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L'équipe de France de handball a-t-elle besoin d'un surnom pour exister ?

Les confettis du sacre de la bande à Karabatic ne sont pas encore balayés que la France entière se demande quel nouveau surnom inventer à cette équipe.

Article rédigé par Pierre Godon
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
Le handballeur français Nikola Karabatic embrasse le trophée de l'Euro, à Herning (Danemark), le 26 janvier 2014.  (JONATHAN NACKSTRAND / AFP)

"Je pense que les surnoms, il faut arrêter. On nous connaît désormais en tant qu'équipe de France", lâche Nikola Karabatic, icône de l'équipe de France de handball, dimanche 25 janvier sur France 2. Les joueurs tricolores viennent d'être sacrés champions d'Europe face à de pâles Danois (41-32), leur neuvième titre en vingt ans. Et le débat national de tourner immédiatement autour du nouveau surnom des Bleus. En début de compétition, le capitaine Jérôme Fernandez avait estimé que "les Experts, c'est révolu". Mais faut-il à toute force trouver un autre surnom à l'équipe de France ?

Oui, les surnoms sont une tradition du hand français

Le grand public a découvert le handball au début des années 90, avec la médaille de bronze de la bande à Jackson Richardson aux Jeux olympiques de Barcelone, en 1992, puis avec le titre mondial décroché un soir de printemps 1995 contre la Croatie. Les premiers s'étaient surnommés "les Bronzés", référence à la couleur de leur médaille, les seconds avaient été baptisés "les Barjots" par la presse, suite à une interview d'un des déconneurs en chef, Philippe Gardent. A l'époque, les joueurs pouvaient passer plus de temps à se décolorer en blond qu'à s'entraîner.

Retour de bâton en 1996, avec une décevante quatrième place olympique à Atlanta. L'Equipe titre : "Appelez-les les Charlots". La machine à surnoms est lancée. "Les Costauds" sont nés en 2001 d'un adjectif proposé par le sélectionneur Daniel Costantini. Quant aux "Experts", qui règnent sur le handball mondial depuis 2008, c'est carrément la Fédération qui mandate une agence de communication pour trouver un nom qui claque. Le nom prend auprès du public, au point qu'un site dédié, experts-handball.com, existe toujours... Plusieurs cadres de l'équipe, dont Karabatic, détestent ce surnom, jugé trop froid. La presse tente d'imposer "les Immortels" en 2009. En vain. Pour 2014, "les Tauliers", fruit d'un sondage de L'Equipe.fr et "les Indestructibles", communément repris, tentent de percer...

Oui, ça marque définitivement les esprits 

Ce qui est une tradition pour le handball masculin ne l'est pas dans nombre d'autres sports. A commencer par le handball féminin, dont l'équipe n'a jamais eu de surnom. Les basketteuses françaises se sont imaginées "Braqueuses", après une série de matchs gagnés sur le fil en 2009... mais ce surnom, qui perdure aujourd'hui, n'est plus adapté à une équipe qui a gagné en constance ce qu'elle a perdu en folie. Le XV de France du Mondial 2011 a gagné le surnom ponctuel de "Sales Gosses" après une interview d'un Marc Lièvremont, le sélectionneur de l'époque, en furie.

Le meilleur surnom de l'histoire du sport reste l'œuvre d'un éditeur du magazine Sports Illustrated qui a inventé en 1991 le concept de "Dream Team" pour qualifier les stars de la NBA qui allaient écraser les Jeux de Barcelone et donner un lustre interplanétaire au championnat américain. "Nous n'y avions même pas pensé, a confié le grand patron de la NBA Daniel Stern au journaliste de Sports Illustrated Jack McCallum, après coup. Heureusement, vous, oui !" 

Non, pour exister, il faut surtout une salle

"Pendant tout le match, les commentateurs ont disserté sur le nouveau surnom de l'équipe de France, ce qui m'a passablement énervée, confie Béatrice Barbusse, présidente du club de D1 d'Ivry, contactée par francetv info. Ce n'est pourtant pas avec un slogan ou avec un surnom qu'on va développer une stratégie globale de développement de notre sport. On aurait dû donner des éléments de langage aux joueurs, ce sont eux qui avaient le micro ! On est mauvais en lobbying..."

Parmi les dossiers urgents du handball, la construction d'une salle pour accueillir les matchs de l'équipe de France – véritable serpent de mer qui se balade depuis des années entre Colombes, le XIIIe arrondissement de Paris et Choisy-le-Roi – ou la mise en valeur du championnat de France, qui ne repose que sur les épaules du Paris Saint-Germain Handball. C'était pourtant le moment rêvé pour faire pression tant que l'équipe de France est au sommet... "Mais non ! Et après je ne m'étonne plus que quand je rencontre un entrepreneur ou un politique, tout ce qu'il sait me dire du handball, c'est 'tiens, le hand, j'en ai fait au collège'", peste Béatrice Barbusse. 

Non, il faut passer à autre chose... 

C'est l'avis du créateur du surnom "les Experts", Olivier Bischoff, de l'agence Carat Sport, contacté par francetv info : "A l'époque, on avait fait le tour des joueurs pour trouver un nom. Contrairement aux générations précédentes, ils n'étaient pas très drôles, mais disciplinés, rigoureux. Le nom s'est rapidement imposé." C'est à ce moment-là que le handball a vraiment franchi un cap en terme de notoriété. 

La notoriété est une chose, la pérennité une autre. Cela passe par des infrastructures solides, plus faciles à faire accepter aux politiques et aux contribuables en période de victoires. En revanche, trouver un remplaçant au surnom "les Experts" ne paraît pas une priorité. "Un nouveau surnom ? 'Les Indestructibles', ça m'évoque un dessin animé, 'les Tauliers', je trouve qu'il y a quelque chose de négatif et 'les Immortels', ça passe à la rigueur. Non, je pense qu'il faut mettre un point final aux surnoms."

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