Une Espagne au Panthéon du football
Au niveau palmarès, ce qu'elle a fait n'a pas d'égal ! Placées dans la même situation qu'elle, la RFA des années 70 (Beckenbauer) et la France des années 2000 (Zidane) n'avaient pu réussir la passe de trois. L'Allemagne de l'Ouest, victorieuse de l'Euro 1972 puis du Mondial 1974, avait buté sur l'ultime obstacle tchécoslovaque et un tir au but fatal signé Panenka à l'Euro 76. Vainqueurs de la Coupe du monde 1998, les Bleus avaient confirmé en s'adjugeant l'Euro 2000 puis la Coupe des Confédérations 2001 avant de flancher au premier tour du Mondial 2002 à la surprise générale. Plus loin dans le temps, le grand Brésil de la fin des années 50 avait manqué le triplé historique en s'inclinant en finale de la Copa America 1959 (contre l'Uruguay) entre ses deux triomphes planétaires de 1958 (en Suéde avec un énorme Pelé) et en 1962.
Mieux que le Brésil, la RFA ou la France
Ensuite, si l'on regarde l'empreinte qu'elle laissera, il convient de se montrer lucide et objectif. L'Espagne d'Iniesta et Xavi offre un jeu chatoyant par intermittence. Cette formidable équipe a tellement de marge sur ses rivaux qu'elle semble parfois se contenter de gérer quand on aimerait qu'elle récite son football tout le temps, ce qui est impossible. Dans cet Euro comme lors du dernier Mondial, elle n'a pas fait l'unanimité comme en 2008, loin s'en faut. Mais elle ne peut être tenue pour responsable de cela, la plupart des équipes préférant l'affronter en jouant très bas et en espérant marquer sur une des rares occasions qui trainent. Ce fût le cas de la France (très mal fait) et du Portugal (pas loin de réussir) cet été. Et les autres n'avaient pas procédé autrement il y a deux ans en Afrique du Sud: l'Espagne avait dû se contenter de victoires 1-0 des huitièmes à la finale car Portugais, Paraguayens, Allemands et Bataves n'avaient fait que défendre en misant sur le contre. Ceux qui jouent sont punis comme l'Italie ou l'Eire (4-0) cette année ou la Russie (3-0 en demi-finale de l'Euro 2008).
Une génération exceptionnelle
Grâce à des passeurs exceptionnels comme Xavi, Iniesta ou Fabregas, des latéraux capables de centrer correctement et de marquer des buts (Alba, Silva, Navas), des responsables du secteur défensif solides (Busquets, Ramos, Piqué, Casillas) et un collectif bien huilé dont Del Bosque tire toute la quintessence, cette invincible armada peut encore durer quelques temps, au moins jusqu'à la Coupe du monde 2014 au Brésil où elle visera la passe de quatre. Songez qu'il manquait Puyol et Villa, deux titulaires habituels, et qu'aucune tactique ne paraît la rebuter –elle peut évoluer sans attaquant de pointe ou pas, faire tourner le cuir ou exercer un pressing efficace selon la physionomie du match… C'est tout bonnement extraordinaire au sens propre du mot.
Reconnaissance
Dans quelques décennies, quand des enfants nous demanderons notre avis sur cette Roja là, il ne faudra pas hésiter à sortir les adjectifs dithyrambiques. Ce ne sera pas galvaudé pour cette génération exceptionnelle qui enchante ceux qui aiment le foot comme on aime le pratiquer dans les cours de récré, simplement et sans forfanterie. N'en déplaise aux "pisse-froid" qui n'ont eu de cesse de la critiquer depuis un mois, cette sélection espagnole restera dans l'histoire. Et l'on s'en souviendra avec respect et admiration.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.