Meynard, de la souffrance à l'assurance
"Je n'ai peur de personne pour monter sur la boîte." Dans le milieu du sprint, ces paroles sont fréquentes. Comme chez les boxeurs, le combat psychologique débute largement avant l'épreuve. William Meynard fait partie de cette caste des sprinteurs, et il assume son statut: "Un chrono est une référence de travail, de progression. Mais, le jour J, c'est dans la tronche que tout se passe", assène-t-il. Son record personnel (47"77) pourrait lui donner des espoirs dans la piscine de Barcelone, mais cette saison, il ne fait pas partie des dix meilleurs temps de la planète. Comme tous les autres nageurs français. Le Marseillais ne se résigne pas pour autant: "Je me présente avec une grande ambition", assure-t-il.
La souffrance comme poisson-pilote
A 26 ans, après avoir longtemps été dans l'ombre des Bernard, Leveaux, Gilot et Bousquet, son titre de champion de France à Rennes lui a donné un nouveau statut, comme une nouvelle étape dans son évolution. Une blessure à l'aine fin 2011, après avoir pris le bronze sur 100m à Shanghaï, a été le point de départ de sa reconstruction. "Vaincre des souffrances m'a aidé à comprendre qu'il fallait souffrir pour atteindre de belles choses. Mais pas souffrir pour souffrir. Souffrir en sachant pourquoi on souffre. Avant cette saison, je m'entraînais comme un robot, comme un pied, sans savoir ni pourquoi ni comment, à l'arrache, obnubilé par la performance, à 85% dans l'effort à l'état brut, pas concentré car pas intéressé par ce que je faisais. Bourricot, je me projetais sur des performances de dingue, un combat contre une chimère me freinant dans mon élan tant j'étais impatient de les atteindre sans savoir ni pourquoi ni comment. Quand on souffre sans savoir pourquoi, on n'avance pas, au mieux, on fait du surplace. Au pire, on coule."
Cette blessure, l'échec dans sa quête de qualification olympique à Londres ont achevé son évolution, sa mue. Après avoir frôlé la rupture après Shanghaï: "Comme je n'ai pas gagné, ce n'était pas ni exceptionnel, ni révolutionnaire. Ensuite, aucune retombée derrière. Enfin, blessé dans la foulée, j'ai raté ma sélection olympique. Dans la foulée, j'ai eu plus envie d'arrêter ma carrière que de la continuer. Mais mon nouvel entraîneur Mathieu Burban a su me remotiver."
"Je nage en confiance"
Et c'est un autre homme qui s'est mis dans la ligne d'eau vers Barcelone. "Savoir pour quoi et pourquoi je nage m'a fait devenir plus mature, éveillé et ouvert au monde. Donner un sens à toutes ces séances rébarbatives et répétitives m'a greffé une belle paire d'ailes tant parfois j'ai l'impression de voler sur l'eau." William Meynard a ainsi pu encaisser de nouvelles charges, ajoutant 3km de plus à sa ration quotidienne, tout en modifiant son mode d'expression: "Comme je nage plus lentement, j'encaisse mieux, plus, et plus longtemps. Du coup, un 100 m ne me fatigue plus. Il m'est facile, pas dans la facilité, mais dans la maîtrise. A l'image de la nouvelle personne que je deviens, ma nage est coulée, puissante et patiente pour attaquer à propos. Pour aller vite, comme j'ai tout appris à faire lentement, je suis plus calme, tranquille, détendu, casanier, moins bavard, donc, oui, en tout, plus lent." Cette lenteur, il la transforme en vitesse dans les derniers mètres, là où il flanchait parfois par le passé: "Désormais, entre les 75 mètres et l'arrivée, je monte les tours, la clé pour gagner. Ce que je fais est solide, je nage en confiance : en moi, en mon travail, en mon entraîneur, en ma destinée et ma future réussite."
A Barcelone, face aux James Magnussen, Vladimir Morozov, Nathan Adrian, il devra sortir le grand jeu le jour J, pour que l'aboutissement de sa mue éclate aux yeux de la planète entière. Après avoir découvert les Mondiaux à Rome en 2009 lors de sa première sélection en équipe de France, William Meynard a pris deux médailles à Shanghaï en 2011. Deux ans après, ses progrès se poursuivront-ils ?
Vidéo: Meynard de retour au sommet depuis les derniers championnats de France
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