JO de Paris 2024 : comment les organisateurs ont renoncé à leur promesse de gratuité des transports pour les détenteurs de billets

Article rédigé par Raphaël Godet
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 3 min
Un usager achète un ticket de métro à Paris, le 4 mai 2020. (BERTRAND GUAY / AFP)
Les spectateurs qui assisteront aux épreuves devront finalement se munir d'un passe Paris 2024 vendu à 16 euros la journée et 70 la semaine. Le comité d'organisation souhaitait pourtant réduire l'impact écologique de la compétition grâce à cette mesure.

"A ce prix-là, est-ce qu'une coupe de champagne est offerte au moins ?" Stéphane, qui a déjà dépensé 500 euros dans des billets, a bien failli s'étouffer en découvrant, dans la soirée du lundi 27 novembre, le prix des transports à Paris à l'occasion des Jeux olympiques. Son séjour d'"une toute petite semaine" dans la capitale l'été prochain va coûter encore plus cher que prévu à ce Nantais de 34 ans. Du 20 juillet au 8 septembre 2024, le ticket de métro vendu à l'unité va en effet passer à 4 euros (contre 2,10 euros actuellement). Un passe Paris 2024 va également être mis en place avec une tarification spéciale : 16 euros la journée, 30 les deux jours, 70 la semaine.

Les organisateurs de Paris 2024 avaient pourtant promis la gratuité des transports pour les détenteurs de billets, comme c'était le cas chez le voisin londonien en 2012. A la page 38 du dossier de candidature parisien, il est ainsi écrit noir sur blanc : "Afin d'atteindre l'objectif fixé de 100% des spectateurs accédant aux sites des compétitions en transport en commun, le plan de transport de Paris 2024 identifie des mesures spécifiques" dont "un accès gratuit au réseau de transport en commun pour les détenteurs de billets le jour de la compétition".

Pour un meilleur bilan carbone ?

Tony Estanguet lui-même l'a redit fin 2019, dans les colonnes du Parisien. "Chaque spectateur qui vient assister aux JO doit réduire son propre impact. L'idée est que le billet d'entrée à un site donne gratuitement accès aux transports en commun, déclarait alors le patron du comité d'organisation. On travaille pour que des partenaires nous accompagnent sur le sujet, car cela représente forcément un coût. Mais c'est de notre responsabilité."

"Si on ne veut pas que ces Jeux impactent la planète, il est indispensable d'inciter les spectateurs à utiliser des modes de déplacement à faible impact."

Tony Estanguet, président du comité d’organisation des JO

dans "Le Parisien"

Le triple champion olympique de canoë-kayak l'a encore répété le 31 mars 2021 lors d'une audition devant une commission du Sénat : "Nous, nous offrons la gratuité des transports dans notre budget pour les détenteurs de billets (...) pour limiter l'empreinte carbone."

Mais voilà, en décembre 2022, la mesure est abandonnée après une révision budgétaire. "On avait rayé cette ligne, car il y avait pour nous un enjeu d'équilibre budgétaire, concède Michaël Aloïsio, directeur général délégué de Paris 2024. Il y avait aussi une réalité d'efficacité, ça n'avait pas de levier incitatif pour les gens de prendre des transports en commun. Car pour aller sur les sites, il faudra prendre les transports en commun." La suppression de cette mesure a permis d'économiser 45 millions d'euros.

Mais une mesure trop coûteuse

"A l'occasion des Jeux olympiques et paralympiques, Ile-de-France Mobilités va augmenter considérablement son offre de transport. Il n'est pas question que les Franciliennes et les Franciliens payent ce coût", a justifié Valérie Pécresse, la présidente d'Ile-de-France Mobilités, le gestionnaire des transports en commun franciliens. Cette hausse des tarifs doit en effet permettre de financer l'augmentation de 15% de la fréquence des bus, métros et RER durant les deux mois de compétition.

"C'est donc cela les jeux 100% accessibles en transports en commun ? Des métros et des bus réservés aux plus riches ?" a toutefois fustigé David Belliard, adjoint écologiste à la mairie de Paris, sur le réseau social X. David Roizen, expert associé à la Fondation Jean-Jaurès et spécialiste des questions liées au sport, avance une raison beaucoup plus simple pour évoquer cette volte-face. "C'est simple, les promesses électorales énoncées lors de la cérémonie d'attribution à Lima en 2017 se fracassent contre les réalités de Paris 2024."

"Proposer la gratuité des transports à autant de monde, ce n'est tout simplement pas tenable vu le contexte. Point. Il aurait peut-être fallu l'expliquer comme ça, plus tôt."

David Roizen, spécialiste des questions liées au sport

à franceinfo

Près de 10 millions de personnes sont attendues sur le réseau de la RATP et de la SNCF pendant les JO. Avec ses amis, Stéphane a commencé à faire ses calculs pour "trouver la formule transport qui fera le moins mal au portefeuille". Avant d'ajouter, amer : "Quand j'y regarde, je devais d'abord avoir les transports gratuits, puis en fait non, puis en fait ce sera même le double niveau prix... Ça fait mal."

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