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Covid-19 : Quelles conditions sanitaires pour la reprise du cyclisme ?

Le cyclisme reprend peu à peu ses droits après avoir été touché, comme le sport en général, par la pandémie de Covid-19. Après le départ du Tour de Burgos mardi, c’est au tour des Strade BIanche, première course de reprise du calendrier UCI, et de la Route d’Occitanie, première course française, de s’élancer samedi. Leur lancement sera accompagné de nombreuses conditions sanitaires afin d’éviter tout risque de contamination.
Article rédigé par Théo Gicquel
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 5 min
Les coureurs sur la Route d'Occitanie.

L’heure de la reprise a sonné. Quatre mois et demi après Paris-Nice, dernière course World Tour (plus haute division mondiale, ndlr), le calendrier UCI va reprendre sa route samedi. Si plusieurs courses ont déjà repris, comme le Tour de Burgos (2.Pro) mardi, les Strade Bianche ouvriront le bal des courses World Tour, mais aussi celui d’une très dense fin de saison compilée sur quatre mois. Compression du calendrier oblige, une autre course de niveau inférieur s’élancera également ce jour-là : La Route d’Occitanie - La Dépêche du Midi (2.1, 1-4 août), la première sur le territoire français depuis la Course au Soleil. 

Bulle sanitaire et équipe médicale renforcée

Plateau de luxe, mais conditions sanitaires drastiques, voilà le paradoxe auquel doivent faire face les organisateurs. "Depuis qu’on a reprogrammé la course, on travaille sur deux scénarios, un dur et un allégé. Force est de constater que l’on sera sur un scénario dur vu la reprise des deux dernières semaines", déplore Romain Caubin, directeur de la course d’Occitanie. "En couplant les critères de l’OMS et de Santé publique France, on est sur un risque entre faible et modéré", rassure-t-il néanmoins.

L’UCI a établi un protocole strict pour toutes les courses tombant sous sa juridiction, qui doit être scrupuleusement suivi par les organisateurs. Sur la Route d’Occitanie, Romain Caubin et ses équipes ont tout prévu pour le départ et l’avant-course. "On a travaillé sur la refonte des sites de départ et d’arrivée pour créer le maximum d’espaces, les meilleures conditions possibles pour que les gens puissent respecter la distanciation sociale", annonce-t-il. Pour les équipes, une "bulle sanitaire" est mise en place afin de les isoler au maximum du reste de la course. "Il n’y aura pas de public dans les parkings et le minimum de contact pour les équipes. Il y aussi un gros travail en hôtellerie pour éviter d’avoir 4 ou 5 équipes au même endroit, pour qu’elles soient le mieux regroupées par étage et séparées du reste de la clientèle en restauration", précise le directeur de course. 

 

La zone de ravitaillement supprimée

En course, l’organisation redoute notamment le moment du ravitaillement. A l’origine, l’UCI avait interdit toute présence du public sur la zone. "On leur a signalé que c’était impossible d’interdire complètement le public sur des zones de 1,5 km. Je pense qu’on n’a pas été les seuls à le faire, car le règlement a changé : ce n’est plus obligatoire de créer ces zones mais d’organiser la collecte, ce que l’on va faire." L'organisation de la Route d’Occitanie a donc préféré supprimer cette zone, afin d’inciter les coureurs à se ravitailler et se débarrasser de leurs bidons auprès de leur voiture.

L'équipe médicale sera également renforcée. "On aura des médecins spécialistes des courses de vélo, un médecin et deux infirmières supplémentaires, un véhicule d’intervention en plus en course. Si un cas est avéré, on a un accord avec un laboratoire toulousain qui peut accueillir tout le monde : organisation, coureurs, suiveurs pour des tests et résultats en moins de deux heures pour tous les cas contacts. Mais une personne suspecte sera immédiatement sortie de la course", assure le directeur de course.

Après la course, c’est la gestion du podium qui suscite le plus d’interrogations. Dans son protocole, l’UCI demande le port obligatoire du masque pour tous, et des marches de podium séparées d’un mètre cinquante. "Pas d'hôtesses, pas de remise des prix, pas de bise.", tranche Romain Caubin, qui n’aura pas la main sur les mesures barrières des coureurs. "Nous sommes responsables pour créer les conditions à ce qu’ils soient au mieux, mais nous n’allons pas mettre le masque sur les coureurs, c'est à la discrétion des équipes."

"Ce qui est important, c’est qu’il y ait un nom au palmarès en 2020, et qu’on fasse ça de manière responsable. Le sportif passera clairement au second plan cette année."

La question la plus épineuse demeure celle du public. "C’est difficile, on s’en remet aux gens. On communique plus sur les mesures barrières que sur les coureurs présents. La voiture en tête de course, plutôt que de rappeler la situation de course, rappellera la distance à respecter. Sur 180 km en moyenne, c’est compliqué pour nous, surtout en période de vacances", souffle le directeur de course. 

D’autant qu'avec une saison aussi raccourcie, les plus grandes stars se jettent sur les courses de préparation au Tour de France, qui partira de Nice le 29 août : Thibaut Pinot, Egan Bernal, Chris Froome, Romain Bardet, Elia Viviani... Rien que ça. Un plateau de luxe qui laisse pourtant un goût amer à l’organisation. "Ce qui est difficile à gérer pour nous, c’est le décalage entre l’enthousiasme vu le plateau, et la pression liée au risque sanitaire. Pour moi, peu importe les coureurs que l’on a, ce n’est pas ce qui compte cette année. Peu importe le nom qui est écrit au palmarès, ce ne sera pas important. Ce qui est important, c’est qu’il y ait un nom au palmarès en 2020, et qu’on fasse ça de manière responsable. Le sportif passera clairement au second plan cette année", souligne Romain Caubin.

 

Des mesures estimées à au moins 60 000 euros

Économiquement, les organisateurs ont tous souffert de la crise sanitaire provoquée par la pandémie de Covid-19. Les mesures obligatoires ont obligé les courses à faire des choix pour rentrer dans leurs frais. "On a estimé l’ensemble de ces mesures entre 60 00 et 70 000 euros, sur un budget d’environ 500 000 euros. On a décidé de sacrifier la production en direct : on aura une heure, mais en différé. On a sensiblement réduit la note, ce qui nous permet d’absorber les dépenses sanitaires. Ça fait partie du prix à payer, ce n’était pas la priorité", continue le directeur de course. Au contraire de plusieurs épreuves financées par le privé, la Route d’Occitanie a pu avoir lieu cette année grâce au financement des pouvoirs publics. "Dans cette période, la puissance publique nous a largement soutenu puisque les subventions ont été assurées. En temps normal, on ne fixe pas les plafonds en terme de budget, mais c’est ce qui nous a permis de survivre cette année", confie Romain Caubin.

Que ce soit le Tour de Burgos, les Strade Bianche et donc La Route d’Occitanie - La Dépêche du Midi, ces trois courses vont lancer la saison mais aussi placer le curseur de la gestion sanitaire pour les courses futures. Pour les françaises, on peut compter le Mont Ventoux Dénivelé Challenge (6 août), le Tour de l’Ain (7-9 août), le Critérium du Dauphiné (12 au 16 août), le Tour du Limousin (18-21 août), ou le Tour de Poitou-Charentes (27-30 août). "Il y a beaucoup de tension, on est scruté par tous les suivants. Mais on a envie de montrer que c’est possible d’organiser ce genre de manifestation dans ce contexte. On a un triple objectif : protéger les coureurs, le public et l’organisation en vue de la suite de la saison, et donner un bon exemple des courses cyclistes", conclut Romain Caubin.

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