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Cédric Vasseur : "Le contre-la-montre n’est pas une priorité en France"

Nous avons demandé à l’ancien maillot jaune du Tour de France, consultant cyclisme de France Télévisions pour ces JO, les raisons de l’absence de ténor français dans les grands chronos. Selon lui, il manque notamment une école pour former des spécialistes et changer les mentalités.
Article rédigé par Grégory Jouin
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 2 min
Sylvain Chavanel

"En ce moment on manque de personnes capables de rivaliser avec les meilleurs sur le contre-la-montre. Il y a plusieurs facteurs, pas une seule explication : d’abord, la discipline du contre-la-montre a un peu été perdue de vue en France. Il y avait avant beaucoup plus d’épreuves comme Grand Prix des Nations ou le Chrono des Herbiers –qui existe toujours mais qui n’attire plus les meilleurs. Comme il n’y a pas un événement phare, ça intéresse forcément moins les jeunes qui se mettent au cyclisme. Ils préfèrent le BMX, le VTT, la piste ou la route. Ils laissent un peu de côté l’épreuve solitaire. Donc on a pris du retard par rapport aux Anglais, aux Australiens, aux Américains qui ont cette culture.

Ces nations ont acquis une belle avance d’autant qu’ils ont développé le triathlon avec notamment les Iron Men. Et le cyclisme est très important dans le triathlon. Après, on ne peut pas non plus avoir toujours un champion dans une discipline. On n’a pas eu non plus de vainqueur du Tour depuis très longtemps. J’ai quand même l’impression que Chavanel a quand même fait une partie du retard mais ce n’est pas facile et il est un peu seul.

"Il faut en avoir envie"

Pour faire un bon chrono, il faut vraiment avoir envie. Moi j’ai connu un Américain qui s’appelait Dillon Casey qui était dans un état second avant un contre-la-montre. Ensuite, il faut des qualités physiques : pouvoir rester le plus longtemps possible en anaérobie, c'est-à-dire la fréquence cardiaque à laquelle on est au maximum avant de générer des déchets toxiques pour l’organisme. Il faut être à ce seuil sur toute la durée du contre-la-montre. Ca, on l’a ou pas. Perso, je n’étais pas un spécialiste. En plus j’avais la hantise du contre-la-montre.

Après, il y a le vélo : ça passe par les roues, la pression dans les pneumatiques, le guidon et évidemment l’aérodynamisme. Quand on roule à plus de 50km/h de moyenne, il faut une position aérodynamique et il vaut mieux avoir celle de Bradley Wiggins que celle d’Andy Schleck. Enfin, il y a le facteur psychologique. Sur un chrono olympique qui fait 44km, il faut être capable de rester concentré jusqu’au bout. Il y a un travail spécifique à faire. Sur un prologue, on n’a pas le temps de s’ennuyer. Sur 44km, je peux vous dire que le temps est long. En général, quand on n’est pas spécialiste, on tient 20km. Après on lâche.

"Construire des vélodromes"

Il manque en France une école du contre-la-montre. Il y a deux écoles pour être bon en contre-la-montre. Il y a la piste avec les Anglais qui sont des modèles en ce moment. Ils ont construit tout un programme de développement pour les jeunes. Ca débouche ensuite sur des records olympiques. Et il y a le triathlon mais c’est un peu moins spécifique. La piste reste la meilleure école : les Anglo-Saxons mais aussi les Scandinaves sont très bons en indoor. Ca les intéresse.

Il faut des moyens financiers. On a peut-être d’autres priorités. Après, et c’est peut-être la bonne nouvelle, on voit des vélodromes qui se développent. Il y a Roubaix à côté de chez moi. Avec les Morelons, les Frédéric Magné, tous ceux qui ont une expérience de la piste, un savoir-faire, peut-être que dans dix quinze ans on pourra avoir un champion : un Wiggins français. Mais c’est du travail de longue haleine. Mais il ne faudra pas attendre de miracle avant dix ans".

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