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Nadal maudit, Wawrinka en profite

Diminuer les mérites de Stanislas Wawrinka serait incommodant, mais la victoire du Suisse (6-3, 6-2, 3-6, 6-3) doit autant à son talent qu’à la blessure de Rafael Nadal qui s’est bloqué le dos dans un échange au début du deuxième set, alors qu’il était mené une manche à rien et un break à zéro. L’Espagnol attendra avant d’égaler Pete Sampras et ses 14 levées du Grand Chelem.
Article rédigé par Grégory Jouin
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 4min
Rafael Nadal, dubitatif (MAL FAIRCLOUGH / AFP)

La dernière fois qu’une finale d’un Majeur a tourné court remontait à 1990 avec l’abandon de Stefan Edberg contre Ivan Lendl en finale, ici-même à l'Open d'Australie. Après avoir survolé le tournoi et l’ultime match pendant un set et demi, le Suédois avait renoncé au cours du troisième acte alors le Tchécoslovaque venait de se détacher au score (4-6, 7-6, 5-2). Sa ceinture abdominale le faisait trop souffrir et le Scandinave avait prudemment arrêté.

Le précédent Edberg

On a crû un moment revenir 24 ans en arrière ce dimanche à Melbourne. Nadal s’est bloqué le dos sur un coup au troisième jeu du deuxième set. Il s’est tout de suite tenu le dos et s’est penché en avant en grimaçant. Le Majorquin est parvenu à assurer les deux points suivants pour gagner son jeu de service et revenir à 1-2, mais il est sorti du court pour se faire soigner trois minutes par le physiothérapeute, comme le règlement l’autorisait.

Injustement sifflé à son retour sur le court par un public qui croyait sûrement à du bluff, Nadal a repris le jeu. Mais tout le monde a immédiatement compris que le match était terminé tant l’octuple lauréat de Roland-Garros était diminué, ne pouvant servir correctement ni de se déplacer latéralement de façon efficace.  Les jeux ont alors défilé en faveur du Suisse dans une ambiance clairement refroidie, mais Nadal n’a jamais voulu abandonner, enlevant même la troisième manche au forceps et en profitant de la nervosité adverse*.

Un comportement tout à son honneur car Nadal est un vrai guerrier, et Wawrinka méritait de conclure son premier Grand Chelem sur un vrai point, ce que Justine Hénin avait refusé à Amélie Mauresmo sur ce même court en 2006 (menée 6-1, 2-0, la Belge avait abandonné, se plaignant de problèmes gastriques).

Wawrinka, un exploit à la Safin

Mais encore une fois, minimiser l’exploit de Stanislas Wawrinka serait malvenu. Le Vaudois a réussi pendant 50 minutes une performance exceptionnelle sur la Rod Laver Arena en dominant le meilleur joueur du monde, Rafael Nadal,en puissance et en vitesse (avec notamment des services ravageurs -19 aces- et des coups droits supersoniques, 53 coups gagnants sans compter son 11/12 au filet). On n'avait pas vu Nadal autant acculé en défense depuis sa défaite contre Tsonga en demi-finale de l'édition 2008 ou sa déroute devant Del Potro en demie à l'US Open 2009. 

Stanislas Wawrinka

La mainmise du Suisse lors de cette première manche a rappelé la réussite de Pat Cash à Wimbledon 1987 contre Ivan Lendl, de Marat Safin face à Pete Sampras à l’US Open en l’an 2000, ou de Juan Martin Del Potro devant Roger Federer à Flushing Meadows en 2009. A chaque fois, le challenger avait sorti le numéro 1 mondial en évoluant à un niveau incroyable.

Impossible de savoir

La seule différence est que le combat de titans n’a pas duré une heure cette fois-ci. La faute à un Rafael Nadal vraiment diminué, incapable de tenir de longs échanges et contraint de jouer en deux ou trois coups de raquette, ce qu’il sait faire ponctuellement mais pas sur la longueur.

On ne saura jamais ce qui serait advenu sans ce coup du sort. Wawrinka aurait-il poursuivi sur le même rythme et conclu en trois sets ? Nadal serait-il parvenu à recoller au score, fidèle à sa légende de plus grand combattant de l’histoire ? Wawrinka aurait-il tremblé en s’approchant de son premier grand titre, comme il a pu le montrer lors des troisièmes et quatrièmes sets ? Personne n’est en mesure de le dire.

*Nadal a abandonné en quart de finale de l'édition 2010 contre Andy Murray alors qu'il était mené deux sets à rien et 3-0. Il s'est blessé au début de son quart de finale contre David Ferrer, vainqueur 6-4, 6-2, 6-3, en 2011. Et il s'est estimé trop court (après sa blessure au genou) pour disputer l'édition 2013. "C'est vrai que je n'ai pas eu beaucoup de chance et que ce  tournoi est douloureux pour moi. C'est un tournoi où j'ai souvent eu des  problèmes physiques dans ma carrière. Mais c'est la vie, c'est le sport, ce  n'est pas la fin du monde. Ce n'est qu'un nouveau moment difficile, ce n'est  pas le premier".

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