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Foot : l'équipe de France, championne du monde de la galère en qualifications

Les Bleus brillent souvent dans les grands tournois, mais le chemin pour y parvenir est semé d'embûches.

Article rédigé par Pierre Godon
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 7min
Antoine Griezmann se lamente après avoir raté une occasion contre le Luxembourg, le 3 septembre 2017, à Toulouse (Haute-Garonne). (FRANCK FIFE / AFP)

Re-re-re-rebelote. Comme d'habitude, l'équipe de France de football s'offre une fin d'éliminatoires difficile avec des déplacements piégeux en terre hostile. La faute à un nul improbable contre le Luxembourg (0-0, le 3 septembre à Toulouse) précédé d'une bourde monumentale d'Hugo Lloris en Suède (défaite 2-1, le 9 juin à Solna). Le ticket pour la Coupe du monde en Russie ne sera au mieux composté que le 10 octobre, face à la Biélorussie au Stade de France, pour peu d'avoir arraché un bon résultat à Sofia contre la Bulgarie, samedi 7 octobre. 

La France, poussive depuis 1934

Une qualification au bout du suspense, les supporters tricolores sont habitués. "J’en ai connu des qualifications difficiles, même après avoir gagné un grand titre", a souligné Didier Deschamps après la défaite surprise en Suède. Vous vous souvenez de l'ère Zidane où la France marchait sur l'eau ? En 1999, dans un groupe à sa portée, l'équipe des champions du monde attend la 82e minute pour ouvrir le score contre Andorre et doit sa qualification directe pour l'Euro à une énorme toile du gardien ukrainien face à la Russie à la dernière seconde du match.

C'était mieux sous Platini alors ? Lors de la phase de qualifications pour le Mondial 1978, les Bleus sont calamiteux à l'extérieur et obtiennent leur ticket au dernier match. Pour le Mondial 1982, ce n'est guère plus glorieux, la France arrache sa qualification à la différence de buts. "Quand on regarde les classements, le bilan victoires-défaites est à peine à l'équilibre, souligne Bruno Colombari, co-auteur du Dico des Bleus, interrogé par franceinfo. Sur 14 qualifications françaises à la Coupe du monde, les Bleus en ont obtenu 7 sans trop de problèmes. L'autre moitié, on est passé par des barrages ou par un trou de souris." Et cette année n'échappe pas à la règle.

La méthode Deschamps en question

Où se trouve le problème ? Dans la tête du sélectionneur, avance Florent Toniutti, qui décrypte la tactique sur son site Chroniques Tactiques : "L'équipe de France est moins à l'aise quand elle dispute des matchs où elle a 60 ou 70% de possession de balle, face à une équipe regroupée." Un exemple type : le dernier match des Bleus,  qui alignaient pourtant une équipe valorisée 400 millions d'euros, face au Luxembourg et son équipe d'amateurs.

Au maximum, les Bleus attaquaient à 7 contre 10 défenseurs et un gardien recroquevillés dans leur moitié de terrain, gardant ainsi toujours des joueurs en retrait. "Didier Deschamps est un pragmatique, il préfère limiter le risque de faire des erreurs et anticiper pour que son équipe ne se retrouve pas en danger, poursuit Florent Toniutti. C'est la tactique qui a permis de battre l'Allemagne, en demi-finale de l'Euro, quand les Bleus n'ont pas fait un grand match, mais profité des erreurs des Allemands, notamment le penalty provoqué par une main idiote de Schweinsteiger."

La France est condamnée à ramer contre des équipes défensives, pas forcément uniquement en qualifications : on l'a vu contre le Portugal en finale de l'Euro, qui a proposé un schéma extrêmement frileux après la blessure de Cristiano Ronaldo au quart d'heure de jeu. "C'est la limite de la méthode Deschamps : on se met au niveau de l'adversaire, quel qu'il soit", déplore Florent Toniutti. La France doit sa première place de groupe de qualification à sa double victoire contre les Pays-Bas, la seule équipe joueuse du lot. Si on prend en compte les seuls bétonneurs (Suède, Luxembourg, Bulgarie et Biélorussie), elle a pris moins de points que les Bataves, qu'on dit plombés par des stars vieillissantes.

Didier Deschamps, sélectionneur de l'équipe de France, lors du match nul face au Luxembourg (0-0) à Toulouse (Haute-Garonne), le 3 septembre 2017. (FRANCK FIFE / AFP)

"Les matchs internationaux, c'est 1-0"

Dans leur tête, les joueurs ont intégré qu'ils allaient souffrir contre Chypre, les Iles Féroé ou le Luxembourg. Les "petites nations" ont fait d'énormes progrès et les stars des pays phares, occupés par une saison prenante en club, ne mettent pas toujours l'investissement nécessaire pour faire la différence. Qu'elle est loin l'année 2005 où Zinedine Zidane pouvait affirmer doctement : "Si les Bleus ne cartonnent pas les Féroé, il y a un problème, non ?" Personne n'avait osé le contredire, à l'époque, lui qui était tout juste sorti de sa retraite internationale après avoir entendu des voix. Victoire 3-0

Lassana Diarra, arrivé en équipe de France lors des mauvaises années Raymond Domenech, avait adapté son discours à la grisaille ambiante. "Vous en connaissez, vous, des équipes qui gagnent tout le temps 5-0 ?, lâchait-il, professoral, en 2009 avant un match face à la Roumanie (qui s'est soldé par un nul laborieux 1-1). Je vais vous expliquer. Les matchs internationaux, c’est 1-0. S’il y a un but sur coup de pied arrêté : 2-0. Jamais plus." Le président de la Fédération, Noël Le Graët, est toujours sur la même longueur d'onde : "Les matchs qualificatifs se gagnent souvent avec un but d’écart", avait-il lancé en septembre 2016. Et le madré Breton avait vu juste : la bande à Deschamps avait décroché un piteux match nul en Biélorussie (0-0).

Rendez-vous le 15 juillet

On pourrait opposer à ces arguments que l'Espagne ou l'Allemagne effectuent généralement des promenades de santé dans ces qualifications. La Roja est ainsi première de sa poule avec une confortable différence de buts de +29. Julen Lopetegui a-t-il trouvé la recette de la potion magique ? Les (courts) stages de préparation avant chaque rencontre éliminatoire sont les mêmes pour tout le monde. Ou alors profite-t-il du fait que la formation espagnole s'appuie sur une identité de jeu et sur beaucoup de joueurs qui se connaissent en club ? Les meilleures périodes (en éliminatoires) de l'équipe de France remontent à 1991, quand la moitié de l'équipe se trouvait à l'OM, et en 2003, quand la moitié des Bleus étaient des Gunners d'Arsenal. 

Petite consolation : les deux fois, l'équipe de France avait atrocement déçu, éliminée en poules de l'Euro 1992 et en quarts de finale de l'Euro 2004. Moralité : avec son équipe incapable de battre le Luxembourg, Didier Deschamps pourrait bien soulever la Coupe du monde le 15 juillet 2018 à Moscou. 

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