JO d'hiver 2030 : quatre questions sur l'officialisation de la France comme pays hôte, suspendue à la situation politique française
Cela ne devait être qu'une formalité. Cela sera finalement plus que cela. La France, pays hôte retenu pour accueillir les Jeux olympiques et paralympiques d'hiver en 2030 par le Comité international olympique (CIO), doit délivrer à l'instance les garanties financières de son projet avant le 24 juillet, jour de l'attribution définitive des Jeux. "La situation politique en France", autrement dit la dissolution de l'Assemblée nationale qui venait d'être prononcée, n'a "pas permis de finaliser" ces documents destinés à couvrir un éventuel déficit de l'organisation, avait expliqué le CIO en juin. Franceinfo: sport fait le point sur la situation.
Pourquoi ce retard du gouvernement français ?
Pour entériner la décision finale et le choix de la France comme pays hôte des Jeux d'hiver de 2030, le pays choisi doit apporter des garanties financières au CIO. Un moyen pour l'instance de se protéger en cas de déficit du Comité d'organisation (Cojop). Pour cela, le Premier ministre français doit engager la responsabilité de la France, lui seul étant habilité à cette tâche.
Or, avec la dissolution de l'Assemblée nationale à moins de deux mois des JO, puis les élections législatives anticipées suivies de la démission du gouvernement, les prises de décisions sont à l'arrêt. "Avec un gouvernement démissionnaire, chargé des affaires courantes, il est difficile d'engager le pays dans un projet aussi coûteux, malgré les accords déjà pris", explique Bruno Valente, avocat au Barreau de Paris.
Que se passe-t-il si la France ne délivre pas les garanties financières à temps ?
Si la situation paraît dans une impasse, Jean-Loup Chappelet, professeur émérite à l'université de Lausanne et spécialiste des questions olympiques, se veut optimiste. "Le CIO va probablement faire une attribution provisoire, sous réserve d'apporter des garanties financières, mais aussi de toutes celles qui doivent également être fournies (comme sur la livraison des Jeux, la sécurité, l'accessibilité etc.), dans les mois et années qui viennent", explique-t-il à franceinfo: sport. Ce délai supplémentaire dépendra ensuite du calendrier parlementaire. "Cette garantie doit être votée par l'Assemblée nationale, tout en sachant que la prochaine opportunité sera sur le budget 2025, débattu à l'automne 2024", poursuit le spécialiste des questions olympiques. À titre d'exemple, pour Paris 2024, les garanties financières n'ont été apportées qu'en 2022. "Mais le contexte était différent puisque seule la ville de Paris s'engageait. Pour 2030, on ne sait pas encore qui signera", précise Jean-Loup Chappelet.
En effet, jusqu'en 2026, les contrats pour l'accueil des Jeux n'étaient signés qu'entre le CIO, le comité olympique national et la ville hôte. Une politique révolue à partir de 2028. "Le CIO s'est rendu compte que les villes n'étaient pas assez puissantes pour assumer d'éventuels déficits, et a donné la possibilité à d'autres entités publiques de signer, comme les régions ou l'Etat", appuie Jean-Loup Chappelet.
Ce sont d'ailleurs les régions Auvergne Rhône- Alpes et Provence-Alpes-Côte-d'Azur, avec le soutien appuyé de l'Elysée, qui ont construit ce projet olympique. Mais depuis les dernières élections législatives, le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes Laurent Wauquiez (LR) a été élu comme député et est donc sur le point de démissionner, pour respecter la règle du non-cumul des mandats. Son remplaçant devra donc reprendre ce dossier, monté en quelques mois seulement.
Que dit le CIO ?
De son côté, le CIO veut aussi rassurer et ne ferme pas la porte à une adaptation. Son président lui-même, Thomas Bach, a effleuré l'idée d'une validation partielle. "Je ne vais pas spéculer sur des détails légaux, mais sans garantie on ne peut pas prendre une décision inconditionnelle pour l'attribution des Jeux. Toutes les parties prenantes en sont conscientes. On attend", avait-il déclaré le 18 juillet à L'Equipe. Contacté par franceinfo: sport, le CIO nous a renvoyés vers ce même entretien où Thomas Bach rappelle également que David Lappartient, président du Comité national olympique et sportif français (CNOSF), lui a affirmé que "toutes les parties prenantes et les partis politiques [étaient] favorables aux Jeux d'hiver 2030 en France et [que] cela permettrait de trouver une solution avant le 24 juillet".
Lors de la commission exécutive du samedi 20 juillet, le CIO restait encore prudent. "Tout ce que je peux vous dire, c'est qu'à ce stade, c'est une très bonne candidature. On va en parler mercredi mais je ne peux pas anticiper les discussions. La difficile situation politique actuelle rend les choses un peu plus compliquées. Nous en discutons et nous avons encore quelques jours pour travailler ce sujet. Soyez patients, quelque chose sera présenté mercredi", a temporisé Mark Adams, porte-parole de l'instance.
La candidature de la France peut-elle être remise en cause ?
"Non, assure Jean-Loup Chappelet. Surtout, cela enverrait un très mauvais signal puisqu'il n'y a pas d'autres candidatures." Les autres villes, précédemment candidates, ne sont plus dans la course. La ville de Salt Lake City (Etats-Unis) s'est rabattue sur 2034, la Suisse se trouve toujours sous la menace d'un rejet populaire et la Suède ne présentait pas des garanties gouvernementales suffisantes. Cela enverrait aussi une mauvaise image de la France à deux jours du coup d'envoi des Jeux de Paris. "Avouons-le, la France accueille la terre entière dans quelques jours. Si l'avant-veille de la cérémonie d'ouverture, on dit qu'on ne peut pas accueillir les Jeux 2030 parce qu'on n'est pas capable de délivrer la garantie, l'image de la France en prendrait un coup", confiait David Lappartient au journal Le Monde le 18 juillet.
Revenir sur le choix du CIO provoquerait enfin du retard sur le calendrier prévu alors qu'il ne reste que cinq ans avant l'échéance. "Certes, le projet de candidature s'appuie sur des installations existantes pour la grande majorité mais il y a quand même une patinoire notamment à construire", souligne Jean-Loup Chappelet. Avant la France, Los Angeles 1984 avait connu pareilles péripéties. "Elle était la seule ville candidate mais elle ne voulait pas soutenir le Cojop, qui s'est donc créé sous forme d'un Cojop privé", fait remarquer le spécialiste de l'olympisme.
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