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Nantes : ce que l'on sait de l'incendie qui a endommagé la cathédrale

Le procureur de la République de Nantes a annoncé, samedi, qu'une enquête avait été ouverte pour "incendie volontaire". Le grand orgue a été détruit par les flammes.

Article rédigé par franceinfo
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Publié Mis à jour
Temps de lecture : 8 min
L'intérieur de la cathédrale Saint-Pierre et Saint-Paul de Nantes, dévastée par un incendie le 18 juillet 2020 (SEBASTIEN SALOM-GOMIS / AFP)

Cet incident ravive le souvenir douloureux de l'incendie de Notre-Dame de Paris. La cathédrale gothique Saint-Pierre et Saint-Paul de Nantes (Loire-Atlantique) a été touchée par un incendie, samedi 18 juillet. Le procureur de la République de Nantes a annoncé, samedi, qu'une enquête avait été ouverte pour "incendie volontaire". Franceinfo détaille ce que l'on sait de ce sinistre alors que le Premier ministre, le ministre de l'Intérieur et la ministre de la Culture se sont rendus sur place samedi après-midi.

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Où le feu s'est-il déclaré ?

Le feu a été repéré, samedi matin, peu avant 8 heures. "A 7h30, il y a eu un coup de carillon et un son semblable au bruit que fait une ampoule de maison qui se brise", a relaté à France Bleu Loire Océan Jean-Yves, gérant d'un tabac se situant sur le parvis. "En ouvrant mes volets à 7h45, j'ai vu une épaisse fumée et des flammes sortir de la grande verrière de la façade de la cathédrale. C'était très saisissant. Je suis descendu, j'ai pris mon vélo, je suis arrivé en une minute, en même temps que les pompiers", a raconté sur franceinfo Maxime, un riverain. Et d'ajouter : "C'était très, très impressionnant de voir une épaisseur de flammes monstrueuse qui sortaient du vitrail qui a explosé."

Un conseiller municipal de Nantes a posté ces images peu après 8 heures.

Les pompiers ont découvert "un violent incendie au niveau de l'orgue situé derrière la rosace et l'action s'est concentrée sur ce foyer", a précisé le directeur départemental des pompiers, le général Laurent Ferlay.

Vers 10 heures, les pompiers ont annoncé avoir "circonscrit" l'incendie. Dans le détail, 104 sapeurs-pompiers et 45 véhicules ont été mobilisés, a indiqué la police de Loire-Atlantique.

Quels sont les dégâts dans l'édifice ?

Le grand orgue a été détruit par les flammes. "Les dégâts sont concentrés sur le grand orgue, qui semble être entièrement détruit. La plateforme sur laquelle il se situe est très instable et menace de s'effondrer", a précisé Laurent Ferlay.

Le grand orgue a "complétement disparu", a raconté l'administrateur diocésain, le père François Renaud, en charge de la cathédrale en raison d'une vacance du siège épiscopal, qui est entré dans la cathédrale avec les pompiers. "C'est très impressionnant et c'est une perte inestimable", a-t-il commenté, relevant qu'il y avait beaucoup de suie à l'intérieur du monument.

La console de l'orgue de chœur a disparu en fumée et les stalles en bois attenantes. Derrière le grand orgue, il y a des vitraux d'origine qui ont tous volé en éclats. C'est une verrière complète du XVIe.

François Renaud, administrateur diocésain

à l'AFP

Le grand orgue "avait survécu aux bombardements de la Seconde Guerre mondiale, il avait survécu à l'incendie de 1972 et là, en quelques heures, il est parti en fumée", a réagi sur franceinfo Michel Bourcier, l'un des titulaires de l'orgue. "Il avait été construit il y a quatre siècles, en 1619, c'était le plus important de la région donc c'est une valeur patrimoniale importante qui disparaît", a-t-il ajouté, évoquant une "perte immense" et un "coup dur pour la culture". Il a indiqué avoir joué la dernière fois sur l'orgue vendredi : "Quand je l'ai quitté, tout était normal." Selon lui, un deuxième orgue se trouve dans la cathédrale et "ses claviers ont disparu". "Tout cela est très troublant", a-t-il commenté.

C'est un drame parce que c'est un des plus beaux orgues de France qui vient de partir en fumée.

Mathieu Lours, historien de l'architecture, spécialisé dans l'architecture des cathédrales

à franceinfo

Mais la cathédrale ne semble pas en danger. "A priori sur la cathédrale de Nantes, le sinistre n'a pas touché les dispositions constructives, les murs et la toiture et n'a fait des dégâts que sur les aménagements intérieurs", a déclaré sur franceinfo le capitaine Eric Brocardi, porte-parole de la fédération nationale des sapeurs-pompiers.

Où en est l'enquête sur les causes de l'incendie ?

Le procureur de la République de Nantes, Pierre Sennès, a annoncé, samedi, qu'une enquête avait été ouverte pour "incendie volontaire". "Trois points de feu distincts", "à une distance conséquente les uns des autres", ont été constatés, a-t-il précisé. Deux départs de feu ont été constatés au sol, à gauche et à droite de la nef de l'édifice. Le troisième se trouve à plus de 30 mètres du sol, au niveau du grand orgue, qui a été complètement détruit par les flammes. 

Pierre Sennès a ensuite indiqué, samedi après-midi, que les enquêteurs n'avaient "pas trouvé dans les accès extérieurs de traces d'effraction".

Pour aller au-delà de ces premières constatations, des experts incendie du laboratoire de police scientifique et technique, venus de Paris, sont arrivés sur place samedi en fin d'après-midi. Ils doivent notamment examiner les points de départ de feu et l'installation électrique de la cathédrale. Si rien de probant n'est trouvé, il faut attendre des analyses plus poussées. Cela peut prendre des jours, voire des mois, en fonction des prélèvements. Dimanche, les experts de la police scientifique et technique attendent toujours le feu vert des pompiers pour accéder à la plateforme où se trouvait le grand orgue.

Le procureur de la République de Nantes a annoncé, dimanche matin, qu'un homme avait été placé en garde à vue.  Ce "Rwandais" de 39 ans, bénévole du diocèse où il officie comme "servant d'autel", est "venu se réfugier en France il y a quelques années", assure le recteur de la cathédrale, qui le "connaît bien". C'est lui qui était était chargé de fermer la cathédrale vendredi soir. Les enquêteurs ont voulu vérifier son agenda et notamment la façon dont il a fermé l'édifice. C'est un choix procédural, a précisé le procureur à franceinfo. "Toute interprétation qui pourrait impliquer cette personne dans la commission des faits est prématurée et hâtive", a insisté Pierre Sennès. L'homme a été remis en liberté dans la soirée de dimanche.

"Il n'y a aucun élément qui rattache mon client à l'incendie de la cathédrale", a déclaré l'avocat de l'homme un temps en garde à vue face à la presse, dimanche, comme le rapporte BFMTV. Il a également tenu à rappeler "que personne n'a été blessé physiquement", invitant "à faire la part des choses". Et d'ajouter : "Je rappelle la présomption d'innocence attachée à mon client et la nécessité que la procédure soit respectée."

Quelles sont les réactions après le sinistre ?

Johanna Rolland, la maire de Nantes, a fait état de la stupéfaction des riverains. "Aujourd'hui, ce sont toutes les Nantaises et tous les Nantais qui sont dans cette émotion et dans cette tristesse parce que la cathédrale, notre cathédrale, c'est évidemment un lieu pour la communauté catholique nantaise mais c'est un lieu pour tous les Nantais. C'est une partie de notre histoire, c'est une partie de notre patrimoine", a-t-elle déclaré à la presse après s'être rendue sur place.

Emmanuel Macron a fait part sur Twitter de son "soutien à nos sapeurs-pompiers qui prennent tous les risques pour sauver ce joyau gothique de la cité des Ducs".

"En pensée avec nos sapeurs-pompiers mobilisés courageusement pour circonscrire l'incendie de la cathédrale de Nantes. Je les assure de mon soutien et de ma profonde gratitude. Aux Nantais, dont je partage l'émotion, je veux dire ma solidarité", a écrit le Premier ministre Jean Castex sur le même réseau social avant de se rendre sur place, samedi après-midi. Accompagné du ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin et de la ministre de la Culture, Roselyne Bachelot, il a rencontré des pompiers.

"Je veux d'abord rendre hommage au dévouement et au très grand professionnalisme des sapeurs-pompiers mobilisés, à leur efficacité remarquable", a ensuite déclaré le chef du gouvernement face à la presse. "Je souhaite une reconstruction la plus rapide possible, à laquelle l'Etat prendra toute sa part", a-t-il ajouté.

"Chacun, même s'il ne croit pas, même s'il ne fait pas partie de la communauté catholique, se sent touché au cœur, a déclaré la ministre de la Culture Roselyne Bachelot. L'Etat va bien sûr être là pour mener à bien des travaux d'urgence, puis ensuite, plus globalement, des travaux majeurs", a-t-elle poursuivi.

"C'est non seulement une part du patrimoine religieux qui est détruit mais aussi un symbole de la foi catholique qui est entamé, blessant le cœur de toutes celles et tous ceux pour qui ces édifices sont des lieux de prière, des refuges spirituels, des repères pour leur foi", a réagi la Conférence des évêques de France dans un communiqué.

La Fondation du patrimoine a lancé une collecte afin de reconstruire le grand orgue de la cathédrale, en partenariat avec le ministère de la Culture. Les dons des particuliers issus de la souscription publique seront intégralement reversés aux travaux. Tous les dons, réalisables sur le site fondation-patrimoine.org, sont défiscalisables.

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