Canal et BeIN fixés aujourd'hui
Après la validation par la justice de cet appel d'offres, la bataille aura bien lieu. La justice ayant refusé la demande de Canal + de suspendre l'appel d'offres, et reconnu la pleine liberté de la Ligue de football professionnel (LFP) de lancer cette procédure un an plus tôt que prévu, au nom de la liberté du commerce et de la concurrence, la chaîne cryptée et BeIN Sport se disputeront les droits de diffusion de la Ligue 1 pour la période 2016-2020. "Nous étions sûrs de notre bon droit ! Le processus de l'appel d'offres va pouvoir se dérouler comme prévu, dans des conditions de concurrence loyales et transparentes pour l'ensemble des candidats. Que le meilleur gagne", s'est réjouit le président de la Ligue, Frédéric Thiriez. La Ligue espère que ces enchères feront augmenter les droits qui, pour la période 2012-2016, étaient de 607 millions d'euros par an -moins qu'en Italie (960 millions) ou en Angleterre (1,7 milliard). La Ligue reverse environ 90% des droits aux clubs professionnels de foot et le reste au ministère des Sports pour financer le sport amateur.
Thiriez: "Le marché est très porteur"
Pour Thiriez, le moment est idéal pour une surenchère : "Le marché est très porteur actuellement. Jamais la L1 n'a eu autant de succès. Les affluences sont à la hausse de 9%, cette saison, et les audiences télévisuelles sont excellentes", a-t-il déclaré au Figaro.La Ligue a de fait plutôt intérêt à un partage entre les deux diffuseurs. "Arrêtons la paranoïa, personne ne veut la mort de Canal +. Ce serait d'ailleurs un coup dur pour la LFP de perdre un partenaire historique d'une telle qualité", a admis M. Thiriez. Depuis 1985, Canal + a bâti en partie son modèle sur la diffusion des matches de Ligue 1, notamment le match phare du dimanche soir. La chaîne détient pour l'instant jusqu'en 2016 les droits exclusifs des deux meilleurs matches des 38 journées du championnat, acquis pour 420 millions d'euros par an. BeIN a, elle, acquis les 3e et 4e matches. Cette fois, la filiale d'Al-Jazira, qui a raflé plusieurs compétitions majeures ces derniers mois (Coupe du monde de foot 2014, Mondial de handball 2015 et 2017) veut davantage et s'appuie sur les énormes moyens de l'Emirat. Ce qui lui permettrait de dépasser les deux millions d'abonnés, contre 1,7 actuellement.
Conséquence, les enchères pourraient faire grimper les droits de 25%, analyse Jérôme Bodin, de la banque Natixis, soit 760 millions par an. Mais même au prix fort, Canal + ne peut se permettre de perdre la L1 : le risque serait trop grand de voir partir ses abonnés chez BeIN et ses abonnements low-cost, estime la banque. Selon Natixis, 2 à 3 millions des abonnés de Canal +, sur 6 millions, sont venus pour la L1. Tous ne partiraient pas mais "l'impact serait très conséquent", conclut la banque, pour qui BeIN pourrait même chercher à rafler tous les matches. Mercredi, les deux diffuseurs actuels - ou de nouveaux entrants - déposeront à la Ligue leurs offres qualificatives. Celles-ci, qui concernent essentiellement l'habillage des émissions ou les budgets de production, servent à pondérer les offres financières mais n'influent qu'exceptionnellement sur le choix définitif.
Un autre duel à venir sur la scène européenne
C'est donc vendredi que tout va se jouer avec la remise des offres financières dans le cadre d'un montage séquentiel qui doit permettre à la Ligue de profiter à plein de la rivalité exacerbée entre BeIn et Canal . La Ligue attribuera dans un premier temps le Lot 1, qui offre deux grands matches en direct par journée de championnat. Elle préviendra les candidats, qui pourront alors enchérir à nouveau pour les lots 2 (un grand match en direct, avec les 10 plus belles affiches de la saison) et 3 (les sept matches restant pour chaque journée). La Ligue a fixé un prix de réserve global qu'elle garde secret. Si celui-ci est atteint, elle attribuera automatiquement tous les lots. Si ce n'est pas le cas, elle est libre de valider ou non les différentes offres.
La chaîne qatarie, qui a récupéré début mars les droits sur l'ensemble des matches du Mondial-2014, espère toujours s'imposer comme la chaîne "premium en sport", comme l'avait expliqué à l'AFP son directeur de la rédaction Florent Houzot le 13 mars. De son côté, Canal doit se défendre sur deux fronts: celui du cinéma et des séries avec la possible arrivée à l'automne de l'Américain Netflix et celui du football, son autre coeur de métier, où il ne fait plus l'unanimité. Selon différentes sources, plusieurs dirigeants de club auraient ainsi fait part à la LFP de leur mécontentement face à un traitement du football français jugé exagérément critique et agressif sur Canal et trouveraient BeIn "plus bienveillant". Et la semaine suivante, le match se déplacera sur la scène européenne: le 7 avril, c'est l'UEFA qui attend les dossiers des candidats à la diffusion de la Ligue des champions pour la période 2015-2018. Un autre champ de bataille pour les deux géants.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.