Zélandais Dan Carter.
Est-ce qu’il y a une influence du football dans le rugby ?
L’économie générée n’est pas du tout la même entre les deux sports. L’économie du rugby est en train de se développer avec des droits télévisuels qui augmentent de plus en plus et avec le sponsoring qui continue aussi à jouer son rôle. Dans le Top 14, on a des joueurs français internationaux et les grandes vedettes de l’hémisphère sud qui perçoivent aujourd’hui des salaires qui sont très loin d’être ridicules qui peuvent aller de 500 000 à un million d’euros annuel.
Justement, quels sont les sources de revenus des clubs de rugby ?
L’économie des clubs reposent avant tout sur le sponsoring. Il rapporte 145 millions d’euros annuel au total pour le Top 14 ce qui fait environ 10 millions par club, soit la moitié du budget. Quant au merchandising, il repose essentiellement sur les ventes de maillot qui ne sont pas très développées.
Certains joueurs interviennent aussi pour des conférences dans des entreprises...
Les clubs de rugby doivent souvent des prestations aux entreprises qui les sponsorisent. Parmi ces prestations, les sponsors aiment beaucoup obtenir la venue de certains joueurs de rugby. Ils viennent parler des valeurs du rugby comme le combat et le courage. Ça permet aux clubs de se financer et à des joueurs de compléter leurs revenus. Certains rugbymen célèbres montent des sociétés pour vendre ce type de prestation à des entreprises.
On voit apparaître des grandes fortunes dans le monde du rugby, comme Mohed Altrad à Montpellier, 36e fortune de France.
On a une transition dans la propriété des clubs de rugby. Auparavant, les clubs étaient détenus par des propriétaires historiques, des sponsors locaux. Aujourd’hui, on a de plus en plus de grandes fortunes françaises et internationales qui arrivent à la tête des clubs. C’est le cas de Mohed Altrad, de Jacky Lorenzetti et aussi de Mourad Boudjellal. On est actuellement dans la cohabitation de deux modèles : les clubs historiques et les clubs avec de nouveaux propriétaires qui sont à la fois mécène et sponsors, ce qui génère des tensions et des frictions dans l’ovalie.
Outre l’affaire du sponsoring de la FFR, certains reprochent aussi à Mohed Altrad des salaires déconnectés de la réalité sportive.
On a des clubs qui versent aujourd’hui des salaires très conséquents à des joueurs pour les attirer chez eux. Quand ce sont des stars, peu de monde s’en offusque. Par contre, lorsqu'on touche à des joueurs moins confirmés qui ont le statut de Jiff [les joueurs issus de la formation française qui sont des profils recherchés car chaque club doit en avoir un certain nombre dans son effectif sous peine de sanction], il y a un risque de déstabiliser le marché. En effet, quand vous offrez des salaires assez élevés à des jeunes joueurs qui n’ont pas forcément confirmé leur talent, ça peut tirer les prix de ces joueurs vers le haut de manière artificielle.
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