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Manifestations en Iran : quand de célèbres actrices mettent leur notoriété au service du mouvement de contestation

Des comédiennes, qui comptent dans le paysage culturel iranien, n'ont pas hésité à soutenir la révolte qui secoue leur pays depuis la mort de Mahsa Amini. La plupart d'entres elles ont été arrêtées.
Article rédigé par Falila Gbadamassi
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 4 min
L'actrice iranienne Taraneh Alidoosti pose lors d'une séance photo, en marge de la 75e édition du Festival de Cannes, à Cannes, dans le sud de la France, le 26 mai 2022. Elle a été arrêtée le 17 décembre par le régime pour avoir soutenu le mouvement de contestation en Iran. (LOIC VENANCE / AFP)

L'arrestation mi-décembre de la célèbre actrice iranienne Taraneh Alidoosti, qui a donné lieu à une mobilisation internationale pour demander sa libération, n'est pas un cas isolé. Depuis le début de la révolte, en septembre, suite à la mort de la jeune Mahsa Amini en garde à vue, plusieurs comédiennes ont mis leur notoriété au service du mouvement de contestation en le soutenant publiquement. Comme "14 000 manifestants pacifiques", selon les chiffres des Nations unies, la majorité d'entre elles a été interpelée. 

Si pour sa part, elle ne semble pas avoir fait l'objet de poursuites particulières, la comédienne Fatemeh Motamed-Arya se désolidarise très vite de la propagande du régime concernant le voile obligatoire. Dans un tweet publié le 13 octobre 2022, la journaliste et activiste Masih Alinejad explique que la comédienne, "qui soutenait les lois sur le hijab", exprime dans une vidéo sa colère après que son image a été utilisée pour une affiche pro-voile des Gardiens de la révolution. Le 27 septembre, c'est sans hijab que Fatemeh Motamed-Arya participe à des obsèques publiques, rapporte le journaliste Armin Arefi dans Le Point. 

Des femmes célèbres qui font tomber le voile

Début décembre, Iran International a annoncé l'arrestation de l'actrice Mitra Hajjar dont la page Instagram ne fait pas mystère de son engagement en faveur de ce mouvement.  

Hengameh Ghaziani, arrêtée le 20 novembre après avoir posté une vidéo d’elle tête nue, avait été pour sa part libérée sous caution une semaine plus tard. "Cela pourrait être mon dernier post. A partir de maintenant, si quelque chose m'arrive, sachez que je serai toujours avec le peuple d'Iran jusqu'à mon dernier souffle", avait-elle indiqué au bas de la vidéo sur sa page Instagram. On la voit s’y attacher les cheveux en queue de cheval, un geste de soutien aux manifestants.

Le 20 novembre, Katayoun Riahi avait été également interpelée pour une vidéo d'elle sans foulard publiée sur son compte Instagram le 18 septembre, soit deux jours après le décès de Mahsa Amini. La photo de profil du compte Instagram de la comédienne la montre d’ailleurs sans voile. Katayoun Riahi a aussi fait l'objet d'une libération sous caution.

A l’instar de ses collègues, les actrices Soheila Golestani et Faezeh Aeen. Elles ont recouvré la liberté le 11 décembre, tout comme le le directeur de théâtre Hamid Pourazari. Ils avaient été tous les trois détenus pendant dix jours après avoir réalisé une vidéo dans laquelle, entre autres, Soheila Golestani marche dans un parc, vêtue de noir et sans voile, puis s’arrête au pied d’un escalier où elle est rejointe par neuf autres femmes et cinq hommes. Ces derniers prennent la même pose que la comédienne.

Pourchassés par le régime 

Dans un article publié début décembre, Iran International indique que "150 personnalités du cinéma ont été convoquées, arrêtées, accusées, interdites de quitter le pays ou persécutées de diverses manières par le régime lors des récentes manifestations".

A l’instar de tous ceux qui soutiennent la contestation, les artistes sont la cible du régime iranien. L’humoriste Zeinab Mousavi, alias "Empress Kuzcoo", a été récemment condamnée à deux ans de prison pour son soutien au soulèvement populaire contre la République islamique. Tout comme le rappeur Toomaj Salehi. 

Par ailleurs, les journalistes Niloufar Hamedi (Shargh Daily) et Elaheh Mohammadi (Ham Mihan), qui ont été arrêtées après avoir couvert la mort de Mahsa Amini, sont emprisonnées depuis septembre. Leur avocat Mohammad Ali Kamfirouzi a été, lui aussi, interpellé mi-décembre.

Selon le dernier rapport de Reporters sans frontières sur les journalistes emprisonnés dans le monde, "la République islamique d’Iran, avec 47 détenus, est devenue la troisième plus grande prison au monde pour les journalistes, un mois seulement après le début d’un vaste mouvement de contestation". 

Le 16 décembre, Amnesty International indiquait qu’au "moins 26 personnes risquent d’être exécutées en lien avec la vague de soulèvement qui balaie le pays". Sur ces personnes, "au moins 11 sont condamnées à mort et 15 sont inculpées d’infractions punies de la peine capitale, et attendent leur procès ou comparaissent devant les tribunaux".

Le 24 décembre, l'appel du rappeur Saman Seydi, qui compte parmi les personnes sous le coup d'une sentence capitale pour avoir exprimé leur soutien au mouvement, a été accepté par la Cour suprême. Mais cette dernière a confirmé la peine de Mohammad Ghobadlou, également condamné à mort, alors que son appel avait, lui aussi, fait l'objet d'une issue favorable dans un premier temps. En lien avec les manifestations, les autorités iraniennes ont exécuté deux personnes, Mohsen Shekari et Majidreza Rahnavard. Taraneh Alidoosti a été interpellée, le 17 septembre, pour avoir critiqué le régime et ces exécutions sommaires.

Selon Iran Human Rights, "au moins 100 manifestants risquent d'être exécutés, accusés ou condamnés à la peine de mort (et) au moins 476 autres ont été tués". 

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