Un crâne vieux de 3,8 millions d'années donne un visage à une espèce ancienne d'australopithèque
Ce crâne découvert en 2016 appartient à un "Australopithecus anamensis", qui pourrait avoir cohabité avec l'"Australopithecus afarensis", dont fait partie la célèbre Lucy.
Une crête osseuse, des grosses canines et une constitution robuste. Un crâne d'australopithèque, vieux de 3,8 millions d'années, a été mis au jour en Ethiopie. "Ce crâne est l'un des plus complets des fossiles d'hominidés de plus de 3 millions d'années", explique à l'AFP Yohannes Haile-Selassie du Museum of Natural history de Cleveland (Etats-Unis), coauteur de deux études publiées mercredi 28 août dans la revue Nature (en anglais).
A titre de comparaison, Toumaï (un Sahelanthropus tchadensis), considéré par certains paléontologues comme le premier représentant de la lignée humaine, est vieux d'environ 7 millions d'années. Ardi (pour Ardipithecus ramidus, une autre espèce d'hominidé) aurait 4,5 millions d'années et Lucy, la très célèbre australopithèque, est âgée de 3,2 millions d'années. D'autres fossiles d'australopithèque, moins connus, datent d'au moins 3,9 millions d'années mais seules des mâchoires et des dents avaient été retrouvées.
Découvert en février 2016 sur le site de Woranso-Mille, dans la région Afar en Ethiopie (à 55 km de là où a été découverte Lucy), ce nouveau fossile, appelé MRD, appartiendrait à un des tout premiers Australopithèques, appelés Australopithecus anamensis. Cette espèce a été "proposée en 1995 par la paléoanthropologue Meave Leakey après la découverte de 21 fragments de fossile" au Kénya, précise Le Monde. Mais rien ne permettait encore de visualiser les caractéristiques de sa tête.
Le crâne d'un homme adulte
"Nous pensions que Australopithecus anamensis se transformait progressivement en Australopithecus afarensis (Lucy) avec le temps", explique Stephanie Melillo, du Max Planck Institute for Evolutionary Anthropology en Allemagne, coautrice des deux études. Mais la découverte relance les dés : les deux espèces se seraient croisées dans les savanes de l'Afar pendant environ 100 000 ans. "Cela change notre compréhension du processus d'évolution et soulève de nouvelles questions : étaient-ils en compétition pour la nourriture ou l'espace ?", s'interroge Stephanie Melillo.
Cité par Le Monde, le paléoanthropologue Yves Coppens, codécouvreur de Lucy rappelle que l'évolution n'est pas forcément linéaire. Pour lui, il est possible que certains anamensis aient donné afarensis, "tandis que d'autres anamensis continuaient leur route de leur côté jusqu’à l'extinction"
Même s'il est tout petit, le crâne devait être celui d'un adulte, à priori masculin. Des reconstitutions faciales réalisées à partir des caractéristiques du fossile présentent un hominidé aux pommettes projetées vers l'avant, à la mâchoire proéminente, au nez épaté et au front étroit. A la surprise des chercheurs, le crâne s'avère être un mélange de caractéristiques propres aux Sahelanthropus comme "Toumaï" et aux Ardipithecus comme Ardi, mais aussi à d'autres d'espèces plus récentes. "Jusqu'à présent, il y avait un grand fossé entre les ancêtres humains les plus anciens, qui ont environ 6 millions d'années, et des espèces comme celle de 'Lucy', qui ont deux à trois millions d'années", raconte Stephanie Melillo pour qui cette découverte "relie l'espace morphologique entre ces deux groupes".
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