Pistorius, l'Oscar du drame
D'Oscar Pistorius, les images qui devraient passer à la postérité ne sont malheureusement pas celles que le Sud-Africain aurait voulu laisser. Celles de cet athlète aux jambes de carbone, multimédaillé aux paralympiques, courant avec les valides sur la piste londonienne aux JO ont depuis deux jours laissé place à celles d'un homme caché sous sa capuche quittant son domicile escorté par la police. Un peu plus tôt, sa compagne, la mannequin australienne Reeva Steenkamp, était retrouvée morte criblée de quatre balles au domicile de l'athlète à Pretoria. Ses larmes à son arrivée au tribunal qui l'a inculpé pour le meurtre auront fait le tour du monde, aussi vite qu'il avalait ses tours de piste. De cette fin tragique devant les caméras du monde entier, à ses débuts beaucoup plus intimes, sa vie a toujours été placée sous le signe du drame.
Les premières épreuves
La vie d'Oscar Pistorius n'a jamais été facile. Onze mois après sa naissance à Prétoria, ses parents se résignent à le faire amputer de ses deux jambes, le jeune enfant étant né sans péroné. A 13 mois, il se fait poser des prothèses qui ne le quitteront plus. Il fait ses premiers pas avec quatre mois plus tard. Ce traumatisme sera suivi d'un second quelques années après : le divorce de ses parents alors qu'il n'a que 6 ans. Sa mère, conseillère d'orientation, celle qui lui disait "mets tes jambes" après avoir dit à son grand-frère "mets tes chaussures", meurt alors qu'il n'a que 15 ans. Overdose.
Oscar se retrouve avec son père duquel il n'est pas très proche. Le sort s'acharne un peu plus lorsqu'il se blesse gravement au genou au rugby. Un nouveau coup dur qui va transformer en coup du destin, puisqu'il se tourne dès lors vers l'athlétisme. Son rêve de gamin, disputer les Jeux Olympiques, va alors prendre forme. A Pékin, il gagne trois titres chez les Paralympiques et quatre ans plus tard participe avec les valides aux JO de Londres. "Blade Runner" comme il est surnommé, a réussi son pari.
La part d'ombre
L'histoire est belle. Handicapé, meurtri dans sa chair et dans son esprit plus jeune, il est pour reprendre les termes du magazine américain Times, qui l'avait inclus dans son palmarès des 100 personnes les plus influentes du monde, "la définition même de l'inspiration au niveau mondial". Belle gueule, charismatique, les médias se l'arrachent. Les sponsors aussi. La marque Nike en fait l'un de ses étendards avec une publicité, "I am the bullet in the chamber" (Je suis la balle dans le barillet), qui prend un sens bien plus morbide à la lumière des derniers évènements.
Elle a été retirée. Ce sordide fait divers qui l'affecte aujourd'hui, rappelle que l'homme possédait sa part d'obscurité. En 2008, déjà, il est victime d'un terrible accident de bateau qui lui fracture deux côtes, la mâchoire et les pommettes. Plus tard, alors qu'il est en voiture avec un ami qui vient d'écraser et tuer un piéton, le quotidien afrikaans Beeld rapporte que Pistorius a tenté d'empêcher des journalistes de photographier l'accident, en déclarant platement "parce que je suis Oscar Pretorius".
Un penchant pour les armes à feu
Résident dans une somptueuse villa à l'intérieur d'un lotissement fortifié de Pretoria, pourtant qualifié en 2009 de "domaine le plus sûr d'Afrique du Sud", l'homme avait développé une paranoïa et un fort penchant pour les armes à feu. Le journaliste Mikael Sokolove du New York Times racontait dans un article consacré au champion comment ce dernier s'était saisi d'un revolver en pleine interview et s'était mis à ramper dans le couloir, après avoir entendu un bruit jugé suspect. L'athlète lui confiera également aller sur le stand de tir en pleine nuit, "simplement de temps en temps quand (il) ne (pouvait) pas dormir".
Il révéla également en 2010, au journal Libération être en faveur de la peine de mort, "pour les crimes de sang, car cela (l)'affecte beaucoup". La presse sud-africaine s'était fait aussi l'écho d'altercations avec ses petites amies, Pistorius faisant un passage par la case prison en septembre 2009 suite à une accusation de violences envers une jeune femme. Une affaire classée sans suite. Contrairement à celle qui l'a ébranlé le jour de la Saint-Valentin. Et pour laquelle il pourrait être inculpé de "meurtre avec préméditation".
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