Six nations 2024 : une créativité en berne, la réaction de Fickou et de Bielle-Biarrey... Ce que l'on a aimé et pas aimé dans la victoire des Bleus en Ecosse
La chenille ne s'est donc pas transformée en papillon. Après son non-match à Marseille il y a une semaine contre l'Irlande, le XV de France a de nouveau rétropédalé, samedi 10 février, en Ecosse mais il a quand même su donner le coup de reins pour s'imposer (16-20) et ainsi éviter une troisième défaite de rang sous l'ère Galthié, ce qui aurait constitué une fâcheuse première.
Evidemment, la fin de match et la décision de ne pas accorder l'essai de la victoire au XV du Chardon risquent de piquer longtemps les Ecossais. Du côté français, en revanche, elle sonne comme un immense soulagement. Même si elle n'effacera pas tous les doutes, loin de là. "On ne s'est pas transformés en deux mois" avait pourtant tenté de rassurer le capitaine Gregory Alldritt avant ce match. Il faut croire que, même s'ils s'en défendent pour la plupart, l'élimination en quarts de finale de la Coupe du monde a laissé plus de traces que les Bleus ne veulent bien l'admettre. Sinon, comment expliquer ce rugby poussif, craintif, tellement éloigné de celui qui faisait rêver l'Ovalie il y a encore quelques mois ?
On a aimé
Murrayfield, la magie opère toujours
On a beau le savoir, connaître la chanson à l'avance, ça marche à chaque fois. Dès les premières notes de cornemuse qui s'élèvent du toit de Murrayfield, c'est tout un frisson qui se propage dans les travées du stade, dans les faisceaux de la télé, dans chaque pore de la peau. Flowers of Scotland a ce pouvoir. Mais, à Edimbourg, on est fraternels et on laisse aussi le visiteur s'exprimer. Les nombreuses Marseillaises, lancées pleins poumons par les supporters tricolores, ont elles aussi fait vibrer les cœurs et les chœurs.
Le numéro de jongleur de Ben White
Le premier essai écossais est tout simplement une merveille d'exécution et d'adresse collective. Les intervalles sont parfaitement pris, les passes données au centième de seconde près, mais, pour rajouter une touche de génie à cette œuvre, il fallait bien cet exploit de Ben White. Sur la dernière transmission, le demi de mêlée, lancé plein fer, récupère la balle derrière son épaule, jongle pour lui-même et va aplatir derrière la ligne en glissant sur son élan. "Scottish Flair".
La révolte de Fickou, l'éclair de Bielle-Biarrey
Le salut des Bleus, finalement, est venu de l'ancien et du jeunot. Il était critiqué après une Coupe du monde assez terne pour ses standards et son match raté contre l'Irlande. Certains réclamaient même son remplacement par le prometteur Nicolas Depoortère au centre. Mais Gaël Fickou, comme souvent, a fait le dos rond et répondu sur le pré. S'il ne brille plus autant qu'avant par ses courses chaloupées, le joueur le plus capé du XV de France est toujours aussi précieux par sa lecture du jeu. Celle-là même qui l'a placé en sortie de regroupement pour aller inscrire l'essai qui a permis aux siens de recoller au score à la demi-heure de jeu (13-10).
Puis la jeunesse de Louis Bielle-Biarrey a pris la relève. Avec l'insouciance, et surtout, les cannes de ses 21 ans. Alors que ses coéquipiers étaient englués, l'ailier casqué a enclenché les réacteurs. A l'arrêt ou presque le long de ligne de touche, il a sorti de son chapeau un coup de pied en diagonale à suivre pour lui-même qui a fait passer ses trois défenseurs pour de simples plots de signalisation. Un coup de génie qui a rappelé à son sélectionneur, qui ne l'avait pas titularisé face à l'Irlande, que son jus était vital pour une équipe qui, parfois, semble desséchée.
On n'a pas aimé
Les balles perdues, le bâton pour se faire battre
A ce niveau de compétitivité, les "turnovers", c'est souvent "game over". Le fin crachin écossais n'a sans doute pas aidé, mais ce n'est pas comme si c'était une surprise de trouver un ballon glissant à Murrayfield au mois de février. Celui échappé par Jalibert, à la 7e minute, a offert sur un plateau d'argent la munition du premier essai écossais du match. Quelques touches non trouvées, des en avants totalement évitables : les Bleus ont souvent donné l'impression de jouer avec une savonnette. Ce qui explique en partie la douche écossaise.
L'indiscipline, nouveau mal récurrent ?
"La France va apporter du physique", avait prévenu le sélectionneur écossais Gregor Townsend avant la rencontre. Il avait vu juste à ce détail près que les Bleus ont souvent confondu agressivité maîtrisée et indiscipline contagieuse. Uini Atonio, auteur d'un plaquage haut à la 38e minute, a bien failli faire une "Willemse" mais il s'en est bien sorti avec un simple carton jaune. A l'image du pilier français, c'est tout l'édifice qui s'est montré brinquebalant, offrant, comme face à l'Irlande, trop de pénalités (neuf contre six à l'adversaire, dont sept dans la seule première période). L'Ecossais est avare, dit-on, mais pas au point de ne pas les convertir.
Sans ballon, difficile de marquer
Depuis la prise de fonction de Fabien Galthié, la France est passée maîtresse dans l'art de la dépossession. Or, ce principe exige une justesse et un réalisme que les Bleus ne possèdent plus. Pire, le système expose clairement ses failles quand les Tricolores se retrouvent menés au score et sans solution. Difficile de marquer quand on n'a pas le ballon (56% de possession pour les partenaires de Russell). Et c'est aussi en cela que la charnière Jalibert-Lucu a clairement failli. Dans sa gestion du jeu, dans ses transmissions, dans sa faculté à peser sur le sort d'un match, tout simplement. A la décharge des Bordelo-Béglais, ils n'ont pas toujours été aidés par leurs avants, et notamment leur deuxième ligne. Attendu au tournant, l'attelage Woki-Gabrillagues a peiné face à l'alignement écossais, concédant deux lancers sur dix et ne gênant que trop rarement ses homologues.
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