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Evan Fournier juge "dérisoire" la place du sport à l'école et demande des réformes au ministre Jean-Michel Blanquer

Le vice-champion olympique de basket s'est directement adressé au ministre de l'Éducation nationale dans une tribune publiée lundi, pour lui demander d'agir afin que le sport n'ait plus une place "dérisoire" à l'école.

Article rédigé par franceinfo: sport, Apolline Merle
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 4 min
Evan Fournier a publié une tribune à l'attention du ministre Jean-Michel Blanquer. (ARIS MESSINIS / AFP)

Tout est parti d'un tweet. Après les succès du "BHV" français à Tokyo (basket, handball, volley), le ministre de l'Éducation nationale, de la jeunesse et des sports, Jean-Michel Blanquer avait vanté sur son compte officiel les mérites du sport à l'école, à l'origine, selon lui, de ces médailles olympiques. Un message qui a fait réagir de nombreux athlètes, maniant souvent l'ironie.

Parmi eux, Evan Fournier, vice-champion olympique avec l'équipe de France de basket, qui affirmait avoir "tellement de choses à dire en voyant ça" et ne pas savoir "par où commencer". Lundi 16 août, il a donc pris la plume dans une tribune pour le Huffi Post, directement adressée au ministre, pour faire part de sa vision du sport en France.

Le joueur des New York Knicks est d'abord revenu sur le tweet du ministre, associant l'éducation nationale aux médailles françaises. "Je ne partage pas votre point de vue, tranche-t-il sans détour. Aucun de mes coéquipiers ne peut aujourd'hui remercier l'Éducation nationale pour lui avoir permis de jouer au basket." 

Un cheminement "simpliste"

Pour le meilleur marqueur français à Tokyo, "comme le volley ou le handball, si ces sports collectifs sont parfois pratiqués, ce n'est non pas pour inciter les jeunes à faire du sport, mais par simple commodité". S'il comprend "qu'un gymnase permet de pratiquer plusieurs activités", il permet "surtout de combler le manque de budget alloué au sport, et propose, par défaut, certaines activités aux élèves."

"Ce ne sont pas les deux minuscules heures d'EPS par semaine de mon emploi du temps de collégien qui m'ont insufflé l'envie de jouer au basket, pour devenir le sportif que je suis aujourd'hui."

Evan Fournier

au Huff Post

"Le cheminement intellectuel insinuant qu'il s'agit d'une stratégie de l'éducation nationale pour former les champions de demain me paraît simpliste", poursuit celui qui dénonce au contraire des inégalités dans l'accès au sport entre les "établissements disposant de moyens, et ceux se trouvant dans des situations plus compliquées". Un manque de moyens, mais aussi de temps dédié au sport dans les programmes scolaires. "Ce ne sont pas les deux minuscules heures d'EPS par semaine de mon emploi du temps de collégien qui m'ont insufflé l'envie de jouer au basket, pour devenir le sportif que je suis aujourd'hui."

Un "main tendue" pour repenser un système

Après ces critiques, l'arrière des Knicks, "fils de professeur d'EPS et de sportif de haut niveau", a estimé qu'il est "de son devoir de vous tendre la main pour améliorer la considération et l'accès au sport dans nos écoles. [...] Ne nous y trompons pas, la place du sport à l’école est dérisoire". Fournier a donc avancé quelques propositions comme celle d'associer le travail des enseignants et éducateurs à celui des clubs amateurs et de ses bénévoles "sans qui le sport français n'existerait pas"

"La France dispose de grandes universités, pourquoi nos grands champions de demain ne pourraient-ils pas y côtoyer nos futurs chercheurs ?"

Evan Fournier

au Huff Post

Pour le joueur des Knicks, les Jeux de Paris 2024 représentent "une formidable opportunité pour réformer le système français en proposant un accès plus important à la culture et au sport". "Pourquoi ne pas offrir aux jeunes de réelles plages horaires dédiées au sport dans leur emploi du temps", propose ainsi le basketteur. "Il n'est pas trop tard pour reconsidérer la place des activités sportives, pour trouver du budget et proposer un accès et une place plus importante à nos jeunes sportifs", interpelle encore Fournier.

Expatrié aux États-Unis en NBA depuis 2012, à Denver, Orlando, Boston et désormais New York, Fournier a également vanté les mérites du système américain, "un modèle en matière sportive". "Aux États-Unis, le système scolaire offre un accès privilégié au sport avec une réelle reconnaissance pour ses athlètes dès le plus jeune âge ! Bien qu'étant imparfait, il permet à de jeunes sportifs ambitieux de poursuivre leurs études, avec l'octroi de bourses dans les plus prestigieuses universités du pays. (...) Il fait du sport un réel vecteur social et éducatif", argumente-t-il. "La France dispose de grandes universités, pourquoi nos grands champions de demain ne pourraient-ils pas y côtoyer nos futurs chercheurs ?", insiste-t-il. 

Fournier invite Blanquer à New York pour "poursuivre" l'échange

"Féliciter nos athlètes tous les quatre ans n'est plus suffisant", a conclu Fournier avant de terminer sa lettre ouverte par une invitation à Jean-Michel Blanquer. "Je suis prêt, monsieur le ministre, à vous accueillir à New York durant la saison pour poursuivre cet échange. Cela serait pour vous l'occasion de rencontrer vos homologues américains et de constater par vous-même que le sport peut occuper une place plus importante dans le système éducatif." 

Reste maintenant à savoir si le ministre jouera ou non le jeu. S'il n'a pas formellement réagi, le ministère de l'Éducation nationale a répondu à l'AFP, en soulignant que "l'EPS n'(avait) pas pour but de former des sportifs de haut niveau mais de former le plus grand nombre au sport", et rappelé "l'importance des cursus sportifs de haut niveau à l'école"

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