Missak Manouchian au Panthéon : quatre moments à retenir de la cérémonie d'hommage national au résistant

Le résistant arménien, exécuté le 21 février 1944 par les nazis, a été inhumé mercredi soir au Panthéon aux côtés de sa femme, Mélinée.
Article rédigé par franceinfo
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Emmanuel Macron devant les cercueils de Missak et Mélinée Manouchian, au Panthéon, le 21 février 2024. (CHRISTOPHE PETIT TESSON / AFP)

"Vous entrez ici en tant que soldat, avec vos camarades, avec vos frères d'armes. (...) La France, reconnaissante, vous accueille." Le résistant Missak Manouchian a été inhumé au Panthéon, mercredi 21 février, quatre-vingts ans jour pour jour après son exécution par des soldats allemands, en 1944. Le cercueil du militant communiste apatride, mort pour la France, a été porté dans le temple aux côtés de celui de sa femme, Mélinée, et d'une plaque portant les noms de 23 camarades de lutte fusillés le même jour, à l'issue d'un hommage national conclu par un discours d'Emmanuel Macron. Voici quatre séquences à retenir de la cérémonie.

La lecture de la lettre de Missak à Mélinée Manouchian par Patrick Bruel

Les derniers mots d'un condamné. Parmi les moments les plus bouleversants de la cérémonie de panthéonisation, la lecture de la lettre d'adieu écrite par Missak Manouchian à sa femme, le 21 février 1944, quelques instants avant d'être fusillé par les nazis aux côtés de ses camarades.

Patrick Bruel, qui a lu le texte rédigé par Missak Manouchian à sa bien-aimée, a décrit sur France 2 l'"immense honneur" et "privilège" d'avoir été choisi. L'artiste avait consacré une chanson aux résistants exécutés au mont Valérien avec Aux souvenirs que nous sommes, dans son album Encore une fois, sorti en 2022. Il a ensuite été sollicité par Jean-Pierre Sakoun, président de l'association Unité laïque, pour intégrer le comité de parrainage pour la panthéonisation de Missak Manouchian.

Cette lettre devenue historique, et sa réinterprétation par le poète communiste Louis Aragon en 1955, avec le poème Strophes pour se souvenir, ont inspiré des hommages de nombreux artistes. Parmi eux, Léo Ferré, qui a composé en 1959 L'Affiche rouge, en référence au document placardé dans les rues françaises par les nazis pour discréditer Manouchian et plusieurs autres figures de la Résistance.

"L'Affiche rouge", chanson de Léo Ferré, interprétée par Feu! Chatterton

"Vingt et trois qui criaient la France en s'abattant." C'est le groupe français Feu! Chatterton qui a été choisi pour interpréter L'Affiche rouge, chanson composée par Léo Ferré à partir d'un poème de Louis Aragon en hommage aux résistants fusillés au mont Valérien.

Le groupe reprend régulièrement cette chanson en concert depuis l'automne 2021. "C'était comme une évidence : c'était à l'automne 2021, pile pendant la montée d'Eric Zemmour lors de la campagne présidentielle", expliquait à l'AFP le multi-instrumentiste du groupe, Sébastien Wolf. Le musicien a expliqué à l'AFP qu'il espérait faire réfléchir, dans un public "de tout bord politique" "Ceux qui ont fait de mauvais choix, à cause de la crise, de la peur, peut-être comprendront-ils que ce n'est pas l'étranger le problème."

Emmanuel Macron salue le "soldat de l'ombre" qui "se voulait poète"

"Qui meurt pour la liberté universelle a toujours raison devant l'histoire." Le président de la République a rendu hommage dans un discours à Missak Manouchian et à son engagement, "ivre de liberté et enivré de courage, enragé de défendre le pays qui lui a tout donné". Emmanuel Macron est revenu sur le parcours du résistant, rescapé du génocide arménien et réfugié en France, qui "rêve d'émancipation universelle" et "s'engage contre le fascisme au sein de l'Internationale communiste".

"Missak Manouchian, vous entrez ici comme soldat avec vos camarades, ceux de 'L'Affiche', du mont Valérien", a conclu le chef de l'Etat, pour qui "l'ordre de la nuit est désormais complet". "Aujourd'hui, ce n'est plus le soleil d'hiver sur la colline ; il pleut sur Paris et la France, reconnaissante, vous accueille."

Au fur et à mesure qu'il revenait sur le parcours de Missak Manouchian, le discours d'Emmanuel Macron a été ponctué de variations autour de la question : "Est-ce ainsi que les hommes vivent ?" Le chef de l'Etat faisait ici référence à un autre titre d'un poème de Louis Aragon, mis en chanson par Léo Ferré.

Un hommage aux "Français de préférence" et "d'espérance"

"La France de 2024 se devait d'honorer ceux qui furent 24 fois la France." Lors de son discours, Emmanuel Macron a insisté sur l'engagement en faveur de la France de Missak et Mélinée Manouchian, mais aussi des 23 autres résistants exécutés le 21 février 1944.

Le chef de l'Etat a honoré ces autres combattants fusillés au mont Valérien, "étrangers, et nos frères pourtant". Evoquant les demandes de naturalisation française de Missak Manouchian, refusées par deux fois par les autorités, il a mis sur le même plan les "Français de naissance" et ceux "d'espérance", engagés dans la Résistance, qui tous "défendaient les Lumières et ne se dérobèrent pas".

Une manière de mettre en exergue l'un des objectifs de cette panthéonisation : "Rappeler qu'être français, ça ne tient pas à l'origine, à la religion, au prénom, mais à la volonté".

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