Six nations 2024 : les espaces dans la défense, le dernier chantier tricolore avant le Crunch

Après trois essais trop facilement encaissés à Cardiff, la défense tricolore sera attendue au tournant lors du choc de la dernière journée face à l’Angleterre, samedi à Lyon.
Article rédigé par Maÿlice Lavorel, franceinfo: sport
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 4 min
Julien Marchand et Grégory Alldritt face au Gallois Rio Dyer lors du match entre le pays de Galles et la France, à Cardiff, le 10 mars 2024. (AFP)

Du spectacle sur les deux lignes et des doutes qui persistent. Alors que les Bleus ont retrouvé des couleurs offensives et enfin multiplié les essais face au pays de Galles dimanche, la prestation défensive n’a pas toujours rassuré, et même constitué le gros point noir de la victoire. Pilier du premier mandat de Fabien Galthié, avec une grande solidité sur les dernières lignes, une capacité de pression sur l'adversaire, et peu d'occasions laissées pour se faire déborder, la défense tricolore semble avoir déraillé depuis le quart de finale perdu contre les Springboks. 

À Cardiff, avant leur fin de match de folie, les Bleus ont été transpercés défensivement par les jeunes Gallois, concédant deux premiers essais en laissant trop d’espaces dans l’axe. "On prend des essais en début de match un peu trop facilement", avait regretté Thomas Ramos dans les travées du Millennium dimanche soir. Le premier essai adverse est venu sur une percée de l’ailier Rio Dyer, et le second est arrivé après un retour intérieur d’Owen Watkins pour faire la différence et servir sur un plateau Tomos Williams. "Ce sont des choses qu’on répète depuis quelques semaines : à l’intérieur il faut monter, il faut fermer, c’est notre point faible sur le match", a poursuivi l’ouvreur du soir. "Il manquait un peu d'intensité défensive. Ce qu'on a bien fait offensivement, on a eu du mal à le faire défensivement en début de match", estime Vincent Clerc, consultant France Télévisions.

Un secteur sous tension

Début février, les Bleus avaient déjà craqué sur le plan défensif lors de leur entrée en lice face à l’Irlande (38-17). Quelques jours plus tard, à la veille du deuxième match contre l'Ecosse, les discussions sur les largesses défensives avaient d'ailleurs un peu tendu l'entraîneur en charge du secteur, Shaun Edwards. "On a été la meilleure défense de la Coupe du monde. OK ? J'ai compris la question et oui, je suis d'accord, on doit s'améliorer", avait-il répondu à une question sur le nombre d'essais encaissés lors des dernières sorties des Bleus.

Si la défense ne fait pas partie des secteurs concernés par les changements dans le staff après le Mondial, elle a pu pâtir des nombreuses absences dans le groupe (dont certains bons défenseurs, comme Romain Ntamack), et des ajustements qui ont suivi. "Il faut toujours se réadapter, reprendre des repères et des automatismes. Ça peut jouer dans la désorganisation défensive", note Serge Betsen, 63 matchs sous le maillot bleu, et ancien entraîneur de la défense à Rouen.

Selon lui, le facteur changement est particulièrement pertinent pour expliquer les trous d'air de la défense tricolore à Cardiff, en raison des nouveautés dans la composition. "On a eu Thomas Ramos en 10, et la première titularisation de Nolann Le Garrec en 9. Il y a ces éléments de nouveauté qui ont fait que la défense de l’équipe de France a eu un manque d'efficacité. Mais pour moi c’est normal, c’est dû aux changements et aux adaptations de l’équipe par rapport aux différents rôles."

Sur l'essai de Tomos Williams, Owen Watkins s'est faufilé entre le néo-10 Thomas Ramos et Nicolas Depoortere, l'un des trois joueurs qui fêtaient leur première cape. "Un joueur comme Depoortere vivait sa première sélection, n'a pas l'habitude de jouer premier centre, donc il manquait peut-être un peu de repères, et avec la pression, il y a peut-être eu un peu d'attentisme", décrypte Vincent Clerc. Sur les entrées des Gallois dans leurs 22 mètres, les Bleus ont souvent semblé désorganisés, et sans deuxième rideau pour couvrir.

Une défense plus lisible ?

Mais les difficultés des Bleus peuvent aussi venir d'une capacité d'adaptation de leurs adversaires à leur jeu. "Dans le rugby moderne, chaque équipe regarde au millimètre près, au détail près, pour trouver des failles dans le déplacement des adversaires, des solutions pour créer des brèches, pour avancer offensivement. Il faut constamment se réinventer", décrypte Serge Betsen. Plus surveillée et plus attendue, la défense française, longtemps résistante sur la durée et capable de récupérer les ballons, a peut-être aussi perdu de sa solidité parce qu'elle est devenue plus lisible.

Nicolas Depoortere est mal placé et laisse Owen Watkin s'infiltrer dans la défense française. Le centre gallois peut décaler sans difficulté son demi de mêlée pour le deuxième essai gallois de la rencontre.
Journée 4 : la nouvelle erreur défensive tricolore profite à Tomos Williams Nicolas Depoortere est mal placé et laisse Owen Watkin s'infiltrer dans la défense française. Le centre gallois peut décaler sans difficulté son demi de mêlée pour le deuxième essai gallois de la rencontre.

Dans la ferveur de la victoire, les essais encaissés face aux Gallois ont rappelé que l'équipe de France est encore en reconstruction, quelques mois après une grosse déception au Mondial à la maison, et au début d'un nouveau cycle de quatre ans vers 2027. "On ne peut pas tout remettre à niveau du jour au lendemain et sortir un match parfait. Forcément il y a des secteurs moins performants que d’autres", explique Dimitri Yachvili, consultant France Télévisions. "Ça ne se fait pas aussi facilement qu’on peut le penser, il faut un peu de temps pour trouver de l'efficacité", abonde Serge Betsen.

Samedi, face au XV de la Rose, qui monte en puissance et qui s'est appuyé sur sa défense dans sa propre reconstruction, les Bleus vont passer un nouveau test. "On a besoin d’être plus précis sur certains points et notamment sur la défense", a reconnu Fabien Galthié après l'annonce de sa composition jeudi. "Ça tape fort sur le milieu du terrain, il va falloir qu’on réponde présent, sûrement plus qu’on ne l’a fait auparavant."

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