Menaces sur la Coupe d'Europe
Le ton est donné alors que les actionnaires de l'ERC (société organisatrice des coupes d'Europe), c'est-à-dire les représentants des ligues et fédérations des six nations majeures de l'hémisphère Nord, se réunissent mardi à Dublin à la demande des parties française et anglaise pour entamer la négociation d'un nouvel accord-cadre organisant les coupes d'Europe à partir de la saison 2014-2015.
"Les Anglais nous ont mis une forte pression ces derniers mois" presque comme un préalable à la discussion, a déclaré Patrick Wolff. "Sauf échec catastrophique de la négociation, ce que je ne crois pas, nous voulons jouer avec les Celtes et avec les Anglais", a-t-il insisté. "Pour nous, il y a un produit, la Coupe d'Europe. Ce produit doit être conforté, amélioré dans le cadre des négociations", a-t-il poursuivi. "Nous souhaitons que les choses soient bouclées d'ici à la fin de l'année. Le rugby n'a pas intérêt à rester dans l'incertitude pendant deux ans. Il faut que tout le monde puisse structurer les choses dans son pays", a-t-il estimé.
La formule en question
les Français sont pourtant partie prenante d'une remise en question du cadre actuel de la coupe d'Europe (formule, calendrier, gouvernance, répartition financière...), qui arrivera à échéance en 2014. La Ligue nationale de rugby (LNR) et Premiership Rugby réclament notamment des changements d'ordre sportif qui se feraient au détriment des équipes irlandaises, écossaises, galloises et italiennes évoluant en Ligue celtique. Elles souhaitent la réduction du nombre de clubs de 24 à 20. Le nombre de clubs français et anglais resterait inchangé (6 chacun) mais celui des équipes de Ligue celtique (Irlande, Pays de Galles, Ecosse et maintenant Italie) passerait de 10 à 6. Le vainqueur de la Coupe d'Europe et du Challenge européen compléteraient le tableau. Français et Anglais veulent que les équipes de la Ligue celtique soient qualifiées en fonction de leur classement, comme eux, et non en vertu de quotas nationaux comme aujourd'hui, au risque de voir certains pays, comme l'Italie ou l'Ecosse, absents de la compétition. Ils souhaitent aussi une refonte du calendrier afin de terminer les compétitions européennes fin avril.
Les Français admettent donc la nécessité d'une refonte mais ne veulent pas écarter totalement les équipes celtes, pour conserver son attrait à la coupe d'Europe. D'ailleurs, on voit mal comment les provinces irlandaises, victorieuses de la compétition ces deux dernières années, pourraient en être écartées par le fait du Prince.
La ligue anglaise "jusqu'au boutiste"
Mais les Anglais n'en démordent pas. Afin d'enfoncer le clou, la Ligue anglaise (Premiership Rugby) et le diffuseur britannique BT ont annoncé mercredi dernier la signature d'un contrat, de 4 ans et 152 millions de livres (189 millions d'euros), pour la diffusion des matches du Championnat d'Angleterre mais aussi ceux disputés par les clubs anglais dans les compétitions européennes à partir de 2014. Cette annonce a accru les tensions autour de la négociation car seule l'ERC a le droit de vendre les droits de diffusion de ses compétitions. Cette dernière a immédiatement rappelé qu'elle avait signé un accord, "entériné par Premiership Rugby", avec le groupe Sky jusqu'en 2018. Sauf que la Coupe d'Europe post-2014 n'existe pas encore et fait justement l'objet de négociations en cours..Rien n'y fait, les menaces sur la Coupe d'Europe perdurent. Le directeur exécutif de BT, Mark Watson, a également annoncé sa volonté de créer une nouvelle compétition européenne à l'expiration des accords actuels (à l'issue de la saison 2013-14), en réaffirmant la volonté jusqu'au-boutiste des Anglais: "nous voulons monter, ou au moins contribuer à monter, un magnifique tournoi doté d'une superbe formule et avec, nous l'espérons, les meilleurs clubs. La Coupe d'Europe, selon le contrat actuel, a encore une saison à vivre et ce sera fini".
Le bras de fer ne fait donc que commencer Celtes et Italiens souhaitent conserver la formule actuelle. Les Français veulent des changements mais négociés et ne sont pas disposés à abandonner la Coupe d'Europe ou à exclure les Celtes, comme les Anglais se disent prêts à le faire. L'annonce anglaise relève "de la pression classique avant le début d'une négociation importante", dédramatise Patrick Wolff. Car ces bravades anglaises ne sont pas sans rappeler le souvenir de 2007. L'arrivée à échéance des accords de Paris de 1999 avait alors viré à l'épreuve de force avec une menace de boycottage par les clubs français et anglais. Il avait fallu quatre mois d'âpres négociations pour s'entendre. Sans doute cette fois les choses rentreront-elles dans l'ordre. Mais les tentations financières sont telles que, sait-on jamais, les Anglais pourraient tenter de passer en force.
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