MotoGP : pourquoi la défense de son titre est si compliquée pour Fabio Quartararo
Le pilote français conserve la tête du championnat à quatre Grands Prix de la fin de la saison en dépit de nombreuses difficultés dans sa quête d'un deuxième sacre de champion du monde.
Un sprint final sous haute tension, voilà ce qui attend Fabio Quartararo ces prochaines semaines. A quatre Grands Prix du dénouement de la saison, le pilote français est en position idéale pour décrocher un deuxième titre de champion du monde consécutif. Le tenant du titre est en effet en tête du championnat et plus que jamais dans la position du chassé.
Ce week-end du samedi 1er et dimanche 2 octobre, en Thaïlande, "El Diablo" devra encore une fois se méfier de la concurrence, et de Francesco Bagnaia et Aleix Espargaro en premier lieu. Le Tricolore pourrait vivre un nouveau Grand Prix difficile, un refrain revenu trop souvent cette saison dans les oreilles de Quartararo. Et à juste titre. Quelles sont les raisons qui rendent la défense de ce titre, si chèrement acquis la saison passée, si difficile ?
1Parce que Fabio Quartararo n'est pas aidé par une moto moins performante
C'est le plus grand des paradoxes, mais aussi le plus grand des tours de force du prodige français cette saison. Fabio Quartararo parvient à occuper la tête du championnat en disposant d'une monture qu'on ne peut qualifier de pointe. La Yamaha M1 montre cette saison ses limites vis-à-vis du reste du paddock. Sur les circuits comportant de longues séquences en lignes droites, comme en Thaïlande cette fin de semaine, le champion du monde en titre part systématiquement avec du retard.
"Le souci numéro un de Yamaha, c'est le moteur en vitesse de pointe, nous décrypte l'ancien pilote MotoGP Régis Laconi. Ce n'est même pas qu'ils ont pris du retard, c'est qu'ils n'ont jamais été les meilleurs dans ce domaine. Ducati, Aprilia, même Honda… Tout le monde a progressé, quand Yamaha a stagné". Quartararo le disait avant même le coup d'envoi de la saison, il n'était "pas possible d’être confiant à 100 %".
Et les ajustements apportés en cours d'exercice ont été, eux aussi, peu concluants. "Rien n'était négatif et rien n'était vraiment positif ici" asséna le pilote tricolore après les essais du Grand Prix d'Aragon le 16 septembre, pour la première sortie des dernières évolutions de châssis de la Yamaha. La deuxième version de carénage autorisée par le règlement avait été mise tout simplement à la poubelle, après les seuls essais au Mugello fin mai, faute d'apport. "Comment fait-on pour être en tête du championnat avec une moto qui n'est pas dans le coup ?", tempère l'ancien pilote Christian Sarron, pas aussi convaincu par la thèse d'une faillite matérielle totale.
2Parce que Fabio Quartararo roule seul contre le reste du plateau
Ces limites techniques ne font pas de la Yamaha "un saucisson" s'amuse Régis Laconi. Mais si le déficit de performance moteur se doit d'être souligné, l'écart entre Fabio Quartararo et le reste du giron Yamaha est simplement criant. Le Français sait qu'il ne peut pas compter sur une course d'équipe pour l'aider à freiner ses adversaires. Son voisin de stand, Franco Morbidelli, pointe à la 19e du classement pilotes avec 28 petits points, 191 de moins que le Français ! En comparaison, les différentes écuries fournies par Ducati (Ducati Lenovo, Pramac, Gresini) trustent cinq des huit premières places du classement.
"Franco Morbidelli a chuté plusieurs fois ces derniers mois et a perdu confiance, estime Christian Sarron. Dans l'écurie satellite, Andrea Doviziozo a été pris parce qu'il n'y avait pas trop le choix, il avait déjà tiré un trait sur sa carrière dans la tête. Et enfin Darryn Binder est un débutant qui n'avait pas non plus tout cassé en Moto3."
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3Parce que Fabio Quartararo a fait face à un nouveau défi mental
Il en avait fait un de ses grands axes de progression après ses débuts en MotoGP. Fabio Quartararo le savait mieux que quiconque : il lui fallait développer une force mentale à toute épreuve – avec l'aide d'un psychologue du sport - pour entrer dans la caste des champions. Le poids de la couronne sur son casque, et de la réussite de tout un constructeur sur ses épaules, peuvent parfois s'apparenter à un fardeau. Mais El Diablo est parvenu à surpasser cette situation inédite.
Alors même qu'il a débuté la saison dans l'incertitude vis-à-vis de sa situation contractuelle, avant de prolonger son bail avec Yamaha. "J'ai plutôt l'impression que dans la tête, re-signer l'a soulagé, avance Régis Laconi. De toute façon, depuis le début de la saison, il est tout le temps au maximum, même quand il n'est pas aux avant-postes. […] Ce qui est hallucinant, c'est qu'il pilote comme s'il avait six ou sept ans d'expérience de MotoGP, alors qu'il n'a que 23 ans."
4Parce que Fabio Quartararo doit encore plus manier performance et prudence
S'il n'est pas le pilote le plus casse-cou du plateau, Fabio Quartararo a toutefois imposé son style en MotoGP, tout en efficacité et en maîtrise. Comme il ne peut se montrer dominateur en vitesse pure, il se voit contraint d'être encore plus stratège. Le Niçois a gagné en régularité ce qu'il a peut-être cédé par instants en éclairs de génie. "Je sens que je suis à la limite : j'imprime un très bon rythme, mais ça n'est pas suffisant, déplorait-il en conférence de presse le 4 septembre après le Grand Prix de Saint-Marin. [Si j'avais fait] plus que ça, je pense que j'aurais fini par terre aujourd'hui…"
Avec deux fois moins de victoires que son plus proche poursuivant Francesco Bagnaia (trois contre six), Quartararo compte pourtant 18 points d'avance sur l'Italien. Une jolie performance, mais un pécule plus mince qui le rend davantage vulnérable aux fulgurances du pilote Ducati, vainqueur de quatre courses consécutives durant l'été. "Fabio est un pilote tellement doué et sûr. Il fait très peu d'erreurs, admire Christian Sarron. Il est extrêmement fiable, et il connaît ses limites. Contrairement à Bagnaia, qui offre moins de sécurité."
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Dimanche dernier, les deux hommes ont été à la lutte dans les derniers instants du Grand Prix du Japon pour une huitième place à l'impact comptable modéré. Quartararo a résisté, son rival transalpin a craqué. Comme en Emilie-Romagne un an plus tôt, quand une chute de "Pecco" Bagnaia avait assuré le titre au pilote français. Un petit coup de pouce dont il ne se plaindrait sûrement pas à nouveau cette saison.
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