Tour de France 2022 : après le miracle Jakobsen, la revanche du banni Groenewegen
Le Néerlandais, responsable du terrible accident impliquant Fabio Jakobsen en 2020, s’est imposé dimanche lors de la 3e étape, au lendemain du succès de son compatriote.
Le 5 août 2020 a marqué leur vie au fer rouge, l'un entraînant l'autre dans une terrifiante chute sur la première étape du Tour de Pologne. Presque deux ans plus tard, le destin s'est chargé de le rappeler au monde entier d'un clin d'œil appuyé. Au lendemain de la victoire du miraculé Fabio Jakobsen, son "bourreau", Dylan Groenewegen, a levé les bras sur la troisième étape du Tour, dimanche 3 juillet.
Abasourdi d'avoir sauté le maillot jaune Wout van Aert d'un boyau sur la ligne, le Néerlandais a pu savourer lui aussi son retour au premier plan. Il s'agit de sa cinquième victoire sur la Grande Boucle, la première depuis 2019.
"C'est magnifique. Hier j'étais fâché contre moi-même parce que ça n'avait pas fonctionné. Mais c'est moi qui m'étais raté, j'avais fait une erreur. Dans le final aujourd'hui, les jambes commençaient à être lourdes, mais j'ai mis le paquet. C'était très, très juste", observait le vainqueur à l'arrivée.
Menaces de mort et paranoïa
Un retour au premier plan, mais surtout un retour tout court pour le banni du peloton. Suspendu neuf mois par l'UCI à la suite de l'accident de son compatriote, Groenewegen a fait profil bas, rongeant sa honte et luttant contre la virulence d'une frange du public, au point d'avoir eu peur pour sa vie. "J'ai reçu plusieurs lettres [de menaces] et un nœud coulant auquel on me disait de pendre mon fils qui n'avait alors pas encore un an", dévoilait-il au magazine Helden Magazine (article en néerlandais) en janvier 2021.
Marqué, le Néerlandais a dû jumeler une culpabilité immense et une fureur de se racheter, envers les autres mais aussi pour lui. "Lorsque vous recevez ce genre de courrier, vous prenez peur… J'ai alors alerté la police, qui a pris mon récit très au sérieux et nous a placés, moi et ma famille, sous protection. C'était très étrange à vivre. Une équipe de police était installée devant mon domicile en permanence et, si je souhaitais sortir, il fallait alors que je prévienne l'un des agents afin qu'il m'accompagne", se désolait le Batave, autorisé à reprendre au Tour d'Italie en mai 2021.
Explications glaciales
Si chacun semble avoir tracé son chemin depuis l'accident, et si les deux Néerlandais ont regoûté au succès (dix victoires pour Groenewegen, 19 pour Jakobsen), les relations restent au mieux cordiales, au pire glaciales. En mai 2021, après une entrevue afin de trouver une sortie juridique à leur différend, Fabio Jakobsen s'était étonné que son compatriote ait pu évoquer une "belle conversation". "Je tiens à rétablir les faits : Dylan n'a pas présenté d'excuses personnelles et il n'a pas montré qu'il était disposé à assumer la responsabilité de ses actes. J'aimerais quand même arriver à un accord avec Dylan, mais il faut être deux pour danser le tango", avait grincé Jakobsen.
I was surprised to read the comments made by Dylan Groenewegen with regard to our recent meeting.
— Fabio Jakobsen (@FabioJakobsen) May 6, 2021
The meeting was arranged to try to reach a common understanding relating to the accident in Poland last August.
Interrogé dimanche sur ce parallèle déconcertant de les voir à nouveau liés,cette fois par la victoire, Groenewegen a tenu à saluer la résilience de Jakobsen. "C'est super que Fabio ait gagné hier, après tout ce qu'il s'est passé. Mentalement il est très, très fort, je le félicite, je suis content pour lui. Aujourd'hui, c'est moi qui gagne, c'est comme ça. Je crois que pour les Néerlandais qui suivent le Tour, c'est bien."
La hache de guerre entre les deux coureurs n'est peut-être pas totalement enterrée, Néanmoins, sur la route, ils n'ont pas fini de se suivre.
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