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On vous résume le bras de fer entre Canal+ et TF1 (et ses conséquences pour les clients)

Canal+ a interrompu, jeudi, la diffusion des chaînes de TF1, faute d'accord commercial entre les deux groupes. D'un côté comme de l'autre, on dénonce la "prise d'otages" des abonnés de Canal+.

Article rédigé par franceinfo
France Télévisions
Publié Mis à jour
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Cana+ a coupé la diffusion des chaînes de TF1 le 1er mars, faute d'accord commercial entre les deux groupes.  (LUDOVIC MARIN / AFP)

La décision est tombée en pleine soirée télévisée. Jeudi 1er mars, au lendemain de l'expiration des accords de distribution avec le groupe TF1 et en l'absence d'un nouveau, Canal+ a pris le parti de couper la diffusion des chaînes de TF1 à ses abonnés. Selon des chiffres obtenus pas franceinfo, cela concerne 2,3 millions d'abonnés à Canal Sat et 1,5 million d'abonnés à la TNT Satellite. Soit 3,8 millions de foyers français privés des chaînes TF1 (TF1, TMC, TFX, TF1 séries films, LCI). Mais que s'est-il passé pour en arriver là ? 

Acte 1 : un bras de fer entre TF1 et les opérateurs

Dès 2016, TF1 a changé sa stratégie et engagé un bras de fer avec les opérateurs  afin d'obtenir une rémunération pour la fourniture de ses chaînes en clair, qu'il proposait jusque-là gratuitement. Le groupe a mis en avant sa nouvelle offre "TF1 premium", enrichie de nouvelles fonctionnalités et proposée aux fournisseurs d'accès internet, câblopérateurs et opérateurs satellites.

Après plusieurs mois de discussions, le poids lourd de la télévision française a réussi à trouver un terrain d'entente avec SFR et Bouygues Telecom (avec qui il partage la même maison mère). Ces derniers ont accepté de payer pour la diffusion des programmes du groupe de télévision en échange d'une offre enrichie. Mais les négociations n'ont pas abouti avec Orange, ni avec Iliad, maison mère de Free, ni encore avec Canal+.  

Acte 2 : Canal+ attaque TF1 en justice

"Le groupe TF1 profite indûment de sa puissance pour exiger des opérateurs qui diffusent ses chaînes gratuites, des sommes astronomiques, à hauteur de 100 millions d'euros au total, dont plusieurs dizaines de millions pour le seul groupe Canal+." Voilà ce que déclare Maxime Saada, le directeur général de Canal+ au JDDdans une interview datée du 2 février. "Nous n'avons aucunement l'intention de céder au chantage et sommes prêts, si nous y sommes contraints, à envisager assez vite une coupure du signal des chaînes gratuites du groupe TF1 sur nos différents supports", menace-t-il alors. 

Rendez-vous compte que TF1 veut faire payer Canal et le consommateur pour ses chaînes diffusées gratuitement !

Maxime Saada, directeur général du groupe Canal+

au JDD

Mardi 27 février, Canal+ passe à l'action et porte plainte contre TF1 devant le tribunal de commerce de Paris. Selon BFM Business, "TF1 réclame à Canal une vingtaine de millions d'euros par an, soit quasiment dix fois plus que jusqu'à présent" alors que l'accord qui permettait à la filiale de Vivendi de distribuer TF1 expire fin février. Un argument balayé préalablement, le 16 février, par le patron de TF1, Gilles Pélisson, lors d'une conférence de presse. Les sommes demandées "n'ont rien d'exorbitant", a-t-il expliqué, ajoutant que "cela existe dans beaucoup de pays d'Europe"

Acte 3 : Canal+ interrompt la diffusion des chaînes de TF1

Quelques jours plus tard, Canal+ enfonce le clou. Jeudi 1er mars au soir, le groupe annonce, dans un communiqué, qu'il interrompt la diffusion des chaînes de TF1 faute d'arriver à un accord commercial avec ce dernier. Il dénonce "les exigences financières déraisonnables et infondées". Dès lors, "TF1, TMC, TFX, TF1 Séries Films, LCI et leurs services associés" ne sont plus accessibles aux abonnés de Canal. 

"Nous avons décidé de sauter le pas quand nous avons compris que la position de TF1 était totalement intransigeante, explique au Figaro, Maxime Saada. Cela fait cinq fois que nous reportons le délai d'expiration de nos accords de distribution et TF1 proposait encore de les proroger jusqu'en avril ou mai. C'est un piège. TF1 veut nous entraîner jusqu'à la Coupe du monde de football, en juin 2018 en Russie, car c'est la seule chaîne à la diffuser en clair. À ce moment-là, ils espèrent que nous soyons obligés de signer devant la pression de nos abonnés".

Ils veulent prendre nos abonnés en otage.

Maxime Saada, directeur général de Canal+

au "Figaro"

De nombreux abonnés de Canal+ ont exprimé leur incompréhension sur Twitter face au message apparu sur leur écran : "Le groupe TF1 veut désormais faire payer ses chaînes gratuites (...) alors même que ces chaînes sont diffusées gratuitement sur la TNT et sur internet. Cette diffusion payante aurait pour conséquence de vous faire payer l'accès à ces chaînes, ce que nous refusons (...)". Sur les réseaux sociaux, ils dénoncent indifféremment l'attitude du groupe TF1 et de Canal+. 

Néanmoins, rappelle Le Figaro, ces abonnés "peuvent toujours rebrancher leurs téléviseurs sur la TNT hertzienne pour regarder les programmes" de TF1.

Acte 4 : TF1 dénonce (aussi) "une prise d'otages" des abonnés de Canal+

La réponse de TF1 ne s'est pas fait attendre. Quelques heures après la décision de Canal+, le groupe de Gilles Pélisson réagit dans un communiqué et dénonce "une décision unilatérale" du groupe. Se disant "scandalisé", TF1 "déplore que les clients du Groupe Canal+ (...) soient pris en otage". L'entreprise demande encore à Canal+ de "prendre en compte l'intérêt légitime des abonnés" et rappelle n'avoir "jamais demandé à ce que ses chaînes et son service 'replay +' soient coupés". 

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