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Incendie de Notre-Dame : trois choses à savoir sur les dépistages du plomb dans le sang

Le plomb est nocif pour la santé, même à faible dose.

Article rédigé par franceinfo
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A Paris, les travaux à Notre-Dame, avec les excavatrices en action, le 17 juillet 2019. (STEPHANE DE SAKUTIN / AFP)

La pollution au plomb autour de Notre-Dame de Paris suscite l'inquiétude des riverains et des salariés qui travaillent sur le chantier. Sur 175 plombémies effectuées (mesures du taux de plomb présent dans le sang), l'Agence régionale de santé (ARS) d'Ile-de-France a révélé, mardi 6 août, que dix-huit dépassent les seuils de vigilance, dont deux de manière importante.

Mais à partir de quel taux de plomb dans le corps, mesuré en microgrammes par litre de sang (μg/L), faut-il s'inquiéter ? Quand parle-t-on de saturnisme (la maladie liée à une intoxication au plomb) ? L'exposition au plomb peut-elle entraîner des maladies professionnelles ? Eléments de réponse avec l'aide de Mady Denantes, médecin généraliste qui a dirigé la mission sur le saturnisme de Médecins du monde (MDM) après l'incendie de la cathédrale.

Le plomb est toxique, même à faible dose

"Moins on a de plomb, mieux c'est ! C'est un poison !", assène d'emblée Mady Denantes. "C'est pourquoi l'Organisation mondiale de la santé fixe à zéro μg/L le taux souhaitable", ajoute-t-elle. "Il n'existe pas de concentration de plomb dans le sang qui soit sans danger", avertit en effet l'OMS sur son site. "Il est aujourd'hui établi que le plomb est toxique pour les enfants, les femmes enceintes et les adultes, même à de faibles concentrations", surenchérit l'Inserm.

Entrant dans l'organisme par inhalation ou par ingestion, le plomb peut se diffuser dans le cerveau, le foie, les reins et les os. S'il est ingéré par les enfants, le plomb cause une maladie grave, le saturnisme, qui provoque entre autres des lésions neurologiques irréversibles. Et une exposition aiguë ou chronique à des niveaux élevés entraîne des troubles digestifs, une perturbation des reins, des lésions du système nerveux ou des anomalies de la reproduction. 

Des seuils définissent le saturnisme infantile

Ces seuils ont été revus à la baisse en 2015, sur recommandation du Haut Conseil de la santé publique (HCSP). Le seuil de vigilance est aujourd'hui de 25 μg/L. "Son dépassement indique l'existence probable d'au moins une source d'exposition au plomb dans l'environnement et justifie une information des familles sur les dangers du plomb et les sources usuelles d'imprégnation, ainsi qu'une surveillance biologique rapprochée, accompagnée de conseils hygiéno-diététiques visant à diminuer l'exposition", écrit le HCSP.

Le seuil de 50 μg/L, lui, nécessite "un niveau d’intervention rapide (...) impliquant la déclaration obligatoire du cas". Les pouvoirs publics doivent ainsi signaler et protéger tout mineur dont la plombémie dépasse 50 μg/L. L'enfant est alors considéré comme atteint de saturnisme.

"Les petites intoxications au plomb touchent le développement psychomoteur, entraînant un saturnisme modéré chez l'enfant et donc une diminution au niveau du quotient intellectuel", précise Mady Denantes. "Il faut donc que l'enfant change d'environnement". La plombémie baissera-t-elle pour autant ? "Oui, le taux de plomb dans le sang va baisser très vite si on retire l'enfant du milieu contaminé où il se trouve. Mais le plomb reste stocké dans l'os. C'est pourquoi il faut arrêter de nouveaux apports".

Des normes pour certains secteurs d'activité

Dans le bâtiment comme dans l'industrie ou l'artisanat, nombre de travailleurs sont exposés professionnellement au plomb et les pathologies engendrées par cette exposition peuvent être reconnues comme maladie professionnelle. L'Institut national de la recherche sur la santé et la sécurité (INRS) au travail rappelle que cette "exposition au plomb est soumise à une réglementation très stricte, qui protège les travailleurs et leurs familles. Les composés du plomb sont en effet classés au niveau européen comme toxiques pour la reproduction". Les salariés exposés à des risques de contamination doivent être suivis et leur plombémie contrôlée. "Les valeurs limites biologiques (VLB) réglementaires contraignantes à ne pas dépasser sont fixées à 400 µg de plomb par litre de sang pour les hommes et à 300 μg/L pour les femmes", précise l'INRS. Un seuil qui pourrait être revu, selon un avis de l'Anses publié début juillet.

"Au-dessus de ce seuil, il s'agit d'intoxications sévères et tous les organes sont touchés", souligne Mady Denantes. "Cela provoque des encéphalopathies, des hypertensions, des cancers, stérilités masculines, atteintes du rein, et bien sûr des anémies". Y a-t-il moyen d'agir, dans les cas les plus graves ? "Dans des cas extrêmement rares de contamination grave, dépassant les 450 μg/L, un traitement chélateur favorisant l'élimination du plomb par les urines est administré à l’hôpital pour réduire la plombémie en urgence, explique l'Inserm. En dehors de cette situation, la réduction de la plombémie passe par l'éviction des sources d'exposition."

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