Mattenet, colosse aux pieds d'argile
"J’ai fait deux ans catastrophiques aux Championnats d’Europe, du monde et aux Jeux Olympiques." Adrien Mattenet l'avoue sans peine, sa carrière tourne au ralenti depuis 2011. Désormais 38e joueur mondial, le natif d'Eaubonne était à l'époque le 19e meilleur pongiste de la planète. Une performance qui en faisait le successeur naturel des Mousquetaires, ce quatuor d'enfer membre du Top 20 dans les années 90 (Chila, Eloi, Legoût, Gatien). Arrivé sur le tard dans les structures fédérales afin de "suivre un cursus scolaire normal", Mattenet se forme à Beauchamp, sous la houlette de son entraîneur Renaudin.
Ses débuts sur la scène française et européenne n'en sont pas moins convaincants. A 20 ans, celui qui était surclassé en Benjamins dès ses années Poussins décroche un premier titre de champion de France en double avec Emmanuel Lebesson. Deux ans plus tard, en 2010, il enlève la médaille de bronze par équipes aux Championnats d'Europe à Ostrava. En individuel, il atteint les quarts de finale mais tombe face à Timo Boll, la référence de la discipline sur le Vieux Continent.
JO de Londres, un rêve devenu cauchemar
Malgré la défaite, Adrien Mattenet justifie son statut de grand espoir. "J'étais très mature dans mon entraînement parce que je savais ce que je devais faire. J'avais le qualitatif, il me manquait juste le quantitatif", explique-t-il pour justifier sa réussite précoce. Conscient qu'il lui faut changer de dimension pour grandir, Mattenet rejoint Pontoise-Cergy. S'il reste dans le Val d'Oise, il découvre dans ce club "la Pro A et le très haut niveau européen." Quart de finaliste européen, huitième de finaliste mondial et champion de France de double en 2011, l'année est riche en émotions pour le pongiste aux petites lunettes carrées.
Cette grosse saison lui vaut le meilleur classement de sa carrière et la qualification pour les Jeux de Londres à l'été 2012, "un rêve". Et le début du "cauchemar". Le longiligne athlète se manque complètement lors des Championnats d'Europe précédant le rendez-vous olympique. Un raté qu'il reproduit à Londres. "Je ne me suis pas reconnu dans l’aire de jeux. Je n’ai vu que récemment la vidéo du match, plus d’un an après… Et franchement ça fait peur". Assis sur sa chaise, les mains jointes, le N.1 français n'a pas changé de ton et garde le regard fixe pour évoquer cet épisode douloureux.
Mattenet, compétiteur acharné
Sous ses faux airs d'Harry Potter et de gentil garçon Mattenet est un véritable compétiteur, avide de victoires. "Je suis pas un mec qui va dire "je veux faire un 8e ou 1 quart" parce que ça n’a pas de sens pour moi. Si on s’entraîne tous les jours, c’est pour ramener des médailles à la maison, affirme-t-il vigoureusement. Et surtout l’or, parce qu’on ne se souvient pas du mec qui a gagné le bronze aux Championnats d’Europe 2002." Prématurément éliminé aux Mondiaux de Bercy cette année, Adrien Mattenet est en reconquête. "(Ces deux dernières années), j’ai voulu changer beaucoup de choses dans mon jeu, ma manière de m’entraîner, ma vie. Pour évoluer il faut prendre des risques et j’en ai pris énormément. Aujourd’hui je me calme parce qu’à un moment il faut se stabiliser."
Un objectif qu'il pensait atteindre en rejoignant l'ambitieux club de Levallois. Cette fois, le sort a modifié les plans de cet homme "trop perfectionniste" mais également "très ouvert". Le projet francilien tombé à l'eau, Mattenet s'est donc dirigé vers l'Allemagne et Plüderhausen, avant un probable exil en Asie l'année prochaine. Avant de se lancer dans cette nouvelle aventure, le pongiste de 25 ans veut revenir à son meilleur niveau. "A un moment il faut marquer les esprits et construire des choses", clame-t-il d'un ton décidé, sans se départir d'un sourire tellement large qu'il dévoile ses incisives aiguisées. En Autriche, Adrien Mattenet veut retrouver le goût de la victoire. Pour transformer l'argile en or.
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