Interview Paris 2024 : on a rencontré le chef d'État-major Thierry Ducret, chargé de la logistique de la police pendant les Jeux

L'ancien général commandant des forces spéciales Terre, Thierry Ducret a été choisi en janvier par la Préfecture de police de Paris pour conduire la mission de gérer toutes les questions logistiques liées à l'action des policiers pendant les Jeux olympiques et paralympiques. Franceinfo l'a rencontré.
Article rédigé par Joanna Yakin
Radio France
Publié
Temps de lecture : 7min
Thierry Ducret, chef de l'État-major logistique des JO, le 10 juin 2024. (JOANNA YAKIN / FRANCEINFO - RADIO FRANCE)

La préfecture de police de Paris a créé en janvier un État-major logistique des JO. Objectif : anticiper, planifier et gérer toutes les questions logistiques se rapportant à la mobilisation des policiers en Île-de-France pour la sécurisation des Jeux. À la tête de cet État-major, un chef nommé spécialement pour cette mission : Thierry Ducret, un militaire de carrière. Franceinfo a pu pousser la porte de cet État-major installé au cœur de Paris, dans des locaux prêtés pour l'occasion par la direction générale des Finances publiques.

franceinfo: Thierry Ducret, qui êtes-vous et quelle est votre mission ?

Thierry Ducret : Je suis responsable de la logistique de la police pour les Jeux olympiques et paralympiques 2024 et assurer le soutien des forces de police qui seront déployées dans la région Île-de-France lors de ce grand événement. Avant, j'étais directeur "sûreté" d'une entreprise internationale et j'ai surtout eu une carrière d'officier pendant 40 ans. Pendant de nombreuses années j'ai travaillé dans des États-majors français, américain ou encore britannique. Ma mission a démarré en janvier. Ça devrait se terminer vers la fin de l'année parce qu'évidemment, une fois que les Jeux olympiques seront terminés, il faudra faire le service après-vente, c’est-à-dire, comme d'habitude sur ce genre de rendez-vous important et de gestion au niveau national, rendre compte à l'Assemblée nationale, au Sénat, la Cour des comptes. 

Vous êtes à la tête d'une équipe de plusieurs personnes, comment travaillez-vous ?

Aujourd'hui, on a une vingtaine de personnes et on devrait monter à 50 personnes au moment le plus critique, c’est-à-dire quand on sera lancé dans la conduite des Jeux. Vous avez des gens qui viennent de la préfecture de police, donc des policiers, des administratifs de la préfecture de police, vous avez donc des gens qui, comme moi, ont été recrutés pour l'occasion, mais aussi des réservistes de la gendarmerie et de l'armée de terre. À ceux-là viendront s'ajouter des équipes qui seront sur le terrain et qui dépendront directement de l'Etat major logistique, soit environ 500 personnes qui seront réparties sur l'ensemble des sites logistiques. 

On est chargé en particulier de coordonner l'ensemble de la logistique pour les renforts policiers qui viennent de province, mais pas seulement. Quand on parle de logistique, on parle de l'hébergement évidemment. C'est piloté par la direction générale de la police nationale, mais nous, on regarde concrètement, précisément où l'on va mettre tels effectifs en fonction de la mission qu'ils vont avoir.

"Il y a aussi l'alimentation, gérer les malades, les blessés, s'assurer que les radios fonctionneront, que les batteries sont rechargées ou encore que les véhicules seront en état."

Thierry Ducret, chef d'État-major logistique des JO

à franceinfo

La préfecture de police continue évidemment cette mission, mais compte tenu de l'enjeu, du volume et de la durée pendant laquelle ça va se passer, puisqu'en fait cela va durer trois mois à peu près entre le 15 juin et le 15 septembre, c'est long, il y a beaucoup de monde, donc il a été estimé utile d'avoir un organisme qui coordonne tout ça. 

Y a-t-il des points d'inquiétude ?

Ce qui nous occupe le plus en ce moment c'est l'identification des sites que l'on appelle des "zones de repos", ce sont des sites où les policiers pourront venir faire leur pause. Il en faut une quarantaine en Ile-de-France à proximité des sites olympiques. Il faut donc que l'on trouve des sites qui ne sont pas utilisés par le comité d'organisation des Jeux olympiques, ni par la mairie de Paris. On a trouvé des sites, mais maintenant on essaye de les améliorer parce que certains sont assez rustiques ou sommaires. Évidemment c'est une grosse opération logistique. Les armées sont habituées à gérer d'énormes effectifs qui partent à l'étranger, la préfecture de police, c'est moins le cas, c'est la raison pour laquelle cet état-major a été créé. Mais je constate que tout cela s'organise plutôt très bien.

"On a plus de 100 000 repas à distribuer et huit millions de bouteilles d'eau sur l'ensemble de la période des jeux."

Thierry Ducret, chef d'État-major logistique des JO

à franceinfo

Il y a aussi des chiens qui arrivent en renfort, à peu près 60 % viennent de l'étranger, 40 % de province. La plupart montent avec leurs croquettes parce qu'on ne change pas le régime alimentaire d'un chien la veille pour le lendemain. Mais il y a un certain nombre de pays qui nous ont demandé de fournir des croquettes. Donc on s'occupe aussi des croquettes de chien et du foin pour les chevaux également, puisqu'on a 20 chevaux qui arrivent d'Espagne et de Portugal. Les renforts cynophiles arrivent vers la fin du mois de juillet. Le chien vient avec le maître-chien, souvent aussi avec un véhicule également. On s'assure évidemment de leur accueil, de l'hébergement, de la nourriture de ces gens-là.

À un mois des Jeux, peut-on dire que tout est prêt ?

Jusqu'à présent on a travaillé sur la planification, sur la mise en œuvre des dispositifs dont on allait avoir besoin et maintenant on travaille sur l'adaptation de ces dispositifs si jamais on avait à changer les choses. Donc, il reste un peu moins d'un mois pour faire ça, ce qui me paraît suffisant. Il faut évidemment être prêt à modifier les dispositifs qu'on a envisagés parce que l'actualité peut amener à désengager des unités qui étaient prévues sur Paris ou au contraire à les renforcer. Tout ça est évidemment très mouvant. Compte tenu de l'engagement de la gendarmerie nationale et de différentes forces de sécurité intérieure en Nouvelle-Calédonie, on est en train par exemple de réadapter le dispositif et de voir combien de forces seront finalement disponibles pour la préfecture de police.

L'adaptation, c'est ce qui m'inquiète le moins. Parce que c'est quand même une grande force de la police nationale, de la préfecture de police et du ministère de l'Intérieur. De tout temps et toujours, les policiers sont en mesure de se réadapter extrêmement vite à une situation qui n'était absolument pas prévue. Donc, très honnêtement, c'est vraiment ce qui m'inquiète le moins. Et puis, une fois qu'on a bien planifié les choses, une fois qu'on a bien programmé et une fois qu'on a mis en place les dispositifs qui étaient prévus, on sait s'adapter.

"La planification et la préparation de l'organisation sont importantes, parce que ça permet ensuite de pouvoir s'adapter quand ça change."

Thierry Ducret, chef d'Etat major logistique des JO

à franceinfo

On dit souvent dans les armées que "la première victime de la guerre, c'est le plan". Donc le plan est là parce qu'on met en place un certain nombre de choses, mais on sait que ça ne va pas se passer comme ça. C'est normal.

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