: Reportage Public enthousiaste, compétition ardue... À Vichy, les Global Games mettent en lumière les performances des sportifs déficients intellectuels
"Si j'ai entendu parler des Global Games ? Bien sûr, ils ont tous défilé dimanche dernier, c'était sympa à voir !" Cette commerçante de l'avenue des Célestins, en face de la gare de Vichy, n'est pas la seule à avoir vu le raz-de-marée déferler. Dans le centre-ville, mardi 6 juin, on entend différentes langues étrangères aux terrasses des bistrots. Le défilé des maillots nationaux - "China", "Portugal", "Mexico" - et des accréditations pendantes autour du cou est, quant à lui, un spectacle à lui tout seul.
À peine le temps de récupérer le précieux sésame donnant accès aux différents sites de compétition - 12 disciplines sont représentées tout au long de la semaine - que, déjà, une navette arrive sur le parvis du luxueux hôtel Aletti, le QG opérationnel de ces Global Games. Direction le complexe sportif des Darcins à Cusset, une commune à l'Est de Vichy, où se tient le tournoi de tennis de table.
Les médaillés paralympiques tricolores à la peine
À l'entrée, un épais barnum blanc sert de réfectoire aux joueurs et joueuses. Attablés, on retrouve plusieurs membres de l'équipe de France comme Léa Ferney, médaillée d'argent à seulement 17 ans aux Jeux paralympiques de Tokyo dans sa catégorie (classe 11, réservée aux athlètes ayant une déficience intellectuelle). La pongiste, véritable star du sport adapté en France, digère son élimination du matin en quarts de finale de l'épreuve individuelle. D'autant plus rageant qu'une victoire lui aurait permis de valider son billet pour Paris 2024.
À l'intérieur du complexe, la foule est nombreuse et bruyante pour soutenir un autre champion, Lucas Créange, lui aussi médaillé paralympique (en bronze) au Japon il y a deux ans. Mais malgré les nombreux "allez Lulu !" entonnés par Pascal Griffault, l'entraîneur national du para tennis de table adapté, il finit lui aussi par céder après un rude combat face à un solide adversaire coréen, au même stade de la compétition...
Huit heures de route mais des souvenirs plein la tête
Plusieurs jeunes spectateurs, reconnaissables à leurs t-shirts blancs "UNSS" (Union nationale du sport scolaire) et leurs drapeaux tricolores accrochés à leurs sacs, sortent de la salle pour aller trouver refuge à l'ombre d'épais cyprès, tandis que le mercure avoisine les 28 degrés. "On a fait quatre heures de route pour venir de Pont-de-Beauvoisin (Isère) ce matin et on repart en fin d'après-midi", explique Valérie Bonnaimé, l'enseignante d'EPS qui encadre la trentaine d'élèves allant de la 6e à la 3e. "On s'est posé la question avant de venir mais jamais une ville française n'a accueilli cet événement, c'est exceptionnel. On voulait pouvoir le partager avec nos jeunes, qui n'ont jamais vu du haut niveau, et venir encourager nos athlètes."
Amy, Mélissa et Orlane reviennent de la chasse aux autographes avec des signatures de pongistes chinois qu'elles s'empressent de montrer à leur professeur. Ce mardi matin, elles ont pu assister à deux matchs de basket 3x3, notamment celui des Bleues contre les Australiennes. "C'était vraiment bien et impressionnant parce qu'on ne voyait pas qu'elles étaient handicapées alors qu'elles ont un handicap mental, mais ça ne les empêche pas d'être super fortes", s'enthousiasment-elles d'une seule voix.
"C'était impensable de ne pas prendre part à ces Global Games chez nous"
15h30. La navette qui permet de rejoindre les différents sites est, cette fois, partie sans demander son reste. Carole, une autre professeure d'EPS - à Vichy cette fois - se mue alors en taxi improvisé. À bord, sa fille mais aussi des élèves de son lycée évoquent leur rôle de bénévole sur l'événement. L'une est attendue au tennis, une autre au futsal... "C'était impensable de ne pas prendre part à ces Global Games chez nous. Cela fait des mois qu'on essaie de tout mettre en place. C'est stimulant de voir tous ces sportifs du monde entier, et c'est une expérience dont ils se souviendront", avance la conductrice.
>> A lire aussi : le président de la Fédération française de sport adapté veut montrer "qu'il y a aussi des athlètes déficients intellectuels aux Paralympiques"
Elle arrête le véhicule au bord du lac d'Allier, où se déroulent les courses d'aviron. Sur place, des dizaines de spectateurs. L'un d'entre eux, reconnaissable à ses lunettes blanches, sa perruque tricolore et son drapeau français, a sorti les grands moyens pour soutenir Florent Coqueugniot, jeune rameur atteint du syndrome d'Asperger (classe II3), déjà titré plusieurs fois au niveau international. Juste à côté, sa mère Maryline se rappelle avec émotion de la journée de la veille. "C'était son anniversaire, il a eu 21 ans et il a remporté deux médailles d'or, sur le 500 mètres skiff et en double mixte avec Apolline (Mongin). Il était tellement content, c'était génial !" L'histoire retiendra que, quelques heures plus tard, il en remportera une troisième sur le 1 000 mètres skiff, toujours sous les yeux de son clan.
En s'éloignant du plan d'eau, on se retrouve vite au coeur du parc omnisports qui jouxte le CREPS (Centre de ressources, d'expertise et de performance sportive) de Vichy. Vingt bonnes minutes de marche dans un cadre bucolique permettent d'arriver à hauteur du stade d'athlétisme. Italiens, Polonais ou Ukrainiens sont en tribunes pour la suite du triathlon classe II2 (déficience fonctionnelle importante en plus d’une déficience intellectuelle). À moins que ce ne soit pour échapper au soleil qui prend un malin plaisir à matraquer les crânes...
Nicolas Virapin au sommet
Dans les allées, les organisateurs s'affairent pour communiquer les résultats et ne pas prendre de retard sur le programme, le tout sous les yeux de la présidente du Comité paralympique et sportif français (CPSF), Marie-Amélie Le Fur, présente en spectatrice. Le lancer du poids terminé, le Français Nicolas Virapin est toujours en tête et va devoir conclure face à la foule lors de l'épreuve du saut en longueur. Un bond à 4,29 mètres et l'affaire est pliée pour l'Isérois de 36 ans, porteur de trisomie 21.
Quelques secondes après la proclamation de sa victoire et un ultime saut, le Français rejoint un banc sous la tribune principale. Il se met à fixer l'horizon au loin, comme pour redescendre sur terre après une montée d'adrénaline. Puis, subitement, il serre les poings et laisse échapper quelques mots : "yes, encore une médaille d'or, allez c'est pas fini !"
Nicolas Virapin se saisit de sa chaussure gauche et commence à en évacuer le sable. L'opération se répète près d'une dizaine de fois. Vient le tour de la droite. Puis, happé par un spectateur, il entame une petite séance photos, le sourire aux lèvres. Sa mère Catherine, qui l'attend à côté des vestiaires, ne manque pas de l'enlacer : "Je suis si fière de toi", lâche-t-elle avec émotion.
Il est plus de 19 heures et cette deuxième journée des Global Games touche à sa fin. De retour en ville, staffs et athlètes de plusieurs nations débriefent en marchant à proximité du parc des Sources. D'autres, affamés, se retrouvent autour d'une même table dans un fast-food. Jusqu'à dimanche, tous vont faire battre le cœur de Vichy au rythme du sport adapté.
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