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Paris 2024 : "C'est le rêve d'une vie de faire les Jeux olympiques dans son pays", confie Florent Manaudou

Le nageur français, qui a remporté une médaille d'argent aux Jeux olympiques de Tokyo, revient pour franceinfo sur une année riche pour lui, qui s'est conclue par un changement de club au mois de septembre. Il se projette aussi sur Paris 2024. 

Article rédigé par franceinfo - Jérôme Val, édité par Clémentine Vergnaud
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 8 min
Le nageur Florent Manaudou à Antibes (Alpes-Maritimes), le 26 octobre 2021. (PATRICE LAPOIRIE / MAXPPP)

Il a cumulé quatre médailles - une en or, trois en argent - en trois éditions de Jeux olympiques - Rio, Londres et Tokyo - et vise déjà l'échéance des prochains jeux, ceux de Paris 2024, pour étoffer son palmarès. À moins de 1 000 jours des JO français, le nageur Florent Manaudou s'est confié à franceinfo. Celui qui a un temps quitté les bassins pour les terrains de handball et s'est même essayé à la comédie confie son état d'esprit, ses ambitions et ses craintes alors qu'il vit en cette fin 2021 un moment charnière. Rencontre avec un nageur apaisé mais déterminé. 

franceinfo : Vous avez fait une pause dans votre carrière de nageur, entre 2016 et 2019, pour basculer vers le handball, avant de finalement revenir à la natation. Est-ce que vous pourriez revenir à vos premières amours et refaire du handball, encore une fois ?

Florent Manaudou : Je referai du hand un jour mais j'ai déjà fait la bascule une fois. Même si j'ai réussi à faire une médaille olympique après, le chemin n'a pas été simple parce que j'ai eu quelques petits problèmes de réadaptation à l'eau. Mais je referai du hand, sûrement après Paris 2024, pour le plaisir. Il y a pas mal de clubs dans la région où je suis installé, à Antibes (Alpes-Maritimes).

Les différents changements entre natation et handball ont-ils été difficiles à gérer pour votre corps, sachant que ces sports n'utilisent pas forcément les mêmes muscles ? 

Le passage entre le hand et la natation a été compliqué parce que ça faisait des années que je n'avais pas foulé un parquet. Je n'ai d'ailleurs jamais eu un corps de handballeur en jouant au hand et je pense que je ne l'aurai jamais, même si je joue encore pendant vingt ans. Le passage du hand à la natation a aussi été compliqué, mais j'ai quand même retrouvé entre 80% et 90% de mes automatismes assez rapidement.

Vous avez quitté Marseille, où vous vous entraîniez, pour Antibes au mois de septembre. Aviez-vous besoin de changer d'air ?

Oui. Et j'avais envie de bosser avec des coachs très jeunes. J'avais envie d'être plus impliqué encore dans ma préparation. En ayant discuté avec eux - parce que ce sont des amis de longue date et pas seulement des coachs -  leur discours m'a plu. Je suis content de voir autre chose et de changer de bassin. Je suis toujours licencié au Cercle des nageurs de Marseille parce que ça me tient à cœur mais ça me plaît d'être énormément dans la discussion avec les coachs. C'est quelque chose que j'ai toujours aimé et j'ai trouvé le challenge d'Antibes assez cool. Ils vont me faire évoluer et je vais les faire évoluer. De plus, je vais être bronzé toute l'année, ça a pesé dans la balance [rires].

Pourtant, en changeant de club, vous choisissez aussi de prendre une longue pause... 

J'ai toujours fonctionné un petit peu comme ça. D'autres enchaînent beaucoup, comme les Australiens qui font presque du non-stop jusqu'aux championnats du monde. Moi, je suis plutôt du genre à me ressourcer en faisant d'autres choses : voir mes amis, ma famille... J'ai passé dix ans de ma vie à Marseille. Quand j'y suis arrivé, j'étais un gamin ambitieux, évidemment, et j'en suis reparti il y a un mois et demi en étant un homme et en ayant réalisé presque tous les rêves de gosse que j'avais. C'est quelque chose de bien, mais c'est aussi dur de quitter un lieu comme ça.

Ce n'est pas un simple déménagement, c'est quitter tout un pan de sa vie. J'ai besoin d'acter cela et qu'on me laisse faire ce dont j'ai envie pour l'instant.

Florent Manaudou

à franceinfo

[...] Je m'entraîne quand même. Je fais pas mal de sport dans la semaine : du football avec mes amis le lundi, un peu de squash, du basket, un peu de natation et de la musculation... J'aime tous les sports donc j'ai fait un programme assez multisport. Je vais peut-être garder ce rythme, en nageant un petit peu plus, de janvier jusqu'aux championnats du monde, au mois de mai. Après, je reprendrai peut-être deux mois de vacances, en gardant un pied dans le sport. Ensuite, ce sera presque uniquement de la natation, entre septembre 2022 et - je l'espère - août 2024. 

Avez-vous déjà la tête aux Jeux olympiques de Paris 2024 ?

Pas totalement. On en entend beaucoup parler et c'est le rêve d'une vie de faire les Jeux olympiques dans son pays. Il y a des bons côtés et des côtés un peu stressant car on a envie de bien faire devant son public. Il reste quand même deux ans et demi : c'est plus court que d'habitude mais je me garde jusqu'à septembre 2022 pour prendre mes marques dans mon nouveau club, avec mes nouveaux coachs, et après je partirai sur deux ans à très haut niveau j'espère.

Cela signifie que l'objectif de Paris 2024 est sûr à 100% ?

Il est sûr mais on ne sait jamais ce qui peut se passer. On peut avoir une blessure ou une grosse baisse de motivation quand c'est une compétition normale... Là, ce sont les Jeux olympiques et ils sont à Paris. La motivation sera donc là. On ne se réveille pas tous les matins en se disant : "Cool, les Jeux sont à Paris, j'ai envie de sauter dans l'eau et nager vite !" Ça ne marche pas vraiment comme ça mais c'est sûr que c'est dans un coin de notre tête. Et le fait qu'il n'y ait que trois ans entre deux olympiades rend les choses beaucoup plus simples, surtout pour les sportifs qui sont plutôt en fin de carrière.

On a senti chez vous une émotion particulière aux Jeux olympiques de Tokyo, lorsque vous avez gagné votre médaille d'argent. Que reste-t-il de cela aujourd'hui ?

Ce sont les Jeux durant lesquels je me suis le plus régalé. J'étais dans une quiétude dans laquelle je n'avais jamais été avant. J'ai réussi à basculer en juillet parce que j'ai eu une année vraiment pas bonne au niveau des performances. Je me suis dit : "Il faut que tu profites vraiment de chaque instant parce qu'être aux Jeux, ça n'arrive pas tous les week-ends." Je garde cet état d'esprit et j'ai l'impression que plus rien ne peut m'arriver sur le plan du stress parce que j'ai expérimenté une grande compétition comme ça en étant vraiment zen. J'ai retrouvé l'essence du sport, le plaisir de la natation. C'est quelque chose qui m'avait manqué. En fait, tant que je n'avais pas arrêté la natation, je ne m'étais pas posé la question : "Est-ce que j'aime vraiment nager ? Est-ce que j'aime faire de la compétition ? Est-ce que ça me plaît d'avoir tout le temps des challenges tous les ans ?" Je suis un garçon qui fonctionne énormément au challenge et celui de revenir était pour moi plus excitant que de gagner à Rio. [...]

Vous visez donc la même chose aux championnats du monde ?

On va essayer. C'est vraiment une année de transition. Je n'ai pas envie de me donner d'objectif. Bien sûr, si je me qualifie pour les championnats du monde et que je vais à Fukuoka (Japon), je vais avoir envie de gagner, comme d'habitude. On verra la forme de mes adversaires et la mienne mais j'ai envie de débroussailler le côté technique de la natation avec les coachs d'Antibes et partir sur une base solide en septembre. Je vais par exemple travailler à l'Insep [l'Institut national du sport, de l'expertise et de la performance] pour analyser des vidéos, essayer de nouvelles choses... Bien sûr, j'aimerais décrocher une médaille à Fukuoka.

On fonde beaucoup d'espoirs sur la jeune génération pour Paris 2024. Avez-vous envie d'avoir un rôle pour les encadrer un peu ?

Après les championnats de France, tous les qualifiés se sont réunis le soir et je savais que j'allais être capitaine parce que le staff me l'avait demandé. Je n'avais jamais vraiment été capitaine parce que je ne me sentais pas forcément légitime et qu'il y avait des nageurs plus vieux que moi. J'ai pris ce rôle à cœur et, en ayant une compétition pas très bonne, je me suis sauvé avec ça. Je me suis dit : "C'est quand même un rôle super cool !" J'ai essayé d'apporter des choses aux jeunes. Ils sont très bien encadrés et je pense qu'ils le seront d'autant plus que c'est Paris 2024 [...]. Mais je vais essayer d'apporter ma pierre à l'édifice et s'ils ont des questions, ou si j'ai des remarques à leur faire, bien sûr je leur ferai.

Vous évoquiez tout à l'heure vos rêves de gosse. L'un de ceux-là était de jouer la comédie. Vous avez tourné dans une série, fais une apparition dans des films. Allez-vous continuer ?

J'ai toujours des petites envies de temps en temps. C'est quelque chose qui m'attire. J'ai fait quelques petites choses, comme un happening dans le dernier Astérix de Guillaume Canet, et ça m'a plu. Je ne serai jamais acteur à temps plein, c'est sûr, car je n'ai pas les qualités pour l'être. Mais j'aime bien être au contact de gens que je ne vois pas tous les jours et discuter avec des personnes très douées dans des domaines qui ne sont pas du tout sportifs. Cela me fait évoluer dans ma vie d'homme. La musique, le cinéma, ce sont des choses que je pourrai faire de temps en temps.

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