Toulon: Wilkinson, he is a legend
Vendredi soir, stade Pierre-Mauroy à Lille. Toulon est encore sous la menace du Racing-Metro à dix minutes de la fin de sa demi-finale de Top 14. Derrière un regroupement, Claassens éjecte la balle. A 25 mètres des poteaux, Jonny Wilkinson la reçoit, fait mine de partir à gauche puis revient sur son pied droit pour claquer un drop imparable. Le RCT est libéré. A la fin du match, l'Anglais remercie le public rouge et noir de s'être déplacé si loin puis se retire sans faire de bruit tandis que le stade l'ovationne. De Newcastle à Toulon en passant par le XV de la Rose, Wilko n'a jamais perdu ni talent, ni humilité. "Il y a ceux qui auront joué avec Pelé et ceux qui auront joué avec Wilkinson", s'enflamme son coéquipier Jean-Charles Orioli, sous le charme.
Tout n'a pas toujours été aussi simple pour le légendaire demi d'ouverture. Appelé à 18 ans en équipe nationale, il connaît une véritable déroute en Australie (76-0) pour son premier match international en tant que N. 10. Wilkinson s'en relèvera, comme de ses deux années de quasi-inactivité à cause de blessures à répétition (2004-2006). "Il était entièrement tourné vers son sport: c'était comme un étudiant du rugby qui voulait sans cesse repousser les frontières pour aller jusqu'où il pensait pouvoir aller", explique Mike Tindall, son ancien coéquipier en sélection nationale.
Meilleur joueur du monde à 23 ans
Couvé par Rob Andrew, son prédécesseur en club et en équipe d'Angleterre, le natif de Frimley a vite tutoyé les cimes. En quatre ans, il remporte un championnat et deux coupes nationales ainsi que deux tournois des VI Nations. A 23 ans, il est au sommet de son art. Chef d'orchestre du XV de la Rose, il le mène au Grand Chelem sur le sol européen et sur le toit du monde six mois plus tard en 2003. Dans ces deux succès, "l'Ange blond" prend une part prépondérante en terminant meilleur réalisateur. Il est sacré meilleur joueur du monde. En finale du Mondial contre l'Australie, le gaucher passe même le drop de la victoire du pied... droit à deux minutes de la fin. "Je me souviens d'un match lors duquel il avait manqué deux pénalités et un drop avec son pied gauche favori et il a décidé de frapper du pied droit, raconte son ami Tindall. +Wilko+, c'était ce genre de gars. Il restera comme le professionnel ultime."
Une qualité que lui reconnaissent tous ceux qui l'ont côtoyé. "Jonny a tout le répertoire du demi-d'ouverture. C'est un incroyable joueur au pied face au but, sa défense est énorme, et des deux mains il peut distribuer le jeu, s'extasie l'actuel sélectionneur anglais Stuart Lancaster. Avoir fait ce qu'il a fait aussi longtemps le rend unique. Son influence sur d'autres joueurs à travers le monde a été phénoménale." S'il s'est ouvert depuis son arrivée à Toulon en 2009, le joueur de 34 ans reste un travailleur obsessionnel. Dans le documentaire "Intérieur Sport" sur Canal +, on le voyait toucher à de multiples reprises un pylône électriques situé à plus de 25 mètres de lui. Avant la demi-finale de Top 14 vendredi, son président Mourad Boudjellal ironisait sur "l'état de traumatisme de Jonny" après qu'un mouvement social ait retardé Toulon et empêché les buteurs de s'entraîner la veille. "En arrivant, je ne m'attendais pas à découvrir un homme comme ça. C'est le joueur qui m'a le plus marqué dans ma carrière", témoigne le manager toulonnais Bernard Laporte.
Quant à ceux qui s'inquiéterait pour son futur, Woodward se charge de les rassurer. "Beaucoup ont souligné ses interminables séances seul à botter. A certains moments, je devais le faire sortir et l'envoyer se coucher. Mais pour moi le plus incroyable, c'est le temps qu'il passait à développer son agilité, sa vision et l'analyse du jeu. Si vous enlevez le rugby à Jonny, il continuera de briller en faisant autre chose." Comme en signe de deuil, son maillot floqué du 10 ne verra plus la lumière de Mayol pendant une saison. Sir Jonny n'éclairera plus l'enceinte provençale de ses fulgurances. Mais son ombre planera encore longtemps au-dessus de la Rade...
Vidéo: Wilkinson parle de son avenir à Stade 2
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.