Liban : l'humoriste Shaden Faqih dans le collimateur des autorités religieuses musulmanes

Les sketches irrévérencieux de Shaden Faqih, qui affiche son homosexualité dans un pays où la loi prévoit jusqu'à un an de prison pour les relations "contre-nature", ont déjà suscité des polémiques.
Article rédigé par franceinfo Culture avec AFP
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 2 min
Capture d'écran d'un spot annonçant la tournée de l'humoriste Shaden Faqih sur sa page Instagram (@shadyonshka). 
. (SHADEN FAQIH)

Une des plus hautes autorités religieuses musulmanes au Liban et un député ont porté plainte vendredi 10 mai contre une humoriste et militante des droits LGBTQ+ pour avoir tourné en dérision la prière hebdomadaire. Le Conseil supérieur chiite, plus haute instance de cette communauté, a porté plainte contre Shaden Faqih, connue pour son humour irrévérencieux et incisif, l'accusant "d'atteinte à la religion musulmane".

La veille, Dar al-Fatwa, plus haute instance de la communauté musulmane sunnite, avait demandé l'ouverture d'une information judiciaire contre l'humoriste, l'accusant notamment de "blasphème" et "d'incitation à la sédition religieuse et confessionnelle". Un député islamiste, Imad Hout, a également porté plainte, selon l'agence nationale d'information (ANI, officielle), contre la comédienne qui se moque des imams et de la prière du vendredi.

Dans un pays multiconfessionnel toujours profondément divisé après la guerre civile de 1975-1990, les humoristes transgressent allègrement les lignes rouges, se heurtant parfois à la censure ou aux autorités religieuses ou politiques. Shaden Faqih, qui affiche son homosexualité dans un pays où la loi prévoit jusqu'à un an de prison pour les relations "contre-nature", a déjà provoqué des polémiques avec des sketches particulièrement hardis. Interrogée par l'AFP, la jeune femme s'est refusée à tout commentaire dans un premier temps.

La liberté d'expression de plus en plus réprimée

Réagissant à cette affaire, Jad Chahrour, porte-parole de Skeyes, une ONG surveillant la liberté de la presse, a estimé que le Liban était "devenu un Etat policier". Dans une déclaration à l'AFP, il a déploré le fait que "les activistes, les journalistes et les organisations de la société civils sont réprimés (..) au moment où ceux qui commettent des crimes et provoquent des dissensions gouvernent le pays".

"Cette campagne à l’encontre de Shaden Fakih a tout l’air d’être préméditée", a-t-il encore confié au journal libanais L'Orient - Le Jour. "Le sketch a été filmé en secret, parce qu’il est normalement interdit de filmer dans la salle où Shaden se produit", a expliqué Jad Chahrour. "La vidéo a ensuite été publiée en ligne par des comptes suspects, puis largement diffusée."

En août 2023, un autre humoriste libanais, Nour Hajjar, avait été brièvement arrêté pour un sketch datant de cinq ans dans lequel il tournait en dérision des funérailles.

Le Liban est considéré comme plus tolérant que d'autres Etats arabes vis-à-vis de l'homosexualité, mais en juillet dernier, une proposition de dépénalisation de l'homosexualité, présentée par une poignée de députés, a provoqué une levée de boucliers.

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