Coupe du monde 2018 : pourquoi on peut croire en l'équipe de France et pourquoi on peut s'inquiéter
La qualification des Bleus en quarts de finale, au terme d'un match fou face à l'Argentine (4-3), rassure sur le potentiel offensif des Français. Mais elle ne balaie pas tous les doutes.
Didier Deschamps fait donc aussi bien qu'il y a quatre ans au Brésil. Il a réussi à emmener ses ouailles en quarts de finale de Coupe du monde après son succès 4-3 contre l'Argentine. Une victoire qui porte le sceau de Kylian Mbappé, après un match débridé qui a vu chaque équipe mener et être menée.
En se débarrassant du vice-champion du monde en titre, la France a confirmé qu'elle faisait bien partie des sérieux prétendants au titre suprême. Elle a quelques arguments à faire valoir, mais tout n'a pas été parfait, loin de là. Franceinfo vous explique pourquoi les Bleus peuvent croire en leur rêve, mais également pourquoi ils peuvent aussi trembler pour la suite de la compétition.
Ce qui rassure sur la capacité de l'équipe
Ils ont retrouvé leur brin de folie. L'équipe de France nous avait laissés sur notre faim durant la phase de poules. Peu d'occasions, peu d'allant, une qualification sans gloire face au Pérou et un match –pour du beurre certes– soporifique contre le Danemark. Face à l'Argentine, la France a attaqué le couteau entre les dents. Les raids de Kylian Mbappé, une animation offensive enfin convaincante, quatre buts marqués... Les motifs de satisfaction sont là. Face à une équipe d'Argentine qui a monopolisé le ballon, les Bleus ont eu les espaces, qu'ils apprécient, pour s'exprimer. "On a mis de la folie parce qu'il y en a dans cette équipe. Elle en a besoin", a avoué le sélectionneur après la qualification.
Cette rencontre prolifique rappelle celle contre la Suisse en poules au Mondial 2014 (5-2) ou le quart de finale contre l'Islande à l'Euro 2016 (5-2) où les Bleus avaient pu exprimer leur potentiel offensif. Face à l'Argentine, l'addition aurait pu être plus lourde. "La France a été mal payée, elle pouvait gagner plus largement", avance Christophe Kuchly, coauteur de l'ouvrage Les entraîneurs révolutionnaires du football (éditions Solar). Elle a même affirmé son identité offensive. "Le premier et le quatrième but sont intéressants, détaille Christophe Kuchly pour franceinfo. Le premier arrive au bout d'un contre, le quatrième clôture une action construite qui part d'une passe plein axe de N'Golo Kanté. Cela montre que la France sait prendre des risques dans la relance."
Ils ont Kylian Mbappé. La fusée Mbappé, Mbappé métamorphosé en Usain Bolt... Internet s'est enflammé pour la prestation de l'attaquant du PSG. Il a fait souffrir la pataude défense argentine à chaque accélération. A côté d'un Antoine Griezmann encore emprunté, d'un Olivier Giroud qui n'a pesé que par instant, il se présente comme le véritable danger numéro 1 des Bleus. "On peut encore avoir deux, trois doutes sur Mbappé lorsqu'il évolue face à un bloc bas, mais quand il a des espaces, il fait vraiment partie des tout meilleurs", éclaire Christophe Kuchly.
S'il a rappelé sa pointe de vitesse sur l'ouverture du score tricolore et le quatrième but, l'attaquant de 19 ans a aussi montré qu'il pouvait être plus qu'un avaleur d'espaces.
Son premier but est une vraie réalisation d'attaquant de surface, il est au bon moment au bon endroit.
Christophe Kuchly, coauteur des "Entraîneurs révolutionnaires du football"à franceinfo
Kylian Mbappé a aussi rappelé que, malgré son jeune âge, il savait être lucide et plein de sang-froid. Contre l'Argentine, c'est deux occasions, deux buts. Deschamps sera-t-il tenté de le mettre dans l'axe lors du quart de finale ? Christophe Kuchly n'y croit pas : "Il a flambé sur un côté et, face à un bloc bas, Olivier Giroud sera plus utile."
Ils peuvent susciter l'engouement populaire. En phase de groupes, les Bleus ont assuré l'essentiel, mais n'ont convaincu personne. Pire, des critiques sur le jeu proposé commerçaient à pointer.
Je veux me régaler ! J’en ai marre, je n’en peux plus !
Christophe DugarryRMC
Avec quatre buts face à l'Argentine, une flopée d'occasions et du spectacle, les Bleus ont fait plus que répondre aux critiques. "Il y a eu du suspense, de l'émotion, ça va forcément servir. C'est bien d'avoir été enthousiasmants, surtout face à l'Argentine qui reste un grand nom du football", estime Christophe Kuchly.
Dans un pays qui n'est pas réputé pour sa culture du ballon rond, cette notion de spectacle est essentielle pour emporter l'adhésion du public. "Avec une fin de match comme celle-ci, tu te rallies les indécis", ajoute-t-il. Et le fait que Kylian Mbappé, qui bénéficie d'un fort capital sympathie, soit le héros de la rencontre ne peut qu'être bénéfique.
Ce qui jette le doute
Leur défense est perméable. Malgré la victoire, l'équipe de France aurait pu payer cher son manque d'efficacité des deux côtés du terrain. Offensivement, elle a gâché des munitions et défensivement, elle a encaissé trois buts en concédant à peine plus d'occasions. "Elle ne sera pas forcément capable de mettre quatre buts à chaque fois", prévient Christophe Kuchly.
Didier Deschamps a rappelé la jeunesse de son équipe pour expliquer les erreurs qui ont émaillé la rencontre : la défense qui tarde à monter sur Angel Di Maria sur le premier but, la faute de jeunesse de Benjamin Pavard qui provoque un coup-franc amenant le deuxième et enfin le même Pavard qui laisse filer Aguero sur le troisième. "L'Argentine a tout de même été très peu dangereuse et elle en met trois", souffle Christophe Kuchly.
Les Bleus ont aussi appris qu'il ne faut jamais laisser un grand joueur libre. Lionel Messi a plutôt été bien muselé, mais "s'il a une meilleure défense avec lui, il peut nous éliminer", rappelle Christophe Kuchly. Malgré une prestation discrète, il parvient à être décisif sur les deuxième et troisième buts argentins. Qualifiés pour les quarts, les Bleus ne croiseront plus Messi, mais il reste d'autres grands joueurs sur la route du titre.
Griezmann n'est pas revenu au niveau de l'Euro 2016. Son match aurait pu avoir un tout autre relief s'il avait inscrit son coup-franc en début de rencontre. Mais sa frappe a terminé sur la barre, confirmant qu'il a moins de réussite qu'à l'Euro. Antoine Griezmann a bien marqué son penalty, mais celui-ci n'était pas forcément bien tiré. "Si le portier argentin était parti du bon côté, il l'aurait sans doute arrêté", confirme Christophe Kuchly.
Mais si l'attaquant de l'Atlético Madrid continue d'inquiéter, c'est pour son poids dans le jeu offensif des Bleus. "Ce n'était pas forcément un match pour lui, acquiesce l'auteur, mais il aurait pu peser plus." On notera toutefois sa subtile déviation pour Olivier Giroud qui amène le quatrième but tricolore. Par ailleurs, défensivement, celui qui a l'habitude de harceler les défenseurs avec l'Atlético n'est pas forcément sorti du lot par son abattage. Et pour la quatrième fois en autant de rencontres, il a été remplacé avant la fin.
L'Uruguay est un sacré client. Vendredi 6 juillet à 16 heures, les Bleus vont se frotter à l'Uruguay pour une place en demi-finale. La Celeste a éliminé le Portugal et ce n'est pas forcément une bonne nouvelle. Car ses caractéristiques ne sont pas celles de l'Argentine : l'équipe d'Oscar Tabarez est habituée à subir et ne fera rien pour prendre le jeu à son compte. "Même si la France en a pris trois, nos adversaires ne vont pas se mettre à attaquer face à nous", assure Christophe Kuchly.
La défense de l'Uruguay, articulée autour de la paire de centraux Diego Godin-José Gimenez, est solide et rugueuse. Olivier Giroud, Antoine Griezmann et Kylian Mbappé ne devraient pas s'amuser et n'auront probablement pas autant d'espaces que face à l'Argentine. Et gare à l'Uruguay s'il venait à ouvrir le score : "L'Uruguay sait pourrir un match", redoute l'auteur. Cela sera aux Bleus de jouer pour ne pas lui en laisser l'occasion.
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