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"Le Monde d'Après" : La France de la boxe à la rescousse de sa nouvelle génération de combattants

Après cinq mois au placard, les boxeurs vont pouvoir remonter sur les planches. Premier événement post-covid pour les sports de combat, le gala "Le Monde d'Après", qui se tiendra ce jeudi soir à Paris au cirque Bormann, doit permettre de venir en aide à la toute la nouvelle génération de boxeurs en proie à la précarité.
Article rédigé par franceinfo
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Après de nombreux mois d'interruption, la cloche s'apprête à sonner : la reprise du noble art. Les planches vont pouvoir grincer, les cordes trembler et les boxeurs se déchaîner ! Premier événement post-Covid pour les sports de combat, le gala "Le Monde d'Après" s'inscrit dans un contexte particulier de précarité de la boxe professionnelle, de crise économique et de crise sanitaire. L’événement a pour objectif de relancer la dynamique d'un sport, fragilisé par un manque de structure et d'ambition, qui ne fait plus envie. Pour permettre ce renouveau, les organisateurs ont décidé de mettre à l'honneur la nouvelle génération de boxeurs, issue de l'équipe de France olympique, tels que les deux talentueux champions de France, Christ Esabe et Khalil El Hadri, ou encore le phénomène Milan Prat.

Le combat contre la précarité est lancé

Faisant partie des sportifs professionnels les plus impactés par l'interruption totale des compétitions, les boxeurs ont été privés de leurs revenus durant toute cette période. Si en temps normal, les boxeurs ne vivent que de leurs bourses, la crise sanitaire du Covid-19 a un peu plus mis en lumière le manque de protection sociale qu'ils subissent. "La Fédération française de boxe n’a jamais statué sur le sort des boxeurs professionnels donc ils sont livrés à eux-même, et ne boxent qu’au cachet. Quand tout s’arrête, ils n’ont pas d’allocations chômage, pas d’indemnité et donc ils n’existent pas !" s'insurge Arnaud Romera, l'un des membres du collectif Fight Nation, organisateur du gala.

C’est toute une génération, qui ne fait que de la boxe, qui se retrouve dans la merde..."

À l'image de Tony Yoka, ou de Souleymane Cissokho, certains boxeurs arrivent tout de même à ne pas vivre que du ring. Ces boxeurs ne représentent cependant que 10% des professionnels, et bénéficient souvent de gros contrats. Pour les 90% restant, ils ne disputent que deux à trois combats par an, et par conséquent, vivent bien en-dessous du seuil de pauvreté avec un revenu moyen ne dépassant pas les 6000 euros annuel. "Il fallait trouver des moyens pour permettre à ces grands espoirs de la boxe française, qui ont entre 19 et 25 ans, de se relancer" enchaîne Romera, avant de poursuivre : "Généralement, beaucoup de boxeurs ont un petit métier à côté, ils sont éducateurs ou bossent à la mairie par exemple, mais ces jeunes-là non. C’est toute une génération, qui ne fait que de la boxe, qui se retrouve dans la merde..."

Un gala pour venir en aide aux combattants...

Face à cette précarité chronique, le collectif Fight Nation a pris la décision de voler au soutien de la nouvelle génération de boxeurs français. "Avec le coronavirus, les mecs n’ont pas boxé depuis six mois environ, même plus, parce qu’il n’y a pas eu de match en janvier et février, puisque le début de saison est généralement calme. Donc on s’est dit, dès que ça sera autorisé, essayons de monter un gala de boxe pour tous ces boxeurs pros afin de les mettre en lumière à Paris", raconte Arnaud Romera.

Avec des moyens inédits et innovants financièrement, le gala s'est monté en trois semaines. Sans subvention ni sponsor, "Le Monde d'Après" a dû compter sur l'effort de toutes les personnes engagées pour se transformer en "une véritable action de soutien à la boxe professionnelle". Jamais dans l'histoire du sport le contexte économique n'a été aussi défavorable, et ce sont donc les acteurs de la soirée qui financent les différents combats. Même son de cloche pour les boxeurs qui, avec des billets allant de 20 à 115 euros, vont pouvoir se payer grâce à la vente de places : "Un boxeur qui vend beaucoup de places, c’est très intéressant pour lui. Plutôt que de prendre une bourse de 1500 euros par exemple, pour faire un combat en six rounds, il vend des places. Si le mec vend 200 places à 20 euros, il gagne 4000 euros, et pour lui c’est super avantageux", se félicite l'organisateur.

Consciente que la situation sanitaire reste des plus préoccupantes, la FFB a décidé de mettre en place tout un protocole sanitaire drastique pour faire de ce gala une réussite. Des dispositions que l'ancien président de la Ligue Nationale de Boxe Professionnelle assure respecter pour ouvrir la porte à d'autres événements de même envergure. Seul point noir de ces mesures de sécurité, l'impact financier qu'elles génèrent : "Ça alourdit considérablement l’organisation et surtout, ça coûte cher. Quand on teste une centaine de personnes, entre la visite médicale pour avoir l’ordonnance, et le test, on est à 77 euros, ça donne un surcoût de 7000 à 8000 euro", estime Romera. Une enveloppe coûteuse dont ne pourront pas bénéficier les combattants du gala.

... Et "mettre la boxe au centre de l'actualité"

Derrière cet élan de solidarité, il y a une stratégie colossale que ne cache pas le collectif : "On voulait être les premiers à organiser un événement parce que ça nous permet d'occuper un espace médiatique et digital qui est vacant, puisqu’il n’y a pas de sport. L'idée était de mettre la boxe au centre de l’actualité". En amenant des gens qui n'ont pas forcément l'habitude de s'intéresser à la boxe, "Le Monde d'Après" souhaite surfer sur la dynamique du premier événement de sport de combat post-Covid pour relancer la boxe professionnelle : "On amène vraiment tous les gens qui comptent, les gens influents pour les sensibiliser à la boxe professionnelle. Et derrière, on espère que ça va déboucher".

Avec les cinq plus gros combats diffusés à partir de 20h45 sur france.tv, Fight Nation entend rétablir l'équité sportive qui faisait défaut à la boxe ces dernières années. "Les combats n’ont pas été assez valorisés ou valorisants. Quand il y a des combats trop déséquilibrés où on connait à l’avance le vainqueur, ça n’intéresse pas le public. Et ce sont ces combats qui ont conduit les diffuseurs, les partenaires, et même le grand public à se désintéresser de la boxe", conclut Romera d'un triste constat. Dans le Monde d'après, il veut que ça change.

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