"Les Beatles à Paris" : une BD revient sur les trois semaines de concerts à l'Olympia qui ont tout changé
Ils se sont séparés il y a plus de cinquante ans, et pourtant il semble qu’il y ait toujours quelque chose de neuf à découvrir sur les Beatles. Quand ce n’est pas une série documentaire évènement qui rebat les cartes concernant les circonstances de leur séparation, c’est une exposition de photos inédites ou la publication d'une fiction réaliste. Quand ce n’est pas un nouveau morceau complété grâce à l’intelligence artificielle, c’est la promesse d’une série de biopics sur chacun des membres du groupe.
Ce qui nous occupe cette fois c’est une bande dessinée. Il y en eut d’autres (notamment Les Beatles en BD, 2016) mais celle-ci se concentre sur trois petites semaines durant lesquelles les Fab Four séjournèrent à Paris, il y a soixante ans. Et quelles semaines ! Cette vingtaine de jours a tout changé, ou presque : ils arrivèrent dans la ville lumière en tant que groupe le plus populaire d'Angleterre et en repartirent en tant que phénomène culturel à la conquête du monde. Les Beatles à Paris de Vassilia et Philippe Thirault, Christopher et Degreff, est paru le 6 mars 2024 aux éditions Robinson.
Panne de courant, foire d'empoigne, ce n'était pas gagné
En 1964, du 16 janvier au 4 février, les Beatles sont programmés à l’Olympia. Quarante concerts, deux par soir d’une trentaine de minutes chacun, sont prévus dans la salle du boulevard des Capucines. Cette série de shows a été conclue six mois à l’avance, bien avant que la notoriété de John, Paul, George et Ringo n’explose soudainement outre-Manche.
Le manager des Beatles, Brian Epstein, décide malgré tout d’honorer ces concerts, comptant sur le prestige de Paris pour servir de vitrine à ses poulains et les faire connaître à l’international. Son flair était juste, même si l’histoire était déjà en marche.
Pourtant, au début, rien ne se passe vraiment comme prévu dans la capitale française. Une panne de courant et une foire d'empoigne du côté des photographes ternit leur premier concert, Paul est à court d’inspiration pour composer, Ringo manque de louper le premier concert…
A l’affiche entre une Sylvie Vartan débutante et le chanteur Trini Lopez, ils peinent les premiers soirs à conquérir les foules, qui leur préfèrent l’artiste latino-américain. Mais au fil des jours, les Beatles font grimper le mercure et la folie du public, notamment féminin.
Un album bien documenté
A Paris, où John et Paul ont déjà effectué un séjour beaucoup plus modeste quelques années auparavant, les Quatre garçons dans le vent sont à la fois très dissipés et très occupés. Ils enchaînent les séances photo, sur les Champs-Elysées et dans leur chambre d’hôtel du George V – la fameuse bataille de polochons en pyjamas.
Ils enregistrent dans les studios Pathé Marconi de Boulogne-Billancourt deux versions en allemand de I want to hold your hand et She Loves You. Et, la panne d’inspiration de Paul ayant été de courte durée, ils mettent également en boîte les parties instrumentales d’une nouvelle chanson, Can’t buy me love. Heureusement, car ils doivent également composer au même moment les chansons de la bande originale du film A Hard Day’s Night. Mais ce que les quatre amis veulent avant tout, c'est s'amuser et rencontrer des filles.
Les auteurs de cette BD se sont minutieusement documentés, y compris dans la presse d’époque et dans les archives des émissions radio d'Europe 1, témoins de leur passage à Paris. Ce qui donne un album vivant, bien qu'un peu convenu, que viennent relever de petites anecdotes amusantes.
On apprend par exemple que Ringo Starr, très populaire alors auprès de la gent féminine, faillit louper le premier concert et arriva littéralement sur les chapeaux de roues… grâce à un taxi particulier conduit par un chauffeur de rallye. On découvre encore, parmi d'autres choses, que le groupe qui allait changer à jamais la pop tombait alors sous le charme de l’album d’un autre artiste révolutionnaire : Freewheelin' Bob Dylan.
Un dessin raccord avec l'esprit des sixties
Comme le fait remarquer le dessinateur Christopher, qui a déjà travaillé sur Prince, Pink Floyd et Led Zeppelin, "il y a plusieurs niveaux de lecture dans cette histoire. Un initié trouvera des détails qu’il ne connait pas, une allusion à des évènements à venir ou passés. Quant au néophyte des Beatles, il lira une belle histoire d’amitié." Ses dessins simples, d’inspiration ligne claire, ne s'embarrassent pas trop de détails. Mais ils sont raccord avec l’esprit des sixties qui plane sur cet album, où l’on sent l’explosion de créativité et la soif de liberté d’une jeunesse en train de s’émanciper du carcan étouffant de l’après-guerre.
On y croise quelques célébrités, telles Burt Lancaster, Phil Spector, Sylvie Vartan, Johnny Hallyday et le photographe Jean-Marie Périer. On ne voit pas en revanche Brigitte Bardot, que Paul et John brûlaient pourtant de rencontrer depuis des années. C’est en tout cas à Paris, au George V, que les Beatles apprirent qu’ils étaient numéro un pour la première fois aux Etats-Unis, avec I Want To Hold Your Hand. Ils s’envolèrent peu après à New York, où la Beatlemania allait connaître quelques jours plus tard, lors de leur première télévision américaine au Ed Sullivan Show le 9 février 1964, une accélération foudroyante. Paris ne fut pour eux qu'une parenthèse avant le succès planétaire.
"Les Beatles à Paris" de Vassilia et Philippe Thirault (scénario), Christopher (dessin) et Degref (couleur) est paru le 6 mars 2024 aux éditions Robinson. A noter : des planches de ce roman graphique sont exposées jusqu'au 6 mai 2024 au bar Marilyn et au restaurant de l'Olympia, bd des capucines à Paris.
Pour aller plus loin, un ouvrage très complet de 640 pages intitulé "Les Beatles à l'Olympia" d'Eric Krasker, fruit de plus de dix ans de recherches, est paru en janvier aux éditions du Cherche Midi.
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