Judo : avec un seul titre aux Mondiaux, faut-il s'inquiéter pour les Français à deux mois des Jeux olympiques de Paris ?

Si les femmes ont été au rendez-vous, le contingent masculin du judo français a déçu lors des Mondiaux, du 19 au 24 mai à Abou Dhabi (Emirats arabes unis).
Article rédigé par Mateo Calabrese
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 4 min
Le judoka français Luka Mkheidze (-60 kg) lors de son combat contre l'Israélien Yam Wolczak aux championnats du monde, le 19 mai 2024 à Abou Dhabi (Emirats arabes unis). (RYAN LIM / AFP)

Les judokas tricolores sont encore loin du compte. Au lendemain d'un Grand Chelem de Paris triomphal (12 médailles) en février, le président de la Fédération française de judo, Stéphane Nomis, s'était pris à rêver de "dix médailles" pour la délégation tricolore lors des Jeux olympiques de Paris 2024, dans un entretien à Eurosport. A deux mois de l'échéance, les Bleus ont globalement déçu aux championnats du monde (du 19 au 24 mai) d'Abou Dhabi (Emirats arabes unis). Le seul titre individuel a été décroché par Margaux Pinot (-70 kg), non sélectionnée pour les Jeux olympiques, pour un total de six médailles.

"Sur le papier, c'est mitigé", concède Emilie Andéol, championne olympique à Rio en 2016 et consultante pour France Télévisions. La moitié vide du verre est forcément attribuée aux judokas masculins, repartis sans aucune médaille individuelle. Frédérique Jossinet, vice-présidente de la fédération en charge du haut niveau, admet que "ce n'est pas encore assez. Mais leur pic de forme, ils doivent l'avoir dans deux mois".

Les hommes loin du compte

Si Teddy Riner (+100 kg) et Aurélien Diesse (-100 kg) n'étaient pas là, les cinq autres sélectionnés ont déçu. Les résultats sont d'autant plus inquiétants que la délégation japonaise n'avait aligné qu'un seul qualifié pour les JO mais a tout de même ramené dix médailles (dont quatre titres). Pas d'exploit pour Joan-Benjamin Gaba (-73 kg), Alpha Djalo (-81 kg) et Maxime-Gaël Ngayap Hambou (-90 kg), jamais médaillés aux Mondiaux et qui ne comptaient pas parmi les principaux prétendants. Pour eux,"il faut lâcher les chevaux pour les Jeux et ne rien calculer", conseille Emilie Andéol, couronnée à Rio (+78 kg) alors qu'elle n'avait décroché qu'une médaille de bronze mondiale auparavant.

Les vraies déconvenues viennent des poids légers. Walide Khyar (-66 kg), "venu pour décrocher un titre" après son bronze en 2023, s'est incliné en huitièmes de finale. Luka Mkheidze (-60 kg), candidat naturel à la médaille, a été éliminé en huitièmes de finale et "aurait pu faire plus" selon Emilie Andéol, même s'il revenait de blessure.

Pour une équipe de France masculine en progression mais qui part de plus loin que les femmes, "on ne peut pas tout changer du jour au lendemain", reconnaît Frédérique Jossinet. "Il va falloir se remobiliser très vite, ne pas lâcher la dynamique qu'on a depuis un an et demi", récompensée par 31 médailles en Grand Chelem chez les hommes depuis le début de l'année 2023.

Les Mondiaux, un passage facultatif

Il n'y a pas encore de quoi céder à l'inquiétude dans le camp français. Lors des championnats du monde 2021, à Budapest (Hongrie), déjà organisés à quelques semaines des Jeux olympiques, les Bleus n'avaient obtenu que trois médailles. Un précédent rassurant, puisque les judokas français avaient ensuite décroché huit médailles aux Jeux de Tokyo. Néanmoins, seuls cinq athlètes présents aux Jeux de Tokyo s'étaient alignés aux Mondiaux en 2021, contre neuf cette année. 

"Les Mondiaux, ce n'est pas l'objectif de l'année, abonde Emilie Andéol, confirmant le discours tenu par la plupart des judokas français après leur déception respective. Ils étaient là pour engranger des combats, se familiariser pour les Jeux." Et valider leur statut de tête de série pour le tournoi olympique, une mission accomplie par toutes les judokates mais aussi par Luka Mkheidze.

L'histoire démontre que des championnats du monde réussis ne sont aucunement un préalable au podium olympique : sur les 56 médaillés individuels des Jeux olympiques de Tokyo 2021, 42 n'étaient pas montés sur le podium lors des Mondiaux précédents. 

"Les garçons ont pu voir sur quoi ils vont bosser. Il va falloir élever le niveau."

Emilie Andéol, championne olympique en 2016 et consultante pour France Télévisions,

à franceinfo: sport

Sa bagatelle de six médailles, loin d'être infamante, l'équipe de France la doit à son contingent féminin. Quatre des sept sélectionnées pour les Jeux olympiques étaient présentes et sont toutes reparties avec un métal. S'y rajoutent l'argent par équipes et le titre de Margaux Pinot (-70 kg), qui a battu en finale sa compatriote Marie-Eve Gahié, qui lui a été préférée pour les Jeux.

Trois médaillées de bronze insatisfaites

Les médailles de bronze d'Amandine Buchard (-52 kg), Clarisse Agbégnénou (-63 kg) et Madeleine Malonga (-78 kg) sont teintées du même optimisme et de la promesse de faire au moins aussi bien cet été. "En deux mois, il y a de quoi faire, assure Emilie Andéol. Par contre le travail va être très redondant, ce sont de petits réglages à mettre pour les moments clés."

Une certaine frustration pointe cependant, qui fait promettre à Clarisse Agbégnénou qu'elle ne laissera "pas passer deux finales", et à Amandine Buchard qu'elle a "tout pour chanter la Marseillaise à Paris". Leurs compatriotes masculins se sont bien gardés d'afficher la même confiance, mais sont aussi attendus sur les podiums parisiens.

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